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Newcastle : un mercato sans folie bridé par le Big 6
Et si finalement l’argent n’achetait pas tout ? Celui de Newcastle n’a en tout cas pas suffi à attirer Ekitike ou Maddison ni à signer des stars de premier plan. La faute à un projet encore jeune, des investisseurs qui ne veulent pas tout claquer en un an, mais surtout à une Premier League sous l’influence du Big 6, qui a posé des bâtons solides dans les roues des Magpies.
À peine l’impressionnant mercato d’hiver de Newcastle bouclé (Guimarães, Wood, Willock, Burn et Trippier), que les rumeurs les plus folles se multipliaient déjà dans les tabloïds anglais : Neymar, Werner, Osimhen, Asensio, Moussa Diaby se sont retrouvés associés au club du nord-est de l’Angleterre. Finalement, à la mi-août, seules trois arrivées ont garni l’effectif des Magpies, Sven Botman (40M€), Nick Pope (14M€) et Matt Targett (15M€), déjà prêté depuis janvier par Aston Villa. Pas de quoi inquiéter le Big 6 anglais a priori. Logique aussi, puisque les gros clubs de la PL ont tout fait pour empêcher Newcastle de jouer trop vite dans la cour des grands.
La PL protège ses cadors
« Il faut s’attendre à une évolution plutôt qu’à une révolution à Newcastle, prévient Kieran Maguire, économiste du football derrière le podcast The Price of Football. De manière un peu sournoise, le Big 6 a réussi à garder un avantage financier pendant plusieurs années sur Newcastle. » D’abord en faisant voter d’urgence un règlement interdisant à un club d’avoir un sponsor détenu complètement ou en partie par les propriétaires dudit club. Puis en remplaçant cette loi, juridiquement difficile à tenir, par un panel indépendant qui doit désormais valider tous les contrats de sponsoring. L’idée est claire et ciblée : empêcher à Newcastle une croissance fulgurante en injectant à perte, via des contrats de sponsoring sur-évalués avec des sociétés annexes du fonds d’investissement public de l’Arabie Saoudite, comme a pu le faire Manchester City avec Etihad Airways pendant des années pour contourner le fair-play financier.
« Le club n’a qu’une seule solution, faire grandir ses revenus commerciaux. Ceux-ci ne sont passés que de 26 à 29 millions de pounds par an entre 2007 et 2021 sous Mike Ashley. Loin des plus de 200 millions des gros clubs », développe Kieran Maguire. Forcément, chez les supporters, ces règles nouvellement imposées passent mal. « Le système est pourri de manière à protéger le Big 6. On ne prend en compte que les revenus pour nous bloquer, mais dans le même temps on ignore complètement la dette des clubs riches », fulmine Tom, supporter des Magpies de 37 ans.
Bling ou pas bling ?
Si, dans les médias, les propriétaires de Newcastle jouent la carte de la modestie et assurent que Newcastle ne veut pas être le nouveau PSG, en coulisse, l’envie ne manque pas. Ni chez certains supporters. « Les fans avaient perdu tout espoir sous la précédente direction, explique Tom. Et là, soudainement on se réveille avec le club le plus riche du monde. Donc forcément, on s’attendait à quelques gros noms cet été. » S’il y en a bien un qui est heureux de cette relative cure d’austérité par rapport aux moyens démesurés des propriétaires, c’est l’homme qui a transformé le club sur le terrain depuis sa nomination en novembre dernier, Eddie Howe. Avec les nombreuses arrivées de janvier, le coach anglais a fait de Newcastle la quatrième meilleure équipe de 2022, derrière Manchester City, Liverpool et Tottenham. S’il aimerait un attaquant supplémentaire, il se montre satisfait de pouvoir compter sur le même groupe. Et n’hésite pas à mettre son véto sur les joueurs qui lui sont suggérés, comme récemment avec Tanguy Ndombele comme l’a révélé l’Evening Standard. L’ancien coach de Bournemouth veut des joueurs de caractère, à l’image des recrutements de Bruno Guimarães et Dan Burn.
Si le transfert d’Ekitike a échoué, les Magpies sont encore prêts à poser une belle somme sur un dernier joueur cet été. Sans pour autant surpayer dès leur second mercato, bien conscients que Manchester City et le PSG n’ont eu cesse de payer une « taxe pour les riches » pour des joueurs finalement décevants. Là encore, c’est Eddie Howe qui porte ce message dans les médias. « Ils ne veulent pas balancer de l’argent comme l’a fait Everton et se retrouver avec des joueurs aux salaires trop importants qui les rendraient invendables », affirme Kieran Maguire. L’argent disponible, mais largement inutilisable pour les transferts, n’est pas pour autant perdu. « Ça nous permet enfin d’investir dans le centre d’entraînement, dans les équipes de jeunes, dans l’équipe féminine et dans un staff d’expérience », se félicite Tom, qui a toute confiance en sa direction et Eddie Howe, à l’image des supporters des Magpies traumatisés par la direction précédente. Des fondations solides plutôt qu’un mercato flamboyant : et si l’impossibilité de faire un recrutement galactique dès la première année était la meilleure nouvelle pour la Toon Army ?
Par Gaétan Mathieu