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Ndombele, un milieu à percer
Auteur d’une prestation XXL face au PSG, Tanguy Ndombele pousse Bruno Génésio à se creuser les méninges, puisque son intégration dans le onze suppose de sacrifier Houssem Aouar, Memphis Depay ou de détricoter carrément tout un système opérationnel. La définition même de l'embarras du choix.
Au moment de préparer son monospace break, Bruno Génésio est chaque week-end confronté au même casse-tête. Qui installer à la place du milieu ? Si la banquette arrière est déjà bien occupée, que les passagers soient indéboulonnables (Marcelo, Morel, Lopes) ou interchangeables (Marçal, Mendy, Tete, Rafael), et que les attaquants se chargent et se déchargent au gré de l’opposition, de la forme du moment ou d’une gestion assez claire dans l’esprit du technicien rhodanien, celui-ci se retrouve toujours avec un bagage sur les bras au moment de boucler les ceintures. Et impossible de se décider à le balancer en vrac au fond du coffre.
Dans la première partie de la saison, le dilemme concernait l’encombrant mais efficace Memphis Depay et Houssem Aouar. Mais une fois le Néerlandais piqué au vif et la pépite maison révélée, c’est Tanguy Ndombele qui est venu frapper avec force à la fenêtre pour qu’on lui fasse une petite place dans le onze. « Les deux dernières entrées en jeu de Tanguy me posent problème, mais de bons problèmes, avouait Pep Génésio avant le match face à Guingamp la semaine dernière. À nous de trouver l’équilibre. L’objectif est de mettre la meilleure équipe possible dans le meilleur système possible. »
Douzième homme
Cinq mois après son arrivée en provenance de Picardie, le massif Ndombele ne doit sa onzième place en matière de temps de jeu dans l’effectif lyonnais qu’à la blessure de Bertrand Traoré (1011 minutes en L1 pour l’ancien Amiénois contre 1004 pour le Burkinabé). Mais dimanche, face à Paris, le staff a fait le choix d’aligner dans l’équipe de départ celui qui avait jusqu’ici le statut de premier remplaçant. Placé dans un milieu à trois à la gauche de l’inusable Lucas Tousart, sur la même ligne que Nabil Fekir, le joueur de 21 ans a été épatant de justesse, d’explosivité, d’agressivité et d’insouciance. Au menu : des crochets incisifs et des sombreros pour être le meilleur dribbleur du match (6 réussis sur 6 tentés), des interventions précieuses (9 ballons récupérés), des passes laser en profondeur, une conduite de balle maîtrisée et de la percussion, le n°28 des Gones a été un danger permanent. Au point d’être le joueur ayant subi le plus de fautes (4, dont celle qui amène le rouge de Dani Alves). « Je joue comme je suis, c’est naturel, assurait-il ce mardi en conférence de presse. Dans mes prises de balle, j’ai toujours eu cette faculté à aller de l’avant, à casser les lignes. Je joue comme ça depuis que je suis petit et j’ai progressé là-dessus. »
Dimanche, Tanguy semblait à la fois libéré de toutes les contraintes liées à son poste et à la fois pile dans le ton d’un sommet du championnat. Au point que son capitaine n’a pu que saluer la prestation de son coéquipier. « Ils m’ont donné le titre de meilleur joueur du match, mais pour moi, il le mérite peut-être plus, déclarait Nabilon en sortant du match. On est tous très contents de l’avoir avec nous, il nous apporte beaucoup. » Crever l’écran une soirée contre Paris est déjà quelque chose de fort. Mais quand il s’agit déjà de la troisième fois de la saison que le natif de Longjumeau brille face à l’ogre de la capitale, les bonnes impressions doivent laisser place aux certitudes. Car Ndombele reste pour le moment « l’homme aux trois matchs contre Paris » : celui où il s’est révélé à la Ligue 1 sous le maillot d’Amiens en août dernier, celui où il s’est présenté aux Lyonnais d’une énorme frappe sur la transversale au Parc et donc celui de la confirmation ce dimanche au Groupama Stadium. L’objectif est maintenant de s’imposer comme un vrai titulaire dans le onze lyonnais. Mais au détriment de qui ?
Match à trois
Se pose donc l’équation de comment faire cohabiter Memphis, Aouar et donc Ndombele sans chambouler le reste de l’équipe. Si Memphis a prouvé qu’il pouvait apporter en tant que clutch player, le Néerlandais ne se contentera pas des fins de match. « Bien sûr j’ai de la frustration, déclarait-il dimanche en fin de soirée. C’est normal, je l’accepte. On peut essayer de tout me faire, me sortir de l’équipe, je vais revenir parce que je suis incassable. » Et si Depay arrive à recoller rapidement les morceaux, c’est Houssem Aouar qui risque de faire les frais de sa polyvalence. Moins à l’aise quand il est décalé sur le côté gauche, le Villeurbannais risque à terme de livrer un duel avec Ndombele, où chacun a ses propres arguments. À Houssem la technique soyeuse, à Tanguy la puissance.
Et c’est Tanguy Ndombele lui-même qui tient peut-être la solution pour faire pencher la balance de son côté : « Je dois encore travailler certains points, notamment la finition. Aujourd’hui, tous les relayeurs doivent pouvoir marquer. Je réfléchis un peu trop encore pour le moment avant de frapper. C’est ce qui me fera franchir un cap. » De quoi inciter Bruno Génésio à investir dans un van s’il veut garder tout le monde sous la main. Car entre la Coupe d’Europe, la course pour la seconde place en championnat et les coupes nationales, comme ce soir à Monaco, la route peut encore être longue.
Par Mathieu Rollinger