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Nassuf Siaka : « Personne ne peut esquiver le foot amateur »

Propos recueillis par Matthieu Pécot

À 19 ans, Nassuf Siaka égaye les réseaux sociaux grâce à des vidéos particulièrement drôles qui racontent sa vie. Si le public y trouve son compte, c’est que celui qui bosse avec trois potes (Meziane, Jugurtha et Mathieu) a pris le parti de ne traiter que de sujets qu’il connaît : le quotidien en banlieue, le rap et le football amateur.

Nassuf Siaka : « Personne ne peut esquiver le foot amateur »

Si les choses se passent comme elles doivent se passer, Nassuf Siaka raflera un César dans les années qui viennent. En attendant, l’étudiant en première année de bachelor marketing digital aiguise ses armes de comédien et de réalisateur en abreuvant les réseaux sociaux de vidéos qui visent toujours juste. À côté de ça, le garçon originaire d’Athis-Mons (Essonne) organise des tournois de foot pour les jeunes de sa ville : « Ça s’appelle la 3F League parce qu’on vient du quartier des 3F. J’aime bien faire ça pour les plus petits parce que c’est eux qui ont le plus besoin d’accompagnement. J’aime trop les petits de mon quartier ! » C’est donc un comédien/réalisateur/éducateur qui débarque dans les bureaux de So Foot, avec un joli survêtement du Borussia Dortmund et un premier aveu : « J’ai mis l’ensemble de Dortmund parce qu’il est beau, mais je n’ai rien à voir avec Dortmund. Je suis barcelonais à 100%. »

 


Tu parodies surtout le foot amateur. Pourquoi ?

Je ne peux pas imiter un coach pro pour la simple et bonne raison que je n’en fréquente pas. Je ne sais pas comment ils fonctionnent ! Dans mes vidéos, je m’inspire de ma vie. Ça me paraît donc plus évident d’imiter les coachs que j’ai croisés. Je me sens plus crédible. Ça me permet d’être plus à l’aise dans le rôle, et le public s’y retrouvera forcément plus facilement. Et puis tout simplement, le foot amateur, ça me fait trop rire ! Il y a trop de choses à dire. On a tous joué au foot, on a tous eu les mêmes coachs, même les pros sont passés par là. Personne ne peut esquiver le foot amateur.

 

Il y a une seule vidéo où tu caricatures un pro qui est suivi par une équipe télé dans son quartier…

J’ai remarqué que dans les reportages de foot, dès qu’il y a un jeune de banlieue qui perce, il a le même discours que les autres. Allez, ils n’ont pas exactement tous le même discours, mais disons que ça se ressemble beaucoup. Je me suis inspiré de Ballon sur bitume sur Yard et des interviews d’Assane Thiam sur Vista. J’apprécie beaucoup ce qu’il fait.

Ça t’embête que les joueurs aient souvent le même discours face aux caméras ?

Non, je constate juste que c’est le cas. Il n’y a pas de jugement, ça me fait juste rire de les voir dire les mêmes phrases. Après, chacun s’exprime comme il l’entend. S’ils disent tous les mêmes choses, c’est peut-être parce qu’ils ont tout simplement vécu les mêmes choses et qu’on leur a conseillé de communiquer de cette manière. Mais ça ne vaut pas que pour les footballeurs. Quand je parodie les conversations de quartier, ce qui fait que beaucoup de gens se reconnaissent, c’est qu’on se rend compte que c’est partout pareil. Ce qui se passe en bas de chez moi, ça se passe aussi en bas de chez lui, lui et lui. On retrouve les mêmes phrases, les mêmes comportements, les mêmes caractères. C’est réel et c’est ça qui fait rire. En fait, quand on fait nos vidéos, on n’essaye même pas de faire rire. On essaye juste d’imiter des scènes qu’on a vues. On rejoue nos vies.

 

As-tu eu des retours de joueurs pros sur ton travail ?

Yacine Adli et Mamadou Sakho ont donné de la force. Le bouche-à-oreille a un peu fonctionné. Il paraît qu’il y a énormément de joueurs de Ligue 1 qui parlent de mes vidéos, au PSG et au Stade rennais notamment. On m’a dit que Zaïre-Emery aimait mes vidéos ! Je suis content parce que si les joueurs valident, ça veut dire que les vidéos sont crédibles. Pour l’instant, on ne se prend pas la tête, on prend vraiment du plaisir à faire ce qu’on fait. C’est juste une passion. On ne veut pas devenir des stars. On va encore à l’école !

On m’a dit que Zaïre-Emery aimait mes vidéos ! Je suis content parce que si les joueurs valident, ça veut dire que les vidéos sont crédibles.

Quel est ton parcours de footballeur ?

J’ai commencé le foot en U11 à Morangis, je courais partout, j’étais plutôt attaquant, je marquais pas mal de buts, mais tactiquement, ce n’était pas très structuré. En U12, j’ai rencontré un coach qui m’a vraiment appris le football, les placements, tout ça. Il m’a mis milieu de terrain et m’a appris à jouer avec mon cerveau. Ensuite, j’ai été pris au CFFP (Centre de formation de football de Paris, NDLR). Dès que je suis arrivé, j’ai perdu mes moyens. J’avais le trac, du mal à m’adapter, je ratais toutes mes passes. J’ai fini par me ressaisir, un entraîneur m’a redonné confiance, je suis passé de l’équipe 3 à l’équipe 1, je réussissais mes dribbles, je mettais des adversaires à terre. Je suis resté trois ans là-bas. Même à ce niveau, ça représente déjà des sacrifices. J’ai dû changer d’école parce que j’étais en sport études, je me réveillais à 5h du matin. Je regardais beaucoup de tutos sur YouTube pour progresser. Dans ma promotion, il y avait Samy Mahour, qui est passé par La Gantoise et qui joue aujourd’hui dans l’équipe réserve du Paris FC.

Qu’est-ce qui t’a empêché de franchir l’étape d’après ?

En U15, j’ai eu des petits problèmes de comportement à l’école qui m’ont pénalisé. J’ai joué zéro match officiel. Le coach était plus exigeant que mes anciens entraîneurs, je suis arrivé à la reprise de l’entraînement en septembre, après tous les autres, parce que j’étais en vacances… Le coach m’a dit que ma séance était nulle, c’était le début de la fin.

Le foot amateur, ça me fait trop rire ! Il y a trop de choses à dire. On a tous joué au foot, on a tous eu les mêmes coachs, même les pros sont passés par là.

C’est le genre de scène qui a pu nourrir tes personnages par la suite ?

Oui mais à l’époque, je le vivais simplement comme un joueur qui se faisait engueuler par son entraîneur. C’est vrai que par la suite, ça m’a forcément inspiré. J’ai aussi moi-même été coach. J’étais entraîneur adjoint des U13 de l’US Villejuif. J’avais 17 ans. Mais c’est dur d’être crédible quand tu as presque l’âge des joueurs que tu entraînes.

Peux-tu nous parler de Tyler McAllister ?

C’est un personnage qu’on a créé en se disant que tous les films de foot avaient le même scénario. En gros : l’équipe perd, il y a un mec qui sort de nulle part, il ne s’est jamais entraîné, il n’a pas de licence, rien, il arrive : « Bonjour, c’est moi qui vais sauver la situation. » Le coach ne le croit pas, il le met quand même sur le banc. Les gens au bord du terrain lui disent : « Fais-le jouer, fais-le jouer ! » Finalement, on lui donne un maillot, il dribble tout le monde et sauve le club.

Quel est ton premier souvenir de foot ?

J’avais 7 ans, il y avait Barcelone-Manchester en finale de la Ligue des champions 2011. Mon père regardait le match. Je rentre dans le salon, je vois Messi à la télé dribbler un joueur, un deuxième, puis il marque. Mon daron supportait le Barça, il a sauté de joie ! À partir de ce moment-là, dès que je voyais le Barça à la télé, j’avais envie de regarder. À l’origine, j’étais un fou de football, mais aujourd’hui, mon rapport a changé. Je regarde beaucoup moins de matchs qu’avant. En vrai aujourd’hui, je préfère clairement pratiquer que regarder. Je fais du futsal dans ma cité.

Comment en es-tu arrivé à la réalisation ?

Quand j’étais au collège, à mes heures perdues, j’ai créé une chaîne YouTube qui s’appelait Le Vrai Football. Sur cette chaîne, je faisais des tutos avec des diaporamas et des sous-titres. C’était très premier degré : Comment percer dans le foot ? Comment signer ? La nutrition, la préparation physique, je proposais des exercices… J’avais 15 000 abonnés, certaines vidéos ont atteint les 100 000 vues. Personne ne savait que c’était moi. J’avais 14 ans, je me bourrais de vidéos et de livres sur tous les aspects du foot. Ça a commencé comme ça : du montage sur l’ordi de la maison. Après, en 3e, j’ai décroché. Puis en terminale, grand retour. Un pote voulait faire un clip de rap, j’ai acheté une caméra.

Comment as-tu été casté pour Suprêmes, le biopic sur NTM sorti en 2021 ?

C’est grâce au foot que j’ai joué dans Suprêmes ! J’allais au gymnase pour regarder un tournoi. J’avais 16 ans, et le tournoi était réservé aux adultes, alors j’étais au bord du terrain. Un ancien du quartier m’a dit qu’il y avait peut-être quelque chose à faire avec moi parce que j’avais la même tête que le petit frère de JoeyStarr. C’est un mec qui est branché cinéma, il a une association qui fait de l’initiation au cinéma. J’ai donné mon numéro et j’ai été contacté par le directeur de casting. C’est un hasard. Si je n’étais pas allé au gymnase ce jour-là, il n’y aurait jamais eu tout ça. Cette expérience m’a fait comprendre que je voulais faire ma vie dans l’audiovisuel, le cinéma. Un mois après le tournage, j’ai acheté ma caméra. Les tournages, c’est trop bien. Je continue de réaliser des clips, mais je préfère être devant la caméra que derrière.

Si tu avais le pouvoir de faire jouer n’importe quel joueur dans une de tes vidéos, tu choisirais qui ?

Messi ! S’il joue mal la comédie, pas grave. Pour casser le délire, je ne lui ferais pas toucher le ballon. Il va s’asseoir sur un banc au quartier, et je lui raconterais mes bêtises. Faut que je me dépêche de le contacter pendant qu’il est encore à Paris. Au pire, j’irai le chercher à Barcelone.

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Propos recueillis par Matthieu Pécot

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