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Nantes-Toulouse 2021 : un barrage, deux vainqueurs
Adversaires en finale de la Coupe de France, samedi, Nantes et Toulouse s’étaient affrontés en barrage en mai 2021. Les Canaris s’étaient sauvés d’extrême justesse (2-1, 0-1) et ont indéniablement tiré bénéfice de ce rendez-vous couperet. On peut en dire autant des Violets.
Samedi soir, c’est sur la plus belle des scènes qu’ils auront rendez-vous. Mais il y a deux ans à peine, fin mai 2021, Nantes et Toulouse se sont livrés à une tout autre bataille. Loin des projecteurs de Saint-Denis, loin du strass et des paillettes d’une finale de Coupe de France, les deux clubs ont joué leur avenir à court terme lors d’un sombre et angoissant barrage Ligue 1-Ligue 2. À l’agonie pendant la majeure partie de la saison 2020-2021, les Canaris pensaient avoir fait le plus dur en s’imposant à l’aller au Stadium (1-2). Rattrapés par leurs vieux démons, ils avaient toutefois tremblé jusqu’au bout à La Beaujoire et n’avaient dû leur salut qu’à la règle du but à l’extérieur (0-1). À l’immense soulagement nantais faisait face la détresse toulousaine. Celle-ci était agrémentée d’un sentiment d’injustice, Benoît Bastien ayant décidé de ne pas accorder de penalty aux visiteurs, alors que Charles Traoré avait touché le ballon de la main dans sa surface (80e). « Vous nous avez volé la montée ! », s’était insurgé Damien Comolli, le président toulousain, fou de rage envers le corps arbitral. Le temps a passé et, à y regarder de plus près, on constate désormais que ce barrage a été bénéfique pour les deux clubs concernés.
🗨️ "Vous nous avez volé la montée !"
Énorme colère du président du TFC envers le corps arbitral après #FCNTFC 🗣️ pic.twitter.com/AuW9hnNN08
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Kombouaré, légitimité renforcée
Du côté du FCN, ce maintien arraché dans la douleur a eu le mérite d’asseoir la légitimité d’un homme : Antoine Kombouaré. Arrivé sur les bords de l’Erdre en février 2021 pour remplacer Raymond Domenech, l’ancien pensionnaire de la Jonelière a dû composer avec une situation sportive calamiteuse (le club était 18e après une série de quinze matchs sans victoire en championnat), le tout dans un contexte très pesant, sur fond de vives tensions entre la direction et les supporters nantais. « Honnêtement, si j’avais écouté beaucoup de mes proches, je ne serais pas venu, avait réagi le Kanak à l’issue du barrage retour. C’était un choix de cœur, mon club à qui je devais tout. C’était un pari fou, et c’est un petit miracle. J’aurais très mal vécu si j’avais amené ce club en Ligue 2, ça aurait été atroce. »
🗨️ "J’avais jamais ressenti ça"
Énorme émotion pour Antoine Kombouaré : Nantes sera bien en Ligue 1 la saison prochaine ! 🙏 #FCNTFC pic.twitter.com/Men1IZd3cv
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En cas d’échec, le technicien désormais âgé de 59 ans n’aurait sans doute pas poursuivi l’aventure. De très nombreux Canaris seraient partis voler ailleurs de leurs propres ailes, Waldemar Kita aurait encore davantage suscité rancœur et colère et l’on ose à peine imaginer l’état dans lequel le club aux huit titres de champion de France aurait abordé la saison suivante en Ligue 2. Au lieu de cela, Kombouaré est sorti renforcé de cette opération maintien, posant des limites nettes à l’interventionnisme souvent envahissant des Kita, père et fils. Avec un effectif quasiment inchangé et une colonne vertébrale fiable (Lafont-Pallois-Blas-Kolo Muani), sa formation a surfé sur une dynamique bien plus positive tout au long de l’exercice 2021-2022, qui s’est conclu par une neuvième place en Ligue 1 et, surtout, une victoire en Coupe de France. Si Nantes a retrouvé l’Europe, deux décennies après l’avoir quittée, c’est donc en grande partie grâce à ce barrage remporté de haute lutte.
À Toulouse, un an de plus pour consolider le projet
En Haute-Garonne, ce même barrage au dénouement cruel aurait pu représenter un gros coup d’arrêt dans la stratégie du nouveau propriétaire du Toulouse FC, le fonds d’investissement américain RedBird Capital Partners. En réalité, il a été une étape majeure, un moment clé pour forger le caractère et l’identité du groupe. « Il faut vivre avec la mort sportive, comme celle que l’on a connue à Nantes en fin de saison dernière, avait imagé Damien Comolli dans un entretien accordé à So Foot, en mars 2022. Après le match, on est morts, l’équipe est morte, l’entraîneur est mort, j’étais mort, mais il faut un matelas pour pouvoir rebondir. Quand vous définissez les valeurs, vous vivez et vous mourez avec. » Cet échec a été levier de motivation supplémentaire, aussi, pour repartir en quête de montée, comme l’a illustré la vidéo publiée par le TFC une fois son retour dans l’élite devenu certain.
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Attention, il ne s’agit pas de dire que le club de la Ville rose serait allé droit au carton en remontant en Ligue 1 une année seulement après sa relégation. En revanche, on peut aisément considérer que ce rab forcé de Ligue 2 lui a permis de peaufiner sa copie, de consolider son projet. Sur le banc, Philippe Montanier a remplacé Patrice Garande, qui ne faisait plus l’unanimité en interne. Son 4-3-3 a rapidement dégagé une plus grande impression de force collective que le 3-5-2 qui l’avait précédé, résolument porté vers l’avant certes, mais à l’équilibre fragile et dépendant des coups d’éclat d’Amine Adli. Si le Pitchoun a filé au Bayer, Branco van den Boomen, lui, a profité de cette deuxième saison dans l’antichambre de l’élite pour définitivement quitter le banc des remplaçants, récupérer les clés du camion et donner la pleine mesure de son talent. Résultat : au terme d’un parcours royal, les Violets ont logiquement été sacrés champions de Ligue 2, accédant à l’étage supérieur avec davantage de certitudes dans leur jeu et dans leur collectif que s’ils étaient montés un an plus tôt. Enfin, et ce n’est pas le plus anecdotique, les Toulousains ont atteint leurs objectifs dans un Stadium copieusement garni, signe d’un engouement populaire retrouvé, ce qui est tout de même plus appréciable pour tisser des liens qu’au temps des restrictions sanitaires et de ses sinistres huis clos. Pour toutes ces raisons, le TFC est donc, d’une certaine manière, lui aussi sorti vainqueur de ce fameux barrage du printemps 2021. Reste à savoir jusqu’où sa dynamique le portera.
Par Raphaël Brosse