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El Haddaoui : « Le Maroc a l’équipe pour aller au bout »
Le Maroc n’a plus gagné la CAN depuis 1976. Pour entretenir l’espoir de conquérir un 2e titre, il devra battre l’Afrique du Sud, ce mardi soir. Un objectif atteignable selon Mustapha El Haddaoui, dit « Mus la Foudre », ancien milieu des Lions de l’Atlas (55 sélections), actuel président de l'Union marocaine des footballeurs professionnels (UMFP), et accessoirement un des plus beaux pieds droits du foot africain.
Pour un favori, le Maroc a plutôt bien tenu son rang au premier tour…
Oui. Il a commencé par un succès net et logique contre la Tanzanie (3-0), en affichant une bonne maîtrise. En revanche, le second match fut plus compliqué face à la RD Congo (1-1). L’équipe avait bien débuté et ouvert le score, mais les joueurs ont été gênés par la chaleur et l’humidité. Les joueurs des deux sélections ont souffert, cela se voyait. Un match à 14 heures dans ces conditions, c’est dur… Lors du dernier match contre la Zambie (1-0), les Lions de l’Atlas ont globalement bien géré, avec un onze de départ un peu remanié.
Mardi soir, les Marocains vont affronter l’Afrique du Sud. Quelle impression vous a fait cette sélection ?
Celle d’une équipe complète. Elle est capable de faire le jeu, car elle a des joueurs à l’aise avec le ballon, vifs, techniques, avec Percy Tau, notamment, un attaquant usant pour les défenses adverses. Mais elle sait aussi pourrir le jeu quand c’est nécessaire. On voit que plusieurs internationaux sud-africains évoluent dans le même club, celui de Mamelodi Sundowns. Ils ont l’habitude de jouer ensemble, ils se connaissent parfaitement. L’Afrique du Sud possède également un atout : la sélection est composée à 80 ou 90 % de joueurs qui évoluent dans le championnat local, et qui sont donc habitués à disputer des matchs de Ligue des champions ou de Coupe de la CAF un peu partout en Afrique. La chaleur, l’humidité, ils connaissent, ce qui n’est pas le cas pour des binationaux, qui ont plus de difficultés à se faire à ces conditions.
L’Afrique du Sud est la dernière équipe à avoir battu le Maroc, en juin dernier, lors des qualifications pour la CAN (2-1). Est-ce que cela vous rend encore plus méfiant ?
Le Maroc avait perdu ce match alors qu’il était déjà qualifié, mais oui, il faut en tenir compte. Mardi soir, ce sera un match à élimination directe. Moi, je m’attends à un match ouvert, avec des occasions et des buts. Le Maroc et l’Afrique du Sud sont quand même des équipes qui aiment attaquer. De toute manière, le Maroc attend de remporter une CAN depuis 1976. Alors, il faudra battre les Sud-Africains, puis le Cap-Vert, puis d’autres si on veut aller au bout.
Les Lions de l’Atlas, avec l’élimination du Sénégal par la Côte d’Ivoire, vont être désignés comme les favoris de cette CAN, ce qu’ils sont depuis la Coupe du monde 2022, où ils avaient terminé à la quatrième place…
Le Maroc est la meilleure équipe d’Afrique au classement FIFA. Qu’il soit favori est logique. Mais moi, ce qui m’intéresse, c’est aussi de constater que cette équipe n’a pas qu’un seul plan de jeu. Au Qatar, elle évoluait en contre. C’était assez logique, dans la mesure où elle avait affronté la Belgique, la Croatie, l’Espagne, le Portugal et la France, des équipes qui ont l’habitude d’avoir la possession. Mais lors de la CAN, c’est elle qui a eu la maîtrise du jeu au premier tour, même si c’était assez équilibré face à la RD Congo, tout en se montrant solide derrière, avec un seul but encaissé. Le joueur marocain aime avoir le ballon, il a des qualités techniques. Vous imaginez le Maroc jouer en contre face à la Tanzanie ou la Zambie ? La Coupe du monde et la CAN sont deux compétitions qui n’ont presque rien à voir. Et une des forces de cette sélection, c’est d’avoir été capable de présenter un système qui a très bien fonctionné au Qatar et un autre qui, jusqu’à maintenant, donne des résultats en Côte d’Ivoire. Cela prouve que Walid Regragui, le sélectionneur, est un très bon tacticien.
Si le Maroc a des résultats, il le doit à ses cadres, mais pas seulement…
Depuis le début de la CAN, ils sont là : Bounou, Saïss, Aguerd – qui est pour moi le meilleur Marocain de cette CAN –, En-Nesyri, Ziyech, Ounahi, etc. Mais le Maroc a aussi l’avantage d’avoir un vrai banc de touche. Pour aller loin dans une compétition, c’est important, car plus tu avances, plus les organismes fatiguent, il y a le risque de blessures, etc. Les mecs ont également l’état d’esprit qu’il faut. Quand tu vois Ziyech faire de gros efforts défensifs, c’est positif. J’espère qu’il sera là (le joueur de Galatasaray Istanbul est incertain, NDLR), car on a perdu définitivement Boufal.
Quelles sont les faiblesses de cette équipe ?
Elle peut faire mieux dans la finition. Ok, elle a inscrit cinq buts lors du premier tour, ce qui n’est pas si mal, mais quand je repense notamment aux matchs contre la RDC et la Zambie, elle aurait pu marquer davantage. C’est ce petit problème de réalisme qui a empêché le Maroc de battre les Congolais. Sur certaines phases, comme les centres, elle peut s’améliorer.
Comment les Marocains vivent-ils cette CAN ?
Il y a beaucoup d’engouement, des fan-zones un peu partout. Et vous avez pu constater qu’il y a beaucoup de supporters marocains en Côte d’Ivoire. Il y a beaucoup de messages positifs envoyés au staff et aux joueurs, et je crois qu’ils y sont sensibles et que c’est important pour eux. Le Maroc n’a plus gagné la CAN depuis 1976 en Éthiopie. Une éternité, des millions de Marocains n’étaient pas nés ou étaient trop jeunes à l’époque pour s’en souvenir. Ce n’est pas la première fois que le Maroc est favori d’une CAN et qu’il ne va pas au bout. Cette année, on a l’équipe pour le faire. Mais commençons d’abord par éliminer l’Afrique du Sud…
Propos recueillis par Alexis Billebault