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Mourinho, entre marathon et histoire
Alors que Manchester United a l'occasion de soulever son premier trophée de la saison dimanche face à Southampton en finale de la League Cup, José Mourinho doit faire face à un calendrier brutal et chargé. La rédemption de MU est à ce prix.
Pour lui, ce chapitre a commencé comme ça. Cardiff, une après-midi de fin février, en 2005. Dix mois après son arrivée à Chelsea, onze après sa Ligue des champions soulevée avec le FC Porto, José Mourinho joue alors sa première représentation majeure dans son nouveau costume d’entraîneur des Blues. C’est le jour où il doit prouver qu’il peut gagner, vite, et que son équipe a au moins le même caractère que lui. L’enfant de Setúbal s’est toujours nourri d’une chose plus que du reste : le bruit. Est-il un acteur avide de reconnaissance ou simplement un homme incapable de contrôler ses émotions ? Vaste débat. Ce qui est certain, c’est qu’à cette époque, Mourinho n’est qu’aux prémices de la valse des sentiments qu’il va ensuite engendrer tout au long de sa carrière d’entraîneur. Un peu plus d’un an plus tôt, sa silhouette s’est imposée à la gueule de l’Europe lors d’une course iconique derrière la ligne blanche d’Old Trafford, un soir où il expliquera plus de dix ans plus tard avoir « découvert l’enfer » . Ou plus simplement le haut niveau. Ce qu’il sait avant tout ce 27 février 2005, c’est qu’il ne sait rien. Il pense savoir. Savoir comment gérer une prestation scénique devant 78 000 personnes, savoir comment agir et savoir comment gérer la pression. Face à lui, le Liverpool de Rafael Benítez, autre homme qui doit prouver moins de quelques mois après un titre européen gratté avec Valence. Le miracle d’Istanbul est encore loin, très loin.
Alors, une finale de League Cup est l’occasion, pour les deux hommes, d’écrire les premières lignes de leurs histoires anglaises respectives. Reste qu’il faut un vainqueur à chaque bataille. Cette fois, ce sera José Mourinho. Le premier trophée de son chapitre anglais. Mais ce que retiendra l’histoire est ailleurs, car le technicien portugais ne verra pas le final, expulsé à dix minutes de la fin du temps réglementaire pour avoir mis son doigt devant la bouche sur l’égalisation des Blues sur un but contre son camp de Steven Gerrard. Douze ans après, le voilà prêt à définitivement lancer le chapitre Manchester United avec une première médaille autour du cou.
L’égoïsme et le nouveau monde
Tout a changé dans la tête de José Mourinho depuis le 27 février 2005. Au point de partir en autocritique cette semaine face à la presse : « Plus tôt dans ma carrière, j’étais avant tout concentré sur le fait de faire des choses pour moi-même. Maintenant, je suis plus un homme de club. » Certaines choses font du bien à entendre. Et le Mourinho des derniers mois va bien dans ce sens : moins autocentré, essentiellement tourné vers la reconstruction de l’institution Manchester United. Comme si le Portugais s’était assagi. Bien sûr, parfois, il y a quelques relents et ça en serait presque rassurant. Cette finale de League Cup contre Southampton à Wembley dimanche était donc l’occasion pour lui de faire le point sur les premiers mois de son mandat. « La saison a commencé avec pas mal d’égoïsme. Certaines personnes voulaient de nouveaux contrats ou partir. Maintenant, c’est réglé et on a créé notre monde. » Un monde où Manchester United n’a perdu qu’une fois toutes compétitions confondues depuis le 3 novembre dernier, est encore en course sur tous les tableaux et semble se préparer doucement à pouvoir lutter avec autorité pour le titre de champion la saison prochaine. Ce qui était recherché depuis le départ de Sir Alex Ferguson est progressivement revenu : du caractère, du style et une part de cynisme. Une vision partagée par Ander Herrera, chien fou essentiel au système Mourinho, cette semaine : « On veut gagner chaque trophée, car on veut respecter notre histoire et nos supporters. Ce club, c’est une histoire de titres, donc on ne sélectionnera aucune compétition, on ira pour toutes les gagner. On sait que ce n’est pas simple, mais on va essayer.(…)Chaque personne qui regarde nos matchs réalise rapidement qu’une grande équipe est en train de jouer, car on contrôle tous nos matchs ou du moins la plupart. Face à Blackburn (2-1, en FA Cup), lorsqu’ils ont marqué, on ne s’est pas affolés, on a continué à jouer, à faire tourner le ballon et on s’est imposé. Ce n’est pas impossible de nous battre, mais c’est devenu difficile. » Oui, Manchester United revit.
Baston de calendrier
Mais cela a aussi du moins bon, ce que sait José Mourinho. Car cette saison, Manchester United a déjà disputé 42 matchs toutes compétitions confondues. Un rude marathon pour les organismes et le mental, même si la majorité des membres du groupe vit pour l’adversité, la compétition. À Saint-Étienne mercredi (1-0), Mourinho a été obligé de faire sortir Henrikh Mkhitaryan – blessé et forfait ce dimanche – et Michael Carrick, finalement apte pour le match contre Southampton. Une saison réussie se joue à la régularité, mais aussi aux blessures. La gestion de l’effectif de Manchester United par Mourinho pourrait alors se poser dans les prochaines semaines quand on sait que le club disputera un quart de finale de FA Cup, contre Chelsea, un lundi, soit à trois jours du huitième de finale retour de Ligue Europa contre Rostov. « Le truc, c’est que je ne peux pas jouer contre Chelsea avec une équipe B, je ne peux pas jouer Chelsea avec les U21 comme l’avait fait City l’an dernier. Je ne peux pas faire ça en tant qu’entraîneur de Manchester United. Je dois traiter les supporters avec respect, le club avec respect et la FA Cup avec respect » , a expliqué le Portugais en conférence de presse. D’ici la fin de saison, Manchester United a encore un minimum de 17 matchs à jouer en un peu moins de trois mois, sachant que le club est encore en course pour une éventuelle quatrième place en championnat. Le marathon continue, José Mourinho, lui, a un début d’histoire à écrire. Avec une médaille.
Par Maxime Brigand