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Morientes-Élber, stars des Monaco-Lyon d’hier
Il y a quatorze ans, Fernando Morientes et Giovane Élber brillaient l'un face à l'autre lors d'un Monaco-Lyon en Coupe de France. Retour sur un double transfert improbable, symbole d'une courte, mais intense rivalité entre l'OL et l'ASM.
Ronaldinho et Márquez en route pour la Catalogne, Gallardo renvoyé en Argentine, Pauleta qui débarque dans la capitale, Drogba à l’OM, Essien et Malouda à l’OL… L’été 2003 aura été un carrefour de légendes d’ici et d’ailleurs. Parmi ces multiples mouvements qui nourriront de grands destins des années 2000, deux concluront avec panache un mercato de Ligue 1 drôlement agité : ceux d’Élber et Morientes, poussés dehors par le Bayern Munich et le Real Madrid.
À l’origine, il y a Shabani Nonda
Il faut savoir se dire au revoir dans la vie. Sonny Anderson, pierre angulaire du Lyon qui gagne, a su faire ses adieux comme un champion sur un titre acquis après une lutte acharnée avec le club du Rocher, sur lequel il a également laissé de grands souvenirs. Il faut savoir trouver à qui souhaiter la bienvenue aussi. Durant l’été 2003, le président lyonnais a toutes les peines du monde à attirer un nom qui puisse adoucir l’impact du départ de l’idole. En malin pilleur ou en gentil sauveur, il jette son dévolu sur Shabani Nonda, attaquant de l’AS Monaco et meilleur buteur de la Ligue 1 édition 2002-2003. Le club de la Principauté est alors au bord du gouffre, accusant un déficit de plus de cinquante millions d’euros. Son recrutement est encadré par la DNCG qui l’a même un temps relégué administrativement en seconde division. Alors, Jean-Louis Campora, président de l’ASM, et Jean-Michel Aulas, à la fois vieux ennemis et bons copains, concluent un deal en catimini : le buteur congolais sera lyonnais pour quinze millions d’euros. De quoi assainir quelque peu la situation du club monégasque, réaffirmer le pouvoir du Docteur Campora et satisfaire la soif offensive de l’OL.
C’est fait, Aulas l’affirme même fièrement dans L’Équipe : « C’est un joli coup, non ? Paul Le Guen le voulait absolument. C’était sa priorité. Il considère que c’est peut-être le meilleur attaquant jouant en Europe. » Sauf qu’en 2003, l’avis des joueurs compte et que Nonda refuse d’aller à Lyon. Ce qui constituera l’acte essentiel du pacte fondateur de la bande à Deschamps : tous rester pour jouer ensemble la Ligue des champions. Désaveu pour Campora, vexation pour Aulas. Le premier, échouant qui plus est dans sa quête d’un investisseur fiable, est prié par le Palais de mettre un terme à vingt-huit ans d’histoire. Deux mois plus tard, le 24 août, alors qu’il a démarré la saison en fanfare, Nonda se blesse gravement au Parc des Princes. Lyon est en quête d’un roi des surfaces, Monaco aussi.
L’inversion des pole positions
L’ASM, pauvre de sa gestion catastrophique, mais riche de sa fiscalité – sujet alors martelé par Aulas – n’hésite pas à toquer à la porte des grands clubs du continent pour attirer un cador. Les dirigeants monégasques font le forcing pour Giovane Élber, meilleur buteur de la Bundesliga, mais prié de laisser sa place à Roy Makaay. Après avoir multiplié les pistes durant tout l’été, les dirigeants lyonnais sont, eux, à deux doigts de conclure l’arrivée de Fernando Morientes pour dix millions d’euros. Mais les décideurs rhodaniens font volte-face et réchauffent aussi la piste Élber, trop heureux de faire la nique à leur dauphin après avoir échoué à doubler le PSG et l’OM dans les dossiers Pauleta et Drogba. Pierre Svara, novice successeur de Campora, et Jeannot Werth, agent influent, sont déjà à Munich pour finaliser l’affaire, mais le Bayern profite de l’intérêt lyonnais pour faire monter les enchères.
Tergiversation sur le Rocher où c’est le bazar en coulisses. Monaco a besoin d’un grand attaquant, mais n’a pas d’argent. Aulas mandate Cláudio Caçapa pour persuader Élber de rejoindre le clan des Brésiliens à Lyon. Mission accomplie : il pose ses valises à Gerland pour moins de cinq millions d’euros et confirme le twist dans France Football : « Disons que, dans ce match, Monaco a mené pendant 88 minutes, avant que Lyon ne marque le but décisif dans les derniers instants. Le plus grand professionnalisme de Lyon a fait la différence. Sagnol et Lizarazu me conseillaient plutôt d’aller à Monaco. Mais, quand j’ai choisi Lyon, ils m’ont dit que j’arrivais dans le Bayern français ! »
Deschamps s’agace, le temps passe. Mais, à quelques heures du gong, Monaco parvient à convaincre le Real Madrid de lui céder Morientes en prêt avec prise en charge partielle du salaire. La Ligue 1 a ses deux stars à prix discount. Curieusement, elles ne brilleront que modérément en championnat avec dix buts chacune, mais l’Espagnol, en bon Madrilène, avait des desseins plus étoilés. Ses habitudes larger than life, son bolide rouge cerise et ses pots de caviar achetés par dizaines mêlés à sa classe aussi grande que son humilité laisseront une empreinte indélébile sur le Rocher. Tandis qu’Élber n’aura jamais su marcher sur les traces de Sonny Anderson. Presque un an jour pour jour après son arrivée, sa jambe droite se brisera et son histoire sur les bords du Rhône avec. Sans doute un hommage maladroit à Shabani Nonda.
La Ligue 1, une saison déjà pliée ?Par Chris Diamantaire