D’où t’est venue cette idée ?
C’est un pari avec mes potes havrais. Et puis j’avais bien picolé aussi. En fait, il y a une amitié entre les supporters de Metz et ceux du Havre. Ça faisait trois jours que quatre ou cinq Havrais dormaient chez moi et le jour du match, on a commencé à boire à 10 h 30. Le soir, du coup, je suis allé dans la tribune des visiteurs pour voir le match avec les Barbarians du Havre. Ils me chauffaient pour que je fasse quelque chose. Je suis allé voir les flics qui étaient à côté en leur disant : « Je vais envahir, vous allez voir » et ils ne me croyaient pas. J’ai laissé mon téléphone et mon portefeuille à un ami et me suis lancé. Attention, je l’ai fait pendant la mi-temps parce que je ne voulais pas du tout perturber le match. C’était vraiment festif. Si ça avait été pour foutre la merde, je l’aurais fait pendant la remise de trophée ou le feu d’artifice. Et puis je n’ai pas incité la foule à envahir le terrain ou quoi que ce soit. Non, c’était juste une pulsion. Rien de méchant.
Le but, c’était quoi ?
Rejoindre le kop de Metz derrière l’autre but. Je devais traverser le terrain dans la longueur. Je suis arrivé quasiment à l’autre surface, j’ai dû faire quelque chose comme 70 mètres quand même !
C’est une histoire d’adrénaline ?
Bof… J’avais 1,90 gramme quand j’ai soufflé dans le bordel chez les flics. Et pour arriver de l’autre côté du terrain, je n’ai eu à éviter personne. Après, je me fais prendre de biais. Mais avant ça, quand je descends de la tribune, déjà, je me ramasse bien sur le sol et ça ne fait réagir aucun stadier. Si j’avais réussi à atteindre l’autre tribune, je n’aurais pas eu de problème, je me serais fondu dans la masse et personne ne serait venu me chercher, c’est certain. Après, je dois reconnaître que c’était marrant d’entendre le public m’encourager. Plus je me rapprochais de la tribune ouest, plus les gens criaient. Ils étaient dégoûtés que je me fasse plaquer. À ce moment-là, j’étais mort de rire, y compris quand les mecs de la sécurité me tenaient.
Le plaquage est assez violent. Tu as eu mal ?
Non, le plaquage, ça va encore. En revanche, un stadier m’a tenu et m’a mis des droites jusqu’à ce que les flics arrivent. En fait, je lui avais mis une patate il y a quelques années et il a voulu se venger. C’est mon destin.
Redoutes-tu les conséquences que peuvent avoir ce petit coup de folie ?
J’ai rendez-vous mardi prochain (aujourd’hui, ndlr) avec le directeur de la sécurité du FC Metz, c’est un salarié du club. On se voit pour arranger les choses. Apparemment, la Ligue a demandé au FC Metz de porter plainte contre moi, mais le club ne veut pas le faire parce que les gens d’ici me connaissent depuis l’époque où j’étais capo. Mais si le club porte plainte, moi-même je porte plainte pour coups et blessures. Le gars m’a étranglé et mis des patates et il n’a pas à faire ça. J’ai 28 ans, je viens au stade depuis que j’ai 4 ans. J’ai été très actif dans les tribunes de 2002 à 2010. Je ne voulais en aucun cas nuire au FC Metz.
À aucun moment tu ne t’es dit que cette course allait mettre fin à ta soirée et que c’était un peu bête ?
J’étais persuadé qu’ils allaient me relâcher, car c’était pour le délire. Mais tout s’est passé tellement vite que les flics m’ont embarqué directement. On a discuté dans la voiture, ils étaient super cool. Ils m’ont dit : « T’aurais dû le faire à poil. » Ça les a bien fait rire, car les flics qui m’ont embarqué sont les mêmes que ceux à qui j’avais annoncé que j’allais courir sur le terrain.
Et la nuit en garde à vue, c’était comment ?
J’en avais déjà fait une il y a quelques années à cause d’usage de fumigènes. J’ai réussi à dormir un peu. Si je n’avais pas été bourré, la police m’aurait interrogé aussitôt et je serais ressorti dans la foulée. Là, il fallait attendre que ça redescende alors l’interrogatoire a eu lieu à 7 h 30. Ça a pris trois minutes car ils ont très bien compris qu’il n’y avait rien de méchant derrière ça. Les flics riaient de bon cœur. Les mecs de la nouvelle brigade qui ont pris le relais le matin m’ont pris en photo avec leur portable, je les avais divertis.
Les amendes et interdictions de stade sont parfois importantes pour les streakers…
À la limite, c’est plus l’interdiction de stade qui me ferait chier. Même si je ne vais plus trop au stade depuis quatre ans et demi et l’ouverture de mon bar… Bon, je sais que je n’irai pas en taule pour ça. Je passe au tribunal le 3 juin, on verra bien.
Si c’était à refaire, tu le referais ?
Non. À jeun, comme ça, non.
Tu as bu avant de venir au match. Si la vente d’alcool avait été autorisée dans les stades en France, penses-tu que tout cela aurait eu lieu ?
Je ne sais pas. Enfin, au lieu de faire ce que j’ai fait, j’aurais sûrement passé ma mi-temps à la buvette. Ça m’aurait évité les emmerdes.
Lyon : à Textor et à travers