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Monza, le nouveau projet berlusconien
Silvio Berlusconi et Adriano Galliani ont racheté le club de Monza, actuellement en troisième division italienne. Alors, c'est quoi le projet ?
Sergio Ramos. Zlatan Ibrahimović. Olivier Giroud. Ezequiel Lavezzi. Arturo Vidal. Kevin-Prince Boateng. Leo Messi. Memphis Depay. Tous ces joueurs ne rejoindront pas le nouveau Monza de Silvio Berlusconi. La raison ? Ils ont des tatouages, une barbe, voire les deux. Et ne sont pas italiens. Et tout ça, pour Silvio, c’est rédhibitoire. « Mon Monza sera une équipe jeune et composée uniquement de joueurs italiens, a-t-il déclaré lors d’un évènement organisé par Forza Italia vendredi dernier. Ils devront avoir les cheveux en ordre, il y a déjà un coiffeur à Monza qui m’a dit qu’il ferait des coupes gratuitement. Pas de barbe, pas de tatouages, et ils ne devront pas non plus porter de boucles d’oreille. Ils s’excuseront auprès de l’adversaire en cas de faute, et traiteront l’arbitre avec respect. Je veux quelque chose de différent du football actuel. » Un discours assez surréaliste en 2018, carrément rétrograde, mais qui paraît logique dans la stratégie de com’ d’un vieux monsieur de 82 ans.
Un cadeau pour Galliani
Forcément, venant de Berlusconi, ces règles archaïques ont de quoi faire sourire. On parle là d’un bonhomme qui a lui-même enfreint à peu près toutes les règles possibles, qui a créé des lois pour contourner ses propres écarts, qui a acheté le vote d’un sénateur, qui a versé des pots-de-vin pour obtenir des faux témoignages (affaire David Mills) et qui a collectionné les affaires de mœurs – pour ne pas utiliser des termes plus sévères (coucou Ruby). Mais bon, malgré tout cela, Silvio conserve une certaine crédibilité dans le monde du football. Il faut dire qu’il demeure le président le plus titré de l’histoire du foot italien, son AC Milan ayant amassé 29 trophées lors de ses 30 années de présidence, de 1986 à 2016.
Con il @SSMonza1912 voglio costruire una squadra di giovani italiani che possano dare un contributo alla prossima nazionale. #Monza #calcio pic.twitter.com/R6ixU3r5kY
— Silvio Berlusconi (@berlusconi) 5 octobre 2018
Alors, une question se pose : pourquoi avoir décidé, à 82 ans, de se replonger dans l’univers du ballon rond, en rachetant un club de troisième division ? L’idée, pour Silvio, est d’une part de continuer à exister médiatiquement. Le leader de Forza Italia est, depuis mai 2018, à nouveau éligible au Conseil à la suite de sa « réhabilitation » par le tribunal de Milan dans l’affaire Mediaset. Il a donc toutes les raisons de multiplier les apparitions publiques et les projets (à l’instar du lancement du Mouvement animaliste, visant à défendre les droits des animaux). D’autre part, ce nouveau projet est un joli cadeau à son bras droit de toujours, Adriano Galliani. En effet, Galliani n’a jamais caché son amour pour Monza, sa ville natale, et Berlu a ainsi trouvé un moyen de le « remercier » pour sa légendaire fidélité. « C’est une opération romantique, un acte d’amour, a affirmé le divin chauve en conférence de presse. Disons que pendant 31 ans, j’ai été en prêt à l’AC Milan, puisque Monza est dans mon ADN. J’espère d’ailleurs pouvoir affronter l’AC Milan pour un derby en 2020. »
Christophe Galtier, faillite et Kaká
Sportivement, à quoi peut-on véritablement s’attendre ? Le Monza Calcio est un club historique en Italie. Fondé il y a plus de cent ans, il a vu passer des joueurs qui ont, plus tard, connu de jolies carrières, notamment à l’AC Milan, son voisin : Christian Abbiati, Maurizio Ganz, Alessandro Costacurta, Massimo Oddo, mais aussi Luigi Di Biagio, Patrice Évra et Pierluigi Casiraghi. Et même Christophe Galtier, tiens. Pourtant, le club brianzolo détient un triste record : avoir disputé le plus de saisons en Serie B (38 participations) sans être jamais parvenu à monter en Serie A. En 2015, le club a même fait faillite, et a dû repartir de Serie D, l’équivalent de la quatrième division. L’occasion de faire table rase et de prendre un nouveau départ avec une nouvelle équipe dirigeante. Après une saison d’adaptation (10e au classement), Monza obtient sa montée en Lega Pro (D3) au terme de l’exercice 2016-2017. Et la saison 2017-2018 a été plus qu’encourageante puisque Monza a terminé quatrième (meilleure défense du tournoi) et s’est incliné en demi-finale de play-offs.
C’est donc une équipe ambitieuse, menée depuis deux ans par l’entraîneur Marco Zaffaroni (ancien joueur de Monza de 2004 à 2008), que Berlusconi et Galliani ont rachetée. Actuellement, Monza est troisième de Lega Pro après cinq journées. L’objectif est évidemment la montée à la fin de saison, dans la continuité du projet lancé il y a trois ans, après la faillite de 2015. « La volonté de remonter en Serie B est énorme, car cela fait trop d’années que nous n’y sommes plus, assurait Fausto Marchetti, leader de la Curva Sud de Monza, au Corriere dello Sport. L’équipe actuelle est déjà prête à lutter pour la montée, elle n’a pratiquement pas changé depuis l’an dernier. Maintenant, nous attendons les coups de Galliani et Berlusconi. » Des coups qui n’auront donc pas de barbe, pas de tatouages, pas de boucle d’oreille. Et voilà que les noms de Gilardino et Kaká, anciens protégés du duo, sont évoqués dans la presse italienne. Être un as de la com’, ça ne s’improvise pas.
Par Éric Maggiori