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Montpellier, club de mal élevés ?
Les punchlines de Loulou, le doigt d’honneur de Girard, les gueulantes d’Estrada ou Jourdren, le coup de coude de Yanga Mbiwa, le poing de Jeunechamp... Cette saison, ce n’est pas sur le terrain que Montpellier fait parler. Entre climat pesant et caractères, explications.
Au soir du 18 novembre, Montpellier vient d’accrocher un nul sur le terrain de Valenciennes (1-1). L’heure est aux interviews d’après-match en zone mixte, et le gardien héraultais Geoffrey Jourdren entretient une discussion plutôt animée avec José Barroso, journaliste de L’Équipe. Cyril Jeunechamp attire alors Barroso hors de la salle de conférence de presse, et le ton monte. Les menaces fusent, un poing aussi. Le journaliste s’en tire avec un nez fracturé. Pourquoi ? Pour avoir écrit un article, un peu plus tôt dans la semaine, décrivant des tensions en coulisses au MHSC. En attendant, le journaliste a porté plainte, et le club condamné le geste de son joueur. Mais il n’est pas le premier à faire des vagues, cette saison. Si, évidemment, la violence de son geste est extrême, son coach et divers coéquipiers ont aussi fait preuve d’un certain manque d’éducation.
Sales résultats et joueurs mécontents
On pourra dire ce que l’on veut sur le geste de Jeunechamp, mais le mec en lui-même n’est pas connu pour être un violent (à deux, trois tacles trop appuyés près). L’explication d’un pétage de plombs se trouve donc, logiquement, dans le contexte actuel du club. Et tout part des résultats : champion de France en titre, Montpellier est actuellement 14e au classement de Ligue 1, avec seulement deux points d’avance sur la zone rouge. Il est aussi éliminé de la Ligue des champions. « Quand il n’y a pas de résultats, on est forcément énervé. C’est une situation plus compliquée que celle que l’on a connu la saison précédente, c’est tout simple » , décrit Nenad Džodić, ancien Pailladin, qui ne voit pas d’autre explication à cette recrudescence d’écarts de comportement. Pourtant, le poing de Jeunechamp est une sorte d’apothéose, quelque part. Avant lui, Yanga Mbiwa avait collé un très vilain coup de coude à Hamouma lors d’un match de championnat face à Saint-Étienne, héritant ainsi de cinq matchs de suspension. Voilà pour la partie physique.
S’inscrivent dans ces écarts (à un degré moindre, bien entendu) les joutes verbales, où Jourdren a été le premier à s’illustrer. Après une défaite face à Évian lors de la 8e journée (2-3), le gardien adresse des reproches en public à coach Girard : « Pourquoi tu changes une équipe qui gagne ? Pourquoi tu fais tout ça ? Il faut se poser les bonnes questions et piquer où ça pique. » Deux semaines après cet épisode (qui avait vu Jourdren être mis de côté pour un match à Rennes), c’est au tour d’Estrada de faire des siennes. Lors d’une séance d’entraînement, le Chilien apprend qu’il ne sera pas titulaire pour un match de Coupe de la Ligue face à Bordeaux. « Ça t’emmerde ? Je t’emmerde » , lui énonce posément Girard. Le milieu jette son maillot à terre et se tire. « Il avait mal à la tête et est allé chercher un cachet d’aspirine » , expliquera le coach à propos de la scène. Ces deux éléments permettaient logiquement, il faut l’avouer, d’évoquer des tensions dans le vestiaire montpelliérain. « Il ne faut pas oublier qu’avec la Ligue des champions, c’est la première fois dans l’histoire du club que l’effectif est aussi important (32 joueurs). Ce qui est plus difficile à gérer pour un entraîneur, avec les déceptions de certains… Je pense que ce n’est pas étranger aux tensions qu’il y a pu avoir » , éclaire Richard Gougis, responsable du service des sports au Midi Libre. Mais pour compléter le tableau, le coach et le président ne font pas non plus dans la discrétion.
Aussi quelque chose dans les gênes
Si on peut se montrer étonnés devant les gueulantes de certains ou le coup de poing d’un autre, le doigt d’honneur de René Girard à l’encontre de son homologue de Schalke, bizarrement, choque moins venant du personnage. Il faut bien dire qu’on s’est habitué au caractère bien trempé du coach, adepte d’un certain franc-parler. Les mots « merde » , « putain » , « connerie » et les sifflements en tout genre sont plutôt coutume chez le Gardois. Il en est de même pour le président Loulou Nicollin, dont la notoriété tient également au vocabulaire bien fleuri. Quitte à dire, soyons vulgaires, des conneries. Parce que c’est le Sud, aussi, hein. « Montpellier a toujours été un club un petit peu chaud, qui a souvent défrayé la chronique avec les coups de gueule de ses entraîneurs et de Louis Nicollin… Le terreau sudiste du club favorise ça » , explique Gougis. Un truc naturel, à la Paillade.
Le problème donc, et Gougis le pointe également, c’est que ces défauts de langage comme les récents débordements ne « donnent pas une bonne image de Montpellier. Dans l’affaire Jeunechamp, Nicollin devrait donner une sanction exemplaire, justement pour essayer de montrer que le MHSC n’est pas forcément le club de voyous que certains veulent laisser croire. » Mal élevés, les Montpelliérains, alors ? « En dehors de ces faits divers, c’est un club qui, quand même, a une tradition d’éducation dans son centre de formation. Un exemple : lorsqu’une équipe de jeunes sort de l’entraînement, qu’ils croisent des journalistes, ils s’arrêtent pour leur serrer la main, leur dire bonjour. Au niveau du club et des éducateurs, il y a une tradition d’éducation, et certaines valeurs à respecter. C’est d’autant plus dommage que l’on retienne du club ces gestes ou punchlines. » Bien dommage qu’un Jeunechamp n’ait pas pris exemple sur les jeunes, pour la façon de traiter un journaliste… Le genre de choses qui font que Montpellier n’est pas près de lâcher sa réputation. Mais c’est aussi pour ça qu’on l’aime, non ?
Par Alexandre Pauwels