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Montpellier cherche son plan de comm’

Par Antoine Mestres
5 minutes
Montpellier cherche son plan de comm’

Montpellier a beaucoup de mal à vivre avec son statut de champion de France. Pour expliquer les difficultés du moment, ses recrues sont pointées du doigt. En filigrane, l'absence de Giroud aussi, qui score enfin chez les Gunners. Mais mieux que ses performances, ce qui retient l'attention en début de saison, c'est bien sa communication de crise, qui n'a pas d'égal.

Repartir après un titre est peut-être la tâche la plus difficile en sport de haut niveau. Surtout lorsqu’elle concerne un club qui n’était en aucun cas préparé à cet exercice de style. Une fois l’objectif suprême atteint, il faut retourner charbonner contre des adversaires plus motivés, tout en sachant qu’il sera presque impossible de faire aussi bien. Il faut également, plus sommairement, accepter de retrouver son niveau réel. Montpellier est en train aujourd’hui de s’en rendre compte. Ils ne seront pourtant ni les premiers ni les derniers à vivre ce douloureux épisode. Dans les années 2000, beaucoup de champions ont souffert après l’ultime récompense. Nantes avait attendu la 11e journée avant de gagner lors de la saison 2001-2002. Quelques années plus tard, les voilà en Ligue 2. Stéphane Ziani se souvient : « Après un titre, Reynald Denoueix disait: « C’est simple, soit il faut changer toute l’équipe, soit il faut changer l’entraîneur. » »
Une communication qui soude

Le hic, c’est que l’inverse se produit : après un titre, il faut prolonger des joueurs bien plus gourmands. Bordeaux avait resigné en pagaille l’été 2009. Certains joueurs comme Chalmé ne s’en sont jamais remis. À l’inverse, un Jean-Michel Aulas savait très bien gérer ce mercato estival crucial en renouvelant à chaque fois son effectif avec justesse pour éviter de croiser son pire ennemi : la routine. À Montpellier, la découverte de tous ces paramètres se fait aujourd’hui dans la douleur. Mais s’il y en a bien un qui ne semble plus du tout maîtrisé, c’est la communication du club. Calibrée pour être celle d’un petit de province résistant, qui fait la nique aux plus grands, ficelée à la perfection la saison dernière, celle-ci tourne désormais au vaudeville.
L’an dernier, Montpellier jouait le titre et les sorties de ses aboyeurs étaient fréquentes. Elles donnaient du caractère, une identité au club, une force et une sérénité au groupe aussi. Lorsque, début avril, Loulou Nicollin donnait Paris champion – « Ce n’est pas toujours l’argent qui fait tout, mais à mon avis, à l’arrivée, ils seront là. » – il retirait une énorme pression à ses joueurs. Lorsqu’il alignait Ancelotti à son arrivée en janvier – « Je préfère Courbis à Ancelotti ! Il faut être « jobar » pour prendre ce type. S’il ne coûte pas cher, ça va, mais 500 000 euros mensuels… Je crois rêver ! Je ne vois pas ce qu’il a de plus. Il a gagné des titres, mais il avait de la came. Les grands entraîneurs sont ceux qui gagnent des titres avec des demi-bons. Avec Courbis, on est montés en Ligue 1 avec des demi-mongoliens. René Girard fait des miracles cette année. » – il détournait l’attention vers le PSG et valorisait le travail malin réalisé dans son club. Laissés de côté, les joueurs n’avaient plus qu’à jouer derrière. Quelques petites piques de ça et là pouvaient même souder le groupe. L’édifice était hyper cohérent, à tel point qu’il a été champion.

Une communication qui plombe
Après le titre pourtant, Nicollin sent la mauvaise histoire poindre : « Ce n’est pas que du bonheur. Les joueurs veulent tous des augmentations. Un champion, ça ne veut pas rester au Smic ! » Cette remarque peut prêter à sourire, la donne a changé, les histoires de vestiaire sont déballées. Après le match nul de la première journée contre Toulouse, résultat qui n’a a priori rien d’infamant, il remet ça : « Ce qui s’est passé après le titre, les demandes de ceci, de cela, de primes, de réévaluations de salaire, ça m’a gavé. J’ai toujours aimé mes joueurs, mon équipe, et là je reconnais que je les aime moins. J’en ai plein le cul des gens qui se plaignent sans arrêt, qui veulent plus, resigner deux ans, un an de plus pour avoir une réévaluation. Je trouve ça aberrant, casse-couilles, et ça m’emmerde. » La première salve est lancée. Exit la confiance paternaliste aveugle, Loulou se désolidarise explicitement des joueurs. Il n’est plus le père protecteur qui les vend plus cons et plus mauvais qu’ils ne sont pour les protéger. Il les responsabilise, les met face à leur statut de champion et face à un impératif de résultats.
Début octobre, il en rajoute une couche : « Je les fréquente de moins en moins, c’est tout. Je sais à quoi m’en tenir depuis le début de saison. Je leur laisse encore un mois et après on prendra les décisions nécessaires. Là, on est en train de faillir, et je mets tout le monde dans le même panier. Ça ne peut pas continuer comme ça. Quand les gens ont tout ce qu’ils ont voulu pour travailler, on ne peut pas faillir comme ça. » Avant de se montrer même plus menaçant : « En règle générale, les joueurs se sentent impunis. Et pourquoi je n’en virerais pas un ou deux, quitte à perdre le montant d’un transfert ? Dès les jours qui ont suivi le titre, je savais que certains prendraient la grosse tête. C’est dur, mais c’est la vie. Ça s’est passé comme ça aussi à Marseille, Bordeaux et Lille. Il n’y qu’à Lyon que les gars sont restés les mêmes. C’est dommage parce que ce sont de bons gars, mes joueurs. Mais il y en a beaucoup qui sont très surfaits et qui ont eu beaucoup de réussite la saison passée. » Lorsque Pierre Ménes s’en prend publiquement à Daniel Congré, il rétorque dans le Midi Libre : « Il faut arrêter de tout mettre sur le dos de Congré. Il y en a qui sont plus faibles à mon goût. Quand je vois ça, je me demande surtout pourquoi on a recruté autant de joueurs. Ce n’est pas moi qui les ai voulus. » Cadres décisionnels, recrues, joueurs du titre, finalement, tout le monde en prend pour son grade.

Good cop, bad cop
René Girard a beau essayer de calmer le jeu – « Le temps passe et la pression monte, il va falloir avoir de la sérénité dans ces difficultés, mais c’est là qu’on va voir si on a des hommes. Il n’y a pas le feu, mais il faut gagner des matchs » -, cette année, la communication un brin old school et méridionale de Montpellier a changé de dynamique. Quand Girard nuance et recadre, Loulou continue d’aligner. Allumer le feu et l’éteindre, Montpellier est un peu paumé dans cet habit de champion. Un habit trop grand pour lui.

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Par Antoine Mestres

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