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Montez à bord du train Bryan Zaragoza !
Auteur de deux buts contre le Barça dimanche, Bryan Zaragoza a appris sa convocation en sélection espagnole une heure seulement après avoir reçu son trophée de joueur du match. Une progression éclair après des années de galère.
Le 8 octobre, une star est née. Après une frappe au premier poteau pour signer le but le plus rapide jamais encaissé par le Barça, Bryan Zaragoza enchaîne : crochet, feinte de frappe et tir du droit en pleine lucarne. Jules Koundé admire en spectateur, sur les fesses. Gamin déjà idolâtré à Granada, où il a planté trois pions en trois matchs en fin de saison passée pour offrir la montée en Liga aux Andalous, l’attaquant de 22 ans entre dans une nouvelle dimension. Une dimension qu’il n’aura que très peu de temps pour assimiler. Trophée d’homme du match en main, « Bryan » (comme il est simplement écrit sur son maillot) se pointe en zone mixte tout sourire : « Pendant le match, Ronald Araújo m’a dit “Connard, arrête de courir !” » Un journaliste lui lance même : « Tout le stade chantait “Bryan selección”, c’est quelque chose que tu as en tête ? » Réponse : « Je travaille tous les jours pour réaliser ce rêve. Le Mister fait ses choix, et je respecte. »
🖼🎨👨🎨 Una obra de arte, @brryann11.#GranadaBarça | #LALIGAEASPORTS #LALIGAHighlights pic.twitter.com/h7TR1eAw7H
— LALIGA (@LaLiga) October 10, 2023
« Je joue pour dribbler »
À l’heure précise où il répond, le feu follet de Granada n’est pas dans la liste de la Roja. Mais une heure plus tard, coup du sort : l’attaquant de Villarreal Yeremi Pino s’est blessé contre Las Palmas et un certain Bryan Zaragoza est appelé pour le remplacer. Le rêve du divin enfant de Malaga et de toute l’afición de Los Carmenes se réalise : Bryan selección ! Il est même le premier à débarquer à Las Rozas – le Clairefontaine espagnol – le lendemain matin. La nuit de la nouvelle coqueluche du football espagnol a été courte : entre son doublé contre le Barça et sa convocation, Bryan a également appris qu’il allait être tonton. « C’est le meilleur jour de ma vie », résume celui pour qui la vie n’a pas toujours été toute rose. Avec son petit mètre 64, il fait partie des rejetés des centres de formation. Malaga d’abord, qui ne le calcule même pas alors qu’il brillait tous les week-ends avec Conejitos, un club partenaire. Puis Valladolid et le Betis.
🪄 𝑳𝒂 𝒎𝒂𝒈𝒊𝒂 𝒅𝒆𝒍 𝒇𝒖́𝒕𝒃𝒐𝒍 𝒅𝒆 𝒄𝒂𝒍𝒍𝒆.
✍🏻 Bryan Zaragoza pic.twitter.com/7dWAn5R65R
— Relevo (@relevo) October 10, 2023
Le dribbleur fou, qui cumule 28 gestes réussis pour 51 tentés cette saison en Liga, après seulement huit rencontres, ne trouve grâce qu’aux yeux de Granada, qui met de côté son gabarit fluet pour mieux profiter de son talent XXL dans le un-contre-un. Ses anciens entraîneurs le classent d’ailleurs tous dans le top 3 des meilleurs dans l’exercice, devant un certain Mohamed Salah. « Je joue pour dribbler, comme mon corps me le demande. Je ne joue pas pour courir après le ballon. J’ai grandi dans le quartier, j’ai joué toute ma vie comme au quartier, résume-t-il au moment de faire les présentations pour sa première conférence de presse avec la Roja. Je ne regarde pas l’adversaire en face de moi, je peux jouer comme ça sur la place, en Liga ou en Ligue des champions, parce que j’ai mon style. » Biberonné aux vidéos de Ronaldinho, Lionel Messi et plus récemment Neymar et Vinicius, Bryan Zaragoza a pourtant mis du temps avant de s’éclater sur les terrains de Liga.
Une première à domicile ?
Diamant brut à polir, il arrive cabossé à Granada, protégé par une famille qui tente de lui faire oublier ses essais ratés dans les clubs du coin. Après une saison chez les U19, il écume les pelouses de Segunda B (ex-troisième division espagnole) en prêt à El Ejido, puis avec l’équipe réserve. Un passage à l’âge adulte à marche forcée, pour cet artiste aussi sensible sur qu’en dehors du carré vert. Robert Moreno se souvient d’un jeune homme venu le remercier les larmes aux yeux après l’avoir lancé dans le grand bain un soir de Laguna-Granada lors des premiers tours de Coupe du Roi le 30 novembre 2021. Deux ans plus tard, avec seulement huit matchs en première division au compteur, cinq buts et une passe décisive, le gamin qui passait ses journées à tâter le cuir sur la place du quartier du 4 décembre de Malaga pourrait vivre sa première sélection ce jeudi, contre l’Écosse, à Séville. Chez lui. Et puisque sa vie depuis une semaine ressemble à un shōnen, la logique voudrait qu’il plante.
Par Anna Carreau