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Montero : « La France, une des meilleures sélections au monde »

Propos recueillis par Thomas Goubin, à Morelia
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Excellent face à la Suisse, l'Équatorien Jefferson Montero, 24 ans, dit «la turbine», est le genre de joueur qui réjouit à chacun de ses crochets courts et de ses démarrages façon dragster. Déjà passé par l'Espagne (Betis, Villarreal), aujourd'hui au Mexique (Monarcas Morelia), BabyJeff nous en dit plus sur son parcours, sa sélection, ses contacts avec des clubs européens, et loue Robert Pirès.

Comment décrirais-tu le style de jeu de l’Équateur ?

Sincèrement, c’est le style traditionnel du football équatorien : un 4-4-2 puissant, qui va très vite dans les couloirs. On a des joueurs très rapides, comme notre latéral droit (Juan Paredes, ndlr), Antonio Valencia, Enner Valencia est très rapide, lui aussi. On peut aussi compter sur Cristian Noboa (Dynamo Moscou, ndlr) qui peut te faire une passe de 70-80 mètres, et Felipe Caicedo (Al-Jazira, ex-Manchester City, ndlr), notre goleador. La rapidité de nos joueurs, c’est l’une des grandes forces de notre sélection.

Quel cap vous êtes-vous fixé au Mondial ?

Je veux que l’on soit la surprise du Mondial. Je n’aime pas les paroles en l’air, je dis cela car je crois vraiment qu’on a le potentiel pour faire de belles choses. L’Équateur va surprendre au Mondial (ndlr : interview réalisée avant le Mondial). On joue ensemble depuis longtemps, on se connaît parfaitement, on sait exactement ce que va faire chacun de nos coéquipiers, et cela ce n’est pas facile à obtenir en sélection. L’Équateur n’a jamais fait mieux qu’un huitième de finale en Coupe du monde. Arriver en demi-finales, ce serait un immense accomplissement. C’est un but, pas un rêve. On a confiance en nous.

En quoi cette génération est-elle supérieure aux précédentes ?

Je crois que notre génération a vraiment bénéficié de la vitrine qu’est la sélection. Personnellement, j’ai débuté à 17 ans avec La Tri. Ça nous aidés à nous exporter rapidement et à devenir de meilleurs joueurs. Beaucoup d’entre nous jouions ou avons joué au Mexique, un pays très agréable, où on se sent comme à la maison.

Quelle fut l’émotion d’inscrire le but de la qualification pour le Mondial face à l’Uruguay ?

(Ému) Sous mon maillot j’avais un tee-shirt hommage à Chucho (Christian Benítez, goleador de l’Équateur, décédé à 27 ans d’une crise cardiaque au Qatar, en juillet 2013). Antonio Valencia en avait un aussi, et on s’était promis de le montrer si l’un de nous marquait. Mon but, je le dois avant tout à Antonio, qui a fait le gros du travail, je n’avais plus qu’à la pousser au fond. Quoi qu’il en soit, le match était tellement dur, disputé, l’enjeu était tellement grand, qu’au dernier moment, j’ai préféré ne pas prendre le risque de recevoir un carton jaune. Ce fut une immense émotion et finalement, nous avons dédié notre qualification à Chucho. Ce n’était pas seulement un excellent attaquant mais l’un des moteurs du groupe.

Comment êtes-vous parvenus à surmonter ce drame advenu à l’abord du dernier virage des éliminatoires ?

Le groupe a profondément été touché par ce décès. On était au fond du trou mentalement mais on a fini par parler entre nous pour trouver la force de se dépasser. Par ses discours, le Profe Rueda nous a aidés à surmonter ce drame pour qu’on retrouve la motivation, la joie de jouer. Finalement, on s’est dit qu’on devait tous se surpasser, et qu’il fallait se qualifier pour rendre Chucho heureux, car c’est ce qu’il voulait. Quoi qu’il en soit, bientôt un an a passé et ça me paraît encore irréel. J’ai vraiment du mal à y croire. On dirait qu’il est encore là. C’est difficile à assimiler…

Comme as-tu réagi le jour du tirage au sort du Mondial ?

Je crois que notre groupe est compliqué mais on veut vraiment faire mieux que nos prédécesseurs des Mondiaux 2002 et 2006. Le favori évident, c’est la France. Ils ont des joueurs impressionnants, pas la peine de les nommer. Des joueurs capables de faire la différence seuls. Tu ne peux pas faire une erreur contre eux car tu la paies cash. Le Honduras, on les a joués plusieurs fois et c’est une sélection physique, dure à jouer.

Pour toi, la France est favorite même si la Suisse est tête de série ?

Oui, bien sûr. Votre sélection est excellente. Même s’ils sont passés par les barrages, cela n’empêche rien. Il suffit de se remémorer le parcours de l’Uruguay en 2010. Ils se sont qualifiés en barrages et regarde où ils sont arrivés. Pour nous, ce sera excitant d’affronter une sélection comme la France, une des meilleures du Monde. Je me rappelle notamment du Mondial 98 et de Zidane. C’était un joueur d’une autre galaxie. Sa qualité technique était incroyable et c’était un leader, ce n’est pas pour rien que le Real Madrid l’a conservé après la fin de sa carrière.

Connais-tu le nom du latéral droit auquel tu feras face ?

Franchement, non. J’ignore qui est latéral droit de la France. Je sais qu’à gauche, vous avez Évra, qui va se trouver en face d’Antonio Valencia, son coéquipier à Manchester. Entre eux, on peut s’attendre à un beau duel. Le sélectionneur et son staff me donneront ces indications en temps voulu.

À Villarreal, tu as connu Robert Pirès…

Tu vois, tu me parles de lui et j’ai le sourire aux lèvres. C’est une personne incroyable. Il m’a aidé, comme Marcos Senna et Santi Cazorla. J’étais un tout jeune joueur qui avait grandi dans un quartier populaire du Tiers-monde et ces joueurs-là m’ont traité avec beaucoup de considération. Quand je me suis retrouvé à m’échauffer à côté de Robert Pirès, ça a été incroyable. J’avais 19 ans. J’ai beaucoup appris à ses côtés.

Quels conseils a pu te donner Pirès ?

Il était en toute fin de carrière, mais il s’entraînait comme s’il devait faire ses preuves. Avant que ne commence la pré-saison, il travaillait avec son entraîneur personnel pour être le plus affûté possible. Tu sentais son expérience peser dans le vestiaire. Il me donnait des conseils sur ma façon de jouer, la manière de faire attention à moi pour faire une grande carrière. Lui et Marcos Senna, ce sont des gens desquels il faut apprendre.

Avant de se qualifier pour le troisième Mondial de son histoire, l’Équateur a connu un échec cinglant lors de la Copa América 2011 (trois défaites et retour à la casa). Pourquoi ne l’as-tu pas joué et comment expliques-tu ce fiasco ?

C’était un cycle qui débutait. Ça m’a fait mal de ne pas avoir été sélectionné mais vu comment ça c’est passé, c’était un mal pour un bien. Quand je suis revenu en sélection, j’étais plus fort, je voulais montrer sur chaque ballon que je méritais ma place. À l’époque, le sélectionneur Reinaldo Rueda commençait à imposer sa méthode et elle n’était pas assimilée par tous. L’équipe s’éparpillait.

Quelle est la méthode Rueda ?

C’est quelqu’un de très tranquille. Un grand travailleur. C’est un sage, il n’élève jamais la voix. Il parle peu et va droit au but. Le Profe nous dit toujours de faire attention pour ne surtout pas prendre le premier but. Mais il nous donne dans le même temps une grande liberté pour exprimer notre football offensif, et au Mondial, on espère créer la surprise. En dehors du terrain, c’est un gentleman, c’est un peu notre père à tous.

Personnellement, t’a-t-il aidé à progresser ?

Oui. À l’approche des derniers matchs éliminatoires, El Profe Rueda m’a ainsi martelé que je devais me trouver davantage à la conclusion des actions. À ce moment-là, il me parlait davantage que ma propre mère. Il me montrait des vidéos en me prouvant que sur certains matchs, j’aurais pu marquer quatre ou cinq buts. Ça m’a aidé. Le but contre l’Uruguay est le fruit de ce travail. Je me suis retrouvé à la conclusion de l’action dans la position d’un avant-centre.

Tu as grandi à Babahoyo. Pourrais-tu nous décrire un peu ton enfance ?

Babahoyo se situe à une heure en voiture de Guayaquil, la deuxième ville du pays. Les gens là-bas se dédient avant tout à l’agriculture. Je viens d’une famille humble, c’est ce qui m’a rendu fort et me permet aujourd’hui de faire mon métier avec beaucoup de plaisir. Ma famille est heureuse. Mon père est un malade du football, il a toujours été derrière moi. C’était une sorte de professeur. Encore aujourd’hui, il me critique, me demande pourquoi j’ai fait tel choix plutôt qu’un autre… Mon père était paysan, aujourd’hui il gère une ferme que j’ai pu acquérir (il le reconnaît du bout des lèvres, presque embarrassé, ndlr). C’est ce qu’il mérite.

Devenir joueur professionnel et évoluer à l’étranger, était-ce un but envisageable quand on vient de Babahoyo ?

J’ai toujours pensé que je pourrais être pro. Mon père a parié que je débuterais en pro à 18 ans, je lui ai dit non, à 17, et c’est ce qu’il s’est passé. C’est arrivé avec Emelec, mon club de cœur.

Au fait, comment es-tu arrivé à Villarreal à 19 ans ?

Quand mon agent de l’époque, Diego Herrera, m’a dit qu’on s’intéressait à moi en Europe, j’avais du mal y croire. Il m’a d’abord parlé du Real Madrid, mais finalement, c’est tombé à l’eau. Ils voulaient me faire jouer pour leur filiale. Villarreal était aussi intéressé. À l’époque, il s’agissait d’un club abonné aux Coupes d’Europe. J’ai passé de bonnes années là-bas.

Tu as toutefois enchaîné les prêts…

En fait, la première saison, je me suis retrouvé dans la filiale, ensuite dans l’équipe première mais je ne jouais pas. À mon poste, la concurrence était rude. Il était arrivé à Cazorla la même chose qu’à moi. Il avait dû aller au Recreativo Huelva pour gagner du temps de jeu. Il m’a recommandé de faire la même chose et je me suis retrouvé à Levante. Ça s’est bien passé. Je ne voulais pas revenir à Villarreal car je savais que ce serait difficile de jouer. Finalement après quelques jours, on m’a prêté au Betis Séville, où j’ai réalisé ma meilleure saison. Je suis extrêmement reconnaissant envers l’entraîneur, Pepe Mel.

En quoi t’a-t-il aidé ?

Au Betis, j’étais titulaire. Pepe Mel a eu confiance en moi, m’a dit : « Voilà ce que j’attends de toi, voilà les éléments sur lesquels tu dois progresser » . Alors, je restais à la fin des entraînements pour travailler mes centres, la dernière passe. Je restais avec Roque Santa Cruz, qui m’aidait. J’ai aussi travaillé le repli défensif, la fermeture des espaces.

Après cette excellente saison au Betis où tu marques notamment un but face au Real Madrid, tu pars au Mexique, aux Monarcas Morelia. Comment expliquer ce choix qui ressemble à une régression vu d’Europe ?

Ce fut une situation délicate. Ça m’a coûté de faire ce choix. Je voulais rester en Espagne mais Villarreal, à qui j’appartenais encore, descendait. Je connaissais la deuxième division et je ne voulais pas y retourner. J’ai reçu diverses offres. Il me restait un an de contrat. C’était la crise alors en Espagne. Il s’est passé des choses, je n’ai pas vraiment tout maîtrisé. La meilleure offre fut celle de Monarcas Morelia. La décision n’était pas entièrement la mienne. Mon ex-agent a beaucoup à voir dans ce transfert… Finalement, je suis ici. Ce se passe très bien. Je me sens comme à la maison. Si aujourd’hui je reçois autant d’offres c’est grâce à Morelia.

Qui t’a approché ?

Je ne peux pas te donner les noms des clubs, car j’ai fini par charger un proche de ce thème, mais c’est venu d’Italie (on a parlé de Naples, ndlr), d’Angleterre (Swansea, ndlr), deux clubs français aussi (le nom du Stade rennais avait filtré l’été dernier, ndlr). Pendant un moment, ça m’a perturbé. J’ai moins fait attention à moi. J’oubliais de jouer. Finalement, le président de Morelia m’a convaincu de rester. J’ai une relation franche et directe avec lui. On s’est entendus pour bien faire les choses d’ici le Mondial et de partir après. Je n’ai pas vraiment de préférence quant à ma prochaine destination. J’aime beaucoup le championnat anglais, mais aussi l’espagnol, l’italien, et l’Allemagne. J’ai également reçu des offres de Russie et du Qatar. Mais au final, ici je suis heureux.

Vu d’Europe, difficile d’imaginer que la vie est agréable à Morelia, la capitale du Michoacan, un État connu à l’international pour la puissance de ses narcotraficants. Étais-tu inquiet avant de venir ?

Franchement, j’étais tranquille quand je suis arrivé. Ici, les gens sont aimables. Si tu te comportes bien, il ne devrait rien t’arriver. C’est comme ça partout, pas seulement au Mexique. Ma famille est heureuse ici, les conditions de vie sont bonnes. Le club ne nous donne pas plus de conseils que cela. Nous sommes des joueurs mûrs, des hommes responsables.

Si tu n’avais pas été footballeur…

J’aurais été agriculteur comme mon père. Dans ma région, on récolte la banane qu’on envoie ensuite en Allemagne, en France, pour que vous la consommiez. Le cacao aussi, que vous transformez en chocolat. On vous envoie tout ça…
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Propos recueillis par Thomas Goubin, à Morelia

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