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Monsieur Bielsa, la Lazio vous remercie
Le refus de Bielsa de venir à la Lazio à l'été 2016 a permis à Simone Inzaghi de s'imposer comme un vrai bon coach. Et de remporter déjà deux trophées avec le club laziale.
Certains appelleront ça les clins d’œil du destin. D’autres les coïncidences. À vol d’oiseau, 1684 kilomètres séparent Rome et Leeds. Mais ce mercredi 15 mai 2019, les deux villes étaient, émotionnellement parlant, beaucoup plus proches. À 22h38, très précisément, Rome a chaviré de bonheur pendant que Leeds a éclaté en sanglots. Un homme a laissé éclater sa joie pendant qu’un autre, tête baissée, a caché sa frustration derrière ses binocles. Simone Inzaghi d’une part, Marcelo Bielsa de l’autre. En principe, rien ne lie les deux hommes, ni les soirées qu’ils ont chacun vécues. Et pourtant, la soirée magique d’Inzaghi, vainqueur de la Coupe d’Italie avec la Lazio, n’aurait pas été possible sans Bielsa, éliminé hier soir des play-offs d’accession à la Premier League.
Voyage annulé
Retour à l’été 2016. Après avoir assuré l’intérim en fin de saison sur le banc de la Lazio, après le licenciement de Stefano Pioli, Simone Inzaghi fait ses valises. Le président laziale, Claudio Lotito, lui a offert le banc de la Salernitana, son autre club, pensionnaire de Serie B, et Inzaghi a accepté. De fait, une pointure internationale doit arriver sur le banc de la Lazio : Marcelo Bielsa. L’accord a été trouvé et même annoncé officiellement. Mais, coup de théâtre, le jour où il est censé débarquer à Rome pour être présenté, El Loco change d’avis. On ne saura jamais vraiment pourquoi. Lui évoque le fait que les dirigeants laziali n’ont pas respecté l’accord qui prévoyait quatre recrues avant le 5 juillet. Un peu en panique, Lotito rappelle Inzaghi la queue entre les jambes et lui demande d’annuler son départ pour Salerne. Les tifosi biancocelesti voient ça comme un aveu de faiblesse, le renoncement à un projet beaucoup plus ambitieux.
Trois années plus tard, le bilan est là, sous les yeux de tous : Simone Inzaghi a remporté deux trophées avec la Lazio : la Supercoupe d’Italie 2017 et la Coupe d’Italie 2019. Hormis l’intouchable Massimiliano Allegri, aucun entraîneur n’a gagné plus sur la même période en Italie (depuis juillet 2016 : six trophées pour Allegri, deux pour Inzaghi, un pour Montella). Il a également qualifié trois fois sur trois son équipe pour la Ligue Europa, ne ratant l’an passé la qualification en C1 qu’à la différence de buts particulière. Depuis son arrivée, la Lazio a également assuré le spectacle : 276 buts marqués en 147 rencontres, soit une moyenne de 1,87 par match. La saison dernière, elle a même terminé meilleure attaque de Serie A (89 buts, trois de plus que la Juve), avec Ciro Immobile meilleur buteur et Luis Alberto meilleur passeur. Un bilan somme toute extrêmement positif, surtout au vu de l’effectif, du budget bien en dessous des autres gros de Serie A et des investissements faits sur cette période (bilan positif de 19,1 millions d’euros sur le marché des transferts depuis 2016 ; 84,3 millions d’euros dépensés, 103,4 millions encaissés).
Aucun trophée en club depuis 1998
Alors, forcément, quand les tifosi de la Lazio regardent ce qu’a fait Marcelo Bielsa sur la même période, ils ont de quoi avoir le sourire. L’Argentin a entraîné le LOSC pendant quelques semaines, pour un coquet bilan de 3 victoires, 5 nuls et 7 défaites toutes compétitions confondues. Avec une avant-dernière place en Ligue 1 à la clef et une élimination au deuxième tour de la Coupe de la Ligue. Puis il a pris en mains Leeds, avec plus de succès : une troisième place en Championship (25 victoires, 13 défaites, 8 nuls), une demi-finale de play-offs perdue (1-0, 2-4), une élimination au 1er tour de la FA Cup, et une élimination au 2e tour de la League Cup. Alors, certes, les supporters de Leeds se sont régalés, ont vibré, ont rêvé. Comme jamais depuis très longtemps. Et ça, aucun trophée ne pourra le remplacer. Ça tombe bien, puisque Bielsa n’en gagne jamais, des trophées. Son dernier (si l’on excepte les JO 2004) remonte à 1998 : un championnat d’Argentine avec Vélez Sársfield. Une année où Simone Inzaghi fêtait son baptême en Serie A… en tant que joueur.
Alors, qu’aurait fait Bielsa à la Lazio ? Ou du moins, qu’aurait-il fait de plus que Simone Inzaghi ? Aurait-il fait de Wallace le meilleur défenseur de Serie A ? Aurait-il transformé Patric en Dani Alves ? Se serait-il qualifié pour la Ligue des champions ? Peut-être. Qui sait ? Impossible de le savoir. Une chose est néanmoins certaine : personne, à Rome, ne regrette son refus. Et encore moins ce mercredi soir, quand l’un a été porté en triomphe par ses propres joueurs, quand l’autre s’est demandé toute la nuit comment ses ouailles avaient pu laisser échapper leur rêve. El Loco Inzaghi.
Par Éric Maggiori