- Euro 2012 – Groupe C – Danemark/Allemagne
Monsieur Andersen, heureux de vous revoir
Considéré à ses débuts comme le nouveau Peter Schmeichel, Stephan Andersen est rentré sagement dans le rang, attendant d’avoir 30 ans pour saisir sa chance de garder les bois du Danemark en compétition. Opposé dans ce groupe C au top actuel des attaquants européens, le portier de l’ETG et habituelle doublure de Sorensen en sélection s’en tire plutôt bien jusqu’à présent. Objectif ce soir : empêcher Gómez de scorer.
Drôle de statut que celui de portier remplaçant. Patrick L’Hostis, l’entraîneur de gardiens du FC Lorient, définissait la chose ainsi : « Un bon numéro deux, c’est un mec capable de jouer, un mec constant dans le travail et la performance, un mec qui casse pas les burnes au numéro un et un mec qui fout pas le bordel dans le vestiaire. » * « Il faut de l’égo dans ce métier et, doublure, c’est parfois oublier d’en avoir un » , complétait Rémy Vercoutre, l’homme de l’ombre des succès lyonnais de la dernière décennie. Longtemps, ce rôle de sparring-partner du portier titulaire fût celui attribué à Stephan Andersen en sélection danoise. En 2004 déjà, il est de l’aventure lors de l’Euro portugais, calé sur le banc. Pareil en 2010 en Afrique du sud. Et ça devait encore être pareil lors de cet Euro. Il s’en est longtemps accommodé, se contentant de ces rassemblements internationaux sans avoir l’occasion de s’exprimer, étant barré par l’inamovible Thomas Sorensen, le gardien de base du système Olsen.
Se faire violence
Il faut dire que le profil d’Andersen colle parfaitement à cette définition de doublure sage et dévouée. Une bonne pâte qui ne casse pas les burnes et qui range ses prétentions dans le vestiaire. Gardien à Brondby au pays pendant cinq saisons, il savait ne pas pouvoir prétendre à passer devant Sorensen et sa grande expérience de la Premier League. Mais finalement, l’été dernier, à l’aube de ses trente ans, le massif garçon décide de relever un challenge à l’étranger, comme ça, pour voir, se mettre en danger, pour se tester. Montrer qu’il vaut mieux. Il refuse de prolonger son contrat et accepte l’offre d’Évian Thonon Gaillard à la fin de la fenêtre des transferts. Une offre casse-gueule, pourtant, car elle ne lui permettait absolument pas de prétendre à une place de titulaire dans la durée. Le promu savoyard cherchait juste un pigiste pour suppléer l’habituelle doublure Quentin Westberg, le temps que le numéro un Bertrand Laquait retrouve la forme physique.
Le compatriote de Daniel Wass et Christian Poulsen dispute cinq matchs honnêtes dès son arrivée en France, avant de sombrer, comme son équipe, à Annecy face à Caen fin septembre. Laquait reprend assez logiquement les gants durant sept rencontres, mais la malchance poursuit ce dernier, qui se fracture le tibia à Rennes en novembre. C’est une nouvelle occasion pour Andersen de faire ses preuves. « Stephan a un triple objectif : montrer sur la durée l’étendue de son talent, nous aider dans notre entreprise de maintien et retrouver la sélection nationale » , annonce alors son entraîneur Bernard Casoni. Six mois après, ce sont des missions accomplies. D’abord, le gardien a montré des signes évidents de progrès au fur et à mesure de la saison, prenant confiance, s’affirmant mieux dans sa surface, faisant parler ses qualités au sol et sa bonne relance. Ensuite, il a contribué au maintien relativement aisé de son club pour son baptême du feu en L1. Et enfin, alors que Morten Olsen l’avait un temps perdu de vue en cours de saison, il est de nouveau convoqué en sélection.
Rien à perdre
Petit coup de pouce du destin pour finir, Thomas Sorensen s’est blessé au dos fin mai et a dû laisser sa place de numéro un. À 30 ans, Stephan Andersen a enfin la chance d’être titulaire lors d’une compétition internationale. Une sacrée revanche, quand on se souvient que, dans ses jeunes années, il avait été présenté comme le futur Peter Schmeichel, la légende danoise de Manchester United : carrure sensiblement identique – quoiqu’un peu plus petit – et même club des débuts pro, Hvidovre. Sauf qu’Andersen, qui a, lui aussi, rapidement tenté sa chance en Premier League avec Charlton, n’est jamais parvenu à s’y affirmer comme l’avait fait son illustre aîné. D’où ce retour, tête basse et illusion en berne, au pays pendant plusieurs saisons. La suite, vous la connaissez. Confronté, lors de cet Euro, à l’armada offensive hollandaise, puis à Cristiano Ronaldo et au Portugal, il s’en est, jusqu’à présent, plutôt bien tiré. Ce soir, c’est l’Allemagne qui l’attend, avec, au bout, un réel espoir de qualification pour le Danemark. Encore faudra-t-il se montrer vigilant face, cette fois, à Mario Gómez. « C’est un attaquant complet, bon finisseur, excellent de la tête, a-t-il reconnu, il est doué pour exploiter la moindre petite occasion. Mais, comme les autres, ça reste un footballeur. » Stephan Andersen, la force tranquille. Vraiment tranquille.
* Lire « De but en banc » sur sofoot.com
Par Régis Delanoë