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- Argentine/Brésil (1-3)
Mondial 82 : L’élégance du Brésil
Le 2 juillet 1982, lors de la deuxième phase de groupe de la Coupe du Monde, le Brésil de Zico-Socrates fait face à l'Argentine du jeune Maradona. Face au football-art de la Seleçao de Telê Santana, l'abiceleste de Menotti va s'effondrer. L'Argentine lâche son trophée Jules-Rimet, et le Brésil apparaît alors comme le candidat le plus convaincant pour lui succéder.
L’Argentine se trouve en sursis. Elle vient de chuter face à l’Italie (1-2), et les jambes de Maradona pleurent encore les coups donnés par Claudio Gentile. En face, se présente le Brésil de Telê Santana, prolifique, sûr de sa force. Une sélection à laquelle certains tendent déjà le trophée Jules Rimet, au terme de la première phase de groupe. En Espagne, Socrates, Zico, Falcao et Toninho Cerezo prennent du bon temps. A l’aise, supérieurs. Après une entame de très haut niveau face à une excellente URSS (2-1), les Brésiliens ont affolé les compteurs face à l’Ecosse (4-1), puis devant la Nouvelle -Zélande ( 4-0).
Maradona diminué
Côté argentin, l’alliage entre champions du monde 78 et la génération Maradona ne prend toujours pas. Menotti envisage pourtant de voir sa sélection trouver son salut face à son voisin et néanmoins ennemi. « Le Brésil nous présentera des problèmes,convient-il, mais c’est la première fois du Mondial qu’ils vont rencontrer une équipe avec nos caractéristiques » . Face aux auriverde, Menotti veut la jouer à la loyale, loin des mots d’ordre belliqueux qui prédominent généralement quand s’affrontent les deux géants sud-américains. « Chaque fois que nous avons joué contre eux, cela ressemblait davantage à une guerre qu’à un match de foot,reconnaissait Oswaldo Ardiles, ce qui est malheureux, car vous avez peut-être face à face, les 22 meilleurs joueurs du monde.(…) Mais cette fois, l’Argentine va jouer l’offensive, et le Brésil aussi » .
Une bonne intention qui s’évanouira une fois le coup d’envoi donné ? Non, l’Argentine, condamnée à la victoire dans ce groupe à trois où elle cohabite également avec l’Italie, allait bien prendre les choses en main. Les Brésiliens vont cependant rapidement rappeler que la gonfle danse mieux dans leurs pieds. Après une entame tout en ciel et blanc, Edson fait briller sa frappe extérieur du pied sur coup-franc. La balle s’écrase sur la barre, et Zico, à l’affut, la pousse au fond des filets. On joue la onzième minute. L’Argentine, tenante du titre, a un pied trois-quart en dehors du Mondial. La veille de la rencontre, Zico avait mis le doigt sur la force et la faiblesse de l’Albiceleste : un diez nommé Diego. « Si l’Italie a gagné, c’est que Maradona a été bien marqué, considérait le milieu offensif de Flamengo, il est toujours plus facile de détruire, c’est ce à quoi s’est dédié Gentile, avec succès » . Ce 2 juillet, Diego, diminué, n’a pas son rendement habituel. Zico, lui, se balade. « Ils peuvent toujours me marquer, avait-il averti, mais il y a d’autres joueurs dans notre équipe capables de faire la différence » .
Passe dans l’espace
Après l’ouverture du score auriverde, le match va largement tourner à l’avantage du Brésil. Au-delà de la qualité de ses individualités, de la technique parfois superlative de certains, c’est avant tout la science de la passe dans l’espace qui fait de ce Brésil une sélection de référence. Le but de Serginho (66e), puis celui de Junior (75e), confirment la qualité collective hors-norme de cette Seleçao. L’aisance frappe, et l’effort reste invisible. Le Brésil propose quelque chose d’élégant et léger. Du football-bossa-nova. Du football-art diront d’autres.
Ce jour-là, Maradona préfère donner la réplique au voisin honni en tâtant de l’art martial. Quand son pote, Juan Barbas, avec qui il avait été sacré champion du monde juniors 79, se fait subtiliser virilement la gonfle par Batista, Diego disjoncte et envoie ses crampons dans l’abdomen du Brésilien. El Pibe de oro quitte son premier Mondial sur un carton rouge, et assistera du banc à la réduction du score tardive de Ramon Diaz (89e). Le Brésil, lui, semble lancé irrésistiblement vers son quatrième titre de champion du monde. Le trauma post-Pelé a ses jours comptés, croit-on. Pour terminer premier du groupe et atteindre ainsi les demi-finale, ne suffit-il pas au Brésil d’arracher un petit match nul face à l’Italie …
Par Marcelo Assaf, avec Thomas Goubin