5 novembre : le dopage financier
La première information déterrée par l’enquête concerne le magot sur lequel est actuellement assis le club du Rocher. En effet, après avoir sauvé l’ASM de la banqueroute sportive et financière en 2011, Dmitri Rybolovlev est accusé d’avoir personnellement injecté 326 millions d’euros en deux ans, alors que le règlement de l’UEFA interdit aux actionnaires de subventionner leur club à fonds perdus. Pour agir en toute discrétion, le milliardaire russe aurait donc signé en 2014 un accord avec AIM, une agence de marketing sportif dirigée par Bernard De Roos, censé garantir l’apport de 140 millions d’euros par an et permettant de rester dans les clous du fair-play financier. Ce contrat de vitrine, démenti par l’AS Monaco, aurait dissimulé ce qui se passait en arrière-boutique : c’est Rybo en personne qui aurait fourni le liquide dans ce sponsoring fictif, via un montage offshore transitant par Hong Kong et les îles Vierges britanniques.
Sauf qu’une brouille entre Rybolovlev et De Roos aurait fait capoter le deal, mettant Monaco dans l’embarras, après les montants faramineux claqués sur le marché des transferts. Finalement, le contrat n’a pas été exécuté et l’UEFA, à ce moment dirigé par Platini, n’a infligé qu’une amende de 3 millions d’euros à l’étude de ses comptes déficitaires. Une affaire qui tombe au pire des timings, puisque le lendemain, l’ASM reçoit Bruges dans une rencontre déterminante pour son avenir européen. Déjà mal au point en championnat, les hommes de Thierry Henry s’en tireront avec une gifle (0-4), alors que dans le même temps, leur président a été placé en garde à vue dans le cadre d’une affaire d’escroquerie présumée, qui n’a rien à voir avec les Football Leaks, mais qui l’oppose à son ancien marchand d’art suisse Yves Bouvier. Une semaine pouvait-elle plus mal commencer ?
7 novembre : les combines sur le transfert de Mbappé
Dans l’article consacré aux coulisses du transfert de Kylian Mbappé, Monaco n’est pas le personnage principal. Mais il est une nouvelle fois cité sur plusieurs éléments. Il y a d’abord le bras de fer en 2015 entre Vadim Vasilyev et le père du petit prodige, vexé que son poulain ne soit pas déjà titulaire avec Jardim, pour que celui-ci signe rapidement son contrat pro sous peine d’être envoyé avec les équipes jeunes. Deux ans plus tard, l’ASM se serait entendu avec le PSG en toute fin de négociations pour que la solution d’un prêt gratuit puisse exonérer les deux clubs de toute imposition sur cette transaction.
Ensuite, c’est la présence de Jorge Mendes dans ce transfert qui pose question. L’agent aurait été sollicité par le Rocher pour faire monter les enchères et débloquer le dossier – tout en prenant au passage une commission sans qu’il n’ait été mandaté au début de l’opération. Enfin les indemnités fixes du transfert auraient été directement dans les poches d’un Dmitri Rybolovlev profitant de cette occasion pour reprendre une part de ce qu’il avait jusqu’ici investi. Via un communiqué, le club dément que son président a retiré un seul centime des caisses suite à ce transfert, que ces 182 millions d’euros ont permis de combler les déficits, et parle d’une diffamation de Mediapart.
13 novembre : la drague illicite des joueurs mineurs
Monaco est reconnu comme un club sachant flairer les futurs grands joueurs. Mais comme d’autres écuries, il aurait cependant été pris la main dans le sac, sur des pratiques interdites par les règles visant à protéger les joueurs mineurs. Mediapart apporte l’exemple d’un jeune de 12 ans, repéré en région parisienne, pour qui les dirigeants ont proposé à sa famille un accord sous seing privé, des primes anticipées à la signature, des aides au logement et à la scolarité pour s’assurer que le petit crack rejoigne la Principauté. Dans la foulée, c’est toute une liste de combines qui est dressée pour la rémunération des agents qui auraient déniché les pépites.
15 novembre : les parts d’ombre de Rybolovlev
C’est ensuite toute une série qui est consacrée par Mediapart au patron de l’ASM. Un portrait en huit épisodes sur le 242
e homme le plus riche du monde et ses relations avec les huiles de la Principauté. Un des moyens qui seraient privilégiés pour s’adjuger les faveurs du petit monde monégasque : distribuer les invitations aux matchs de l’ASM comme des petits pains et profiter de ces moments pour tisser sa toile, devenant officieusement l’homme le plus puissant du Rocher au nez et à la barbe d’Albert II de Monaco.
Une irrévérence qui a poussé le prince à évoquer à demi-mot le départ de l’oligarque. « Il y a des soupçons d’une certaine influence » , a-t-il réagi dans une interview accordée à Mediapart. « Je pense qu’il faut laisser faire la justice jusqu’au bout. Si jamais tout cela était avéré, je pense qu’il se retirera de lui-même. Vous avez vu qu’il est déjà très en retrait par rapport à la marche du club. Il se tient bien sûr informé, mais il est apparu quand même de moins en moins souvent au stade. Il est de moins en moins présent en Principauté depuis quelque temps déjà. » Et pour cause, Dmitri aurait regagné ses pénates russes depuis qu’il a été libéré sous caution.
18 novembre : la virgule d’Albert II
On connaissait le bobeur, on connaissait le fan de foot, mais les Football Leaks révèlent un autre talent supposé de l’héritier Grimaldi : sa faculté à choisir des conseillers qui savent jouer de leur influence auprès des instances internationales sportives (le CIO et l’IAAF en l’occurrence) pour servir les intérêts de l’AS Monaco. Via l’ancien perchiste international Kory Tarpenning, ami des patrons de la marque américaine, le prince monégasque aurait poussé la candidature d’Eugene (ville de l’Oregon aux USA et berceau de Nike) pour les mondiaux d’athlétisme. Nike devenu l’équipementier du club en février 2014 pour 20 millions d’euros sur cinq ans – une somme importante au regard du faible bassin de population dans lequel se situe Monaco –, les dirigeants de l’ASM auraient ignoré l’implication de Tarpenning, ce dernier réclamant en août une commission de 3 millions d’euros. En décembre 2014, Vadim Vasilyev aurait finalement versé à l’Américain 648 000 euros.
Joël Bouzou, administrateur du club et ancien médaillé olympique de pentathlon moderne, serait lui chargé de « vendre l’influence de Monaco au sein du CIO pour débloquer des dossiers sans lien avec les affaires olympiques » selon Mediapart. Au moment de la promotion de la candidature de Paris 2024, son objectif était de faire pression sur le gouvernement français et la Ligue de football professionnel, qui remettaient les avantages fiscaux du club par rapport à ses concurrents de Ligue 1. C’est ainsi que la compensation financière versée par l’ASM a diminué de moitié en un an, passant en 2014 de 50 à 25 millions d’euros. Et dans les négociations, ce sont les « 30 à 40 votes » que Monaco pouvait apporter à Paris 2024 qui auraient été mis en avant, le Palais démentant que cette affaire soit une « initiative individuelle » d’Albert.
19 novembre : les contrats fumeux
Quel est le point commun entre Nicolas Isimat-Mirin, Anthony Martial, Éric Adidal, Ricardo Carvalho, Jérémy Toulalan et Radamel Falcao ? Pour ces joueurs, l’AS Monaco aurait trouvé une solution pour faciliter leurs transfert en contournant les réglementations. Pour les deux premiers, ce seraient des «
contrats de service » pour des missions bidons, qui auraient été signés avec leurs agents pour que ceux-ci puissent toucher une rémunération supérieure aux 10% prévus par les instances. Pour les trois joueurs expérimentés arrivés en 2013, les dirigeants auraient réussi à insérer une clause de prolongation si le joueur disputait plus de 25 ou 30 matchs dans la saison, ce que n’autorise pas la LFP.
Pour le Colombien, c’est la contribution de solidarité due à son club formateur qui aurait été artificiellement abaissée. En payant 10 millions d’euros sur une facture différente des 43 officiellement versés à l’Atlético, le club princier aurait économisé les 500 000 euros, qui étaient dus aux Millonarios de Bogota. Qui portent tout de suite moins bien leur nom.
20 novembre : Vadim tout-puissant
Bras droit de Rybolovlev, Vadim Vasilyev saurait également bien manœuvrer. Le vice-président de l’ASM toucherait directement 10% sur toutes les plus-values réalisées sur les ventes des joueurs. Un joli pactole quand
Transfermarkt évalue les plus-values du club à 410 millions d’euros ces cinq dernières saisons, et que «
Monsieur 10% » devrait à ce moment hériter de 41 millions d’euros. L’ASM pensait être dans le droit de rémunérer ses collaborateurs de la sorte, quand la FIFA ou le LFP se questionnent sur la conformité d’une telle clause.
Un club de Ligue 1 se verrait bien relancer Kolo Muani