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Monaco-City : l’autre match des propriétaires étrangers

Par Nicolas Kssis-Martov
4 minutes
Monaco-City : l’autre match des propriétaires étrangers

La rencontre de ce soir entre Monaco et les Citizens ne se résume pas à un simple choc sportif entre deux clubs en quête de visibilité. C'est aussi le choc de deux logiques profondément différentes dans la façon de penser les investissements dans le foot. Si les pays du Golfe et la Russie ne rivalisent pas véritablement, ces deux puissances essayent pourtant, parfois par procuration, d'exister par ce biais et d'imposer leur présence dans le vieux monde à coups de budgets colossaux et de loges VIP. Il s'agit bel et bien non seulement d'exposer sa richesse, mais aussi de la transformer en puissance. Un enjeu à la fois économique et géopolitique qui traverse les pelouses du continent européen, et rendra le moindre exploit de Kylian Mbappé hautement symbolique.

Toutes les explications ont été avancées pour expliquer l’engagement monégasque du milliardaire russe Dimitri Rybolovlev : fuir la justice suisse mobilisée par une ex-épouse vengeresse pour récupérer une partie de ses biens, obtenir un passeport de la Principauté, une mission commandée en sous-main depuis le Kremlin (une sorte de hacking de luxe), un exil doré loin de menaces mafieuses… Il fallait bien essayer d’éclaircir le mystère puisque tout le monde sait pertinemment qu’il est quasiment impossible de réaliser des bénéfices sur le long terme dans le foot, surtout si l’on vise les sommets de la C1. Or, l’actuelle réussite sportive de l’ASM laisse peut-être entrevoir une autre motivation, beaucoup plus évidente : la volonté de monter en grade parmi la bonne société occidentale, avec, à son bras, une « danseuse » hautement présentable.

Lutte d’influence

Finalement, cette quête de respectabilité, et l’entregent que cela apporte, n’est pas si éloignée des plans secrets du fonds d’investissement d’Abu Dhabi (l’Abu Dhabi United Group) qui possède les Citizens depuis 2008, empilant les centaines de millions de livres sterling pour construire de nouveau un second grand club à Manchester. De tous les FC qui composent son portefeuille foot (à New-York ou en Australie à Melbourne), City affichait une qualité essentielle, une belle carte de visite historique et la prétention à remporter des titres prestigieux, pour résumer l’assurance de pouvoir parader à travers les compétitions de l’UEFA. Il peut sembler basique, voire simpliste de décrypter ce match comme un choc géopolitique, bien sûr non frontal, autrement dit une lutte d’influence entre la Russie, empire en pleine bourre de remontada de son ancien lustre de superpuissance, et des émirats du Golf qui tâtonnent pour trouver leur place dans un monde multipolaire. L’écart de budget du simple au double (au minimum) indiquerait d’ailleurs d’office qui a les moyens de ses ambitions. Toutefois, qui oserait contester que notre foot européen est devenu le théâtre d’ombres et de lumière où l’on vient vérifier son importance, en regardant qui a la plus grosse équipe de janissaires à crampons ?

Car, des bords de Méditerranée aux rives de l’Irwell, les projets se ressemblent plus qu’il n’y paraît. Ils sont le fruit de la volonté d’hommes à la tête d’empires économiques bâtis dans les zones grises du capitalisme mondial, que ce soit la Russie post-soviétique, immense Far West du libéralisme autocratique, et les Émirats, nouveaux riches qui semblent enfin avoir compris que les hydrocarbures n’étaient pas inépuisables. À la différence du Qatar, ou une logique d’État (avec bien sûr le soft power des médias en arrière-plan) prévaut, ou même la Chine où la ruée vers le foot reste supervisée par le Parti communiste, il s’agit dans les deux cas d’initiatives privées. Des initiatives qui vont même, demain, tenter une fois encore de s’asseoir à la table des hautes instances du football.

Une incroyable opportunité de se construire

Monaco raconte ainsi une histoire russe. Celle de ses apparatchiks dont, rapidement, les rêves de gloire en dehors des cercles économiques se sont heurtés à un pouvoir politique fermé, dans un pays où le modèle autocratique remonte à Byzance. Il leur fallut vite savoir trouver d’autres espaces, si possible protégés par des États de droit, pour s’offrir un trône et un peu de reconnaissance à la hauteur du compte en banque. Dimitri Rybolovlev n’est évidemment pas un opposant, cependant il a compris en observant l’exemple de ses camarades oligarques emprisonnés qu’il n’existait pas de marge de manœuvre au pays. L’ASM constitue bien plus que son joyau de la Riviera : c’est une incroyable opportunité de se construire, à l’ombre d’un paradis fiscal, une légitimité et honorabilité que seuls des pays comme la France peuvent apporter. De quoi ouvrir de nombreuses portes.

Manchester City éclaire de son côté la redéfinition continuelle de l’économie du sport professionnel, quand la folie des grandeurs salariales et la flambée des budgets exigea d’autres sortes d’investisseurs. Les flux financiers ne sont jamais innocents, mais révélateurs de la manière dont le capitalisme recompose les rapports de force. La récente arrivée des Chinois dans le capital des Sky Blues illustre que le passage de relais peut aussi parfois se faire en bonne intelligence. Une victoire de l’ASM ce mercredi soir ne redistribuera pas les cartes pour autant. Tout comme Peugeot ne pouvait plus soutenir un grand Sochaux, même simplement en L2, nos camarades de l’Est ne disposeront jamais des ressources infinies de la manne pétrolière et la Russie appartient quelque part déjà au passé de l’élite du foot pro européen. Ce serait peut-être tout le plus beau paradoxe de cette possible qualification monégasque portée par un Jardim qui, cette saison, nous offre une des plus belles équipes collectivistes vues en France depuis longtemps.

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City, la défense immunitaire
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