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- Monaco-Leipzig (1-4)
Monaco, c’était écrit
L'histoire de l'AS Monaco est ainsi faite : une épopée européenne amène autant de bonheur dans ses valises que de déception pour la saison suivante. L'ASM n'a jamais su se remettre du départ de ses stars et des espoirs qu'elles avaient fait naître, quittant la C1 par la toute petite porte. Sans Ligue Europa de consolation.
Le miracle n’aura donc pas eu lieu. Ou plutôt si : le miracle est que Monaco était encore en droit de sourire au coup d’envoi de sa rencontre face à Leipzig. Le miracle, c’est que le FC Porto ne s’était pas imposé sur la pelouse du Beşiktaş après avoir ouvert le score. Le miracle, c’est que l’ASM était la seule équipe des huit poules à être encore en course pour les huitièmes de finales avec seulement deux points en quatre matchs. Lorsque l’on jette un coup d’œil dans le rétro pour revenir il y a trois mois, en août, il devient assez paradoxal de se rappeler que les réactions au tirage au sort des poules étaient à l’époque unilatéralement positives.
Comme l’an passé, Monaco disposait d’un groupe à sa portée. Comme l’an passé, Monaco disposait d’un groupe homogène. Oh, il faudra quand même faire attention à ce déplacement en Turquie, toujours compliqué à aborder. Les Allemands viennent de perdre le coach qui avait fait leur renommée et n’ont pas le semblant d’une histoire européenne, celle de Porto est derrière eux. Bref, l’ASM partait, sur le papier, favorite. Sauf qu’entre-temps, l’ASM avait frôlé le Graal dans une campagne 2016-2017 exceptionnelle, le 100m de sa décennie disputé avec des talents envolés que l’on ne remplace pas en un claquement de doigts, ni en un quart de tour de Terre. Le constat est aujourd’hui simple : l’équipe n’a jamais été au niveau de la réputation qu’elle s’était construite.
Une modification des principes de jeu
Sur le continent européen, l’ASM était crainte pour des capacités qu’elle n’a plus. Sa capacité de projection assassine, portée par Mbappé, Bernardo Silva, Thomas Lemar et Falcao, équilibrait les errements d’une défense aussi perméable que les dents du bonheur de Valère Germain (Monaco n’avait réussi à garder sa cage inviolée qu’à une seule reprise, à domicile contre le CSKA Moscou). Aujourd’hui, les deux premiers sont partis, remplacés numériquement par Keita Baldé et Rony Lopes, le troisième n’est plus que l’ombre du feu follet qu’il était, miné par une entorse à la clavicule droite, et le dernier se bat désormais contre la fatalité comme Don Quichotte le ferait face aux moulins à vent. L’équipe de 2004-2005, elle aussi amputée de Giuly, Morientes, Cissé, Pršo, Rothen, Porato et Ibarra, avait chuté au stade suivant, en huitièmes face au PSV. Cette équipe de Monaco-là n’a plus la force offensive qui faisait son sel, son poivre et tout le reste. Quatre buts marqués seulement en cinq rencontres, tandis que la défense est elle trop cuite, cramée, à l’image de Jorge ou Jemerson qui aura coûté ce soir deux buts en huit minutes.
Retour à la réalité
C’est à l’image du rêve entamé il y a trois ans par Dmitri Rybolovlev, au moment de la vente de James Rodríguez et de l’arrivée de Leonardo Jardim. Il y avait un côté magique à témoigner de ce renouvellement permanent des effectifs, comme le grand requin blanc dispose de plusieurs rangées de dents au cas où celle de devant viendrait à tomber. Le modèle était beau, le modèle était viable, mais cette saison le timing était trop serré. Les recrues sont assez qualitatives pour réussir en championnat, mais Monaco n’a jamais montré en Europe la même envie que celle qui le transfigurait l’an passé, cette envie dévorante de bouffer les espaces, de faire mal, d’enfoncer le clou d’un coup de marteau supplémentaire.
Conséquence, Monaco n’a plus gagné à Louis-II en Ligue des champions depuis le 19 avril dernier, c’était face à Dortmund. Sept mois, quatre défaites et onze buts encaissés plus tard, à Leonardo Jardim d’analyser les faiblesses de son équipe, et nul doute qu’il y parviendra. C’est son job, et il l’a déjà fait. Retour à la réalité des matchs de championnat (puisque l’ASM laisse également échapper la Ligue Europa) et du pragmatisme qu’il lui faut retrouver. Personne n’en rit, personne n’est content, mais personne n’est réellement surpris que le soufflé retombe, c’est consubstantiel à l’histoire de l’ASM. On regrettera simplement que ce soit passé, parce que c’était quand même bien.
Par Théo Denmat