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Moldavie-France : rendez-vous en terre inconnue
En déplacement en Moldavie vendredi soir, l'équipe de France commence sa campagne de qualifications pour l'Euro 2020 avec l'objectif de refermer les failles ouvertes à l'automne.
En fin stratège qu’il est, Didier Deschamps sait que chaque bataille est unique, qu’il faut savoir différencier les aventures. Invité à réfléchir sur l’état de son groupe jeudi dernier, au siège de la FFF, le sélectionneur des Bleus a pris quelques secondes de réflexion avant de s’allumer : « Des qualifications, ce n’est jamais une balade tranquille. Là, vous me posez des questions, mais, vous savez, je m’en pose aussi beaucoup avant… Je ne suis pas là pour tenter des choses. Je suis là pour analyser, réfléchir, et la vérité d’aujourd’hui ne sera pas forcément celle du mois de juin, d’octobre… Ce n’est pas cloisonné. Je n’offre pas de wild card.(…)Ce que je ressens, ce n’est pas de la gratitude, c’est une réalité : on ne peut pas enlever aux joueurs ce qu’ils ont fait l’été dernier, c’est mon raisonnement du moment. Choisir, c’est comparer, analyser la force de l’un en estimant ce qui pourrait être la force d’un autre. Aujourd’hui, si je prends certains joueurs, c’est que j’estime que ça penche encore plus de leur côté que d’un autre, mais je ne suis pas une assurance-vie. » Les Bleus sont de retour aux affaires vendredi et s’apprêtent à démarrer une nouvelle quête, dont le point A s’appelle Chişinău, où l’équipe de France n’a jamais foutu les pieds. Mais comment appréhender la chose ?
Le rebond par l’échec
La dernière fois que ces gars ont été vus ensemble, c’était lors d’une victoire au Stade de France contre l’Uruguay (1-0). Rien d’éclatant, tout le monde était d’accord sur ce point. Ce soir-là, l’essentiel était de se rassurer, quatre jours après une défaite troublante à Rotterdam (2-0) venue réveiller les failles ouvertes lors d’un France-Islande (2-2) joué à Guingamp, en octobre. Une période qui avait surtout vu Hugo Lloris secouer ses potes : « À partir du moment où l’on ne respecte pas les fondamentaux dans le foot, pas d’agressivité, pas d’intensité dans les courses et les passes, qu’on n’est pas prêts à aller au combat, il est difficile d’analyser l’animation offensive et défensive de l’équipe. » Cette semaine, Deschamps en a remis une couche, rappelant à son groupe qu’il lui était interdit de « penser qu’avec ce titre, les choses viendront toutes seules » tout en ouvrant la porte de la gestion de l’après-fête : « Si on a raté ce match face aux Pays-Bas, c’est peut-être aussi parce qu’il y a eu une usure psychologique et physique. À un moment donné, il ne faut pas oublier que ce sont des êtres humains et là, ça a bloqué. » Il paraît que le succès gomme tout, qu’il peut aveugler et masquer les manques. Et la défaite, elle, comment mesurer son poids ? « Tu apprends toujours, surtout dans l’échec, répond le premier entraîneur de France dans L’Équipe jeudi. C’est dans le succès qu’on peut faire les plus grosses conneries. Je veux éviter ça. » À comprendre : si la claque de Rotterdam a été reçue « au pire des moments » (Lloris), elle était bonne à prendre.
Un maçon reste un maçon
L’heure n’est pas à la douleur, c’est autre chose. Dans la tête de Didier Deschamps, la campagne de qualifications qui s’ouvre vendredi soir en Moldavie doit accoucher d’une « évolution » . En matière de joueurs ? Pour l’instant, non, Deschamps préférant pour le moment abattre la carte du « vécu international » (ce que ne peut avoir Clément Lenglet sans être convoqué) et du « groupe » à son sens premier : un ensemble d’individus capables de vivre ensemble sans se tirer dans les pattes. En matière de jeu, alors ? N’oublions pas qui est Didier Deschamps, un « maçon » plus qu’un « architecte » comme il l’expliquait dans le n°100 de So Foot. Résultat, jusqu’à l’Euro 2020, les Bleus ne se chercheront pas un nouvel argumentaire et chercheront avant tout à conserver ce qui a construit leur sacre mondial : « l’état d’esprit, la détermination, la force collective » . C’est tout ? « Il y a eu des matchs pendant la Coupe du monde où j’aurais aimé qu’on subisse un peu moins, mais à partir du moment où les joueurs eux-mêmes se sentaient forts là-dedans… » , poursuit Deschamps dans L’Équipe.
« Deschamps est le meilleur entraîneur du monde »
Si le temps des célébrations est terminé, l’équipe de France ne changera donc pas dans le fond. Il faut s’y préparer. Que verra-t-on en Moldavie, vendredi soir ? Probablement neuf finalistes (Lloris, Pavard, Varane, Umtiti, Kanté, Pogba, Mbappé, Griezmann, Giroud) alignés d’entrée, peut-être un dixième (Blaise Matuidi est en balance avec Kingsley Coman côté gauche), et Lucas Digne, qui profite des absences combinées de Lucas Hernandez et Benjamin Mendy au poste de latéral gauche. Deschamps n’est jamais venu pour bâtir : il est là pour entretenir, mais jusqu’à quand ? La visite à des Moldaves qui s’apprêtent à accueillir « l’adversaire le plus difficile » de leur histoire selon leur sélectionneur, Alexandru Spiridon, et la réception de l’Islande lundi prochain livreront des réponses. En attendant, Spiridon en est convaincu : « Deschamps est un entraîneur très intelligent, le meilleur entraîneur du monde. Cette équipe n’a aucun point faible. » Mais elle a des failles sur lesquelles travailler. C’est reparti pour le grand voyage.
Par Maxime Brigand