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Modou Sougou : « J’ai regardé toutes les aventures du Commandant Cousteau »

Propos recueillis par Mathieu Grégoire
Modou Sougou : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>J’ai regardé toutes les aventures du Commandant Cousteau<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Sougou, so good ? So nice, à coup sûr. Avant de retrouver ce dimanche le club auquel il appartient, l’OM, l’attaquant d’Évian Thonon Gaillard se raconte. L’international sénégalais essaie notamment d’expliquer comment on peut réussir dans le milieu du foot en étant aimé par tous, une performance notable et bien plus délicate qu’un crochet sur Thiago Silva.

L’OM t’a prêté à Évian depuis le mois d’août. Comment vis-tu ces retrouvailles ?

Ce sera un match spécial, j’appartiens toujours à l’OM, je suis resté en contact avec beaucoup de monde à Marseille. Il y aura de l’émotion, c’est sûr, mais je vais mettre les sentiments de côté. Ces derniers jours, je me suis interdit le moindre texto vers Marseille.

Avec quels joueurs échanges-tu le plus régulièrement ?

Avec Kassim (Abdallah), avec Steve (Mandanda), qui me chambre tout particulièrement après les matchs où j’ai raté des grosses occasions. Et puis il y a Lucas (Mendes)…

Lucas Mendes est un solitaire.

Il est parfois un peu seul, oui. Ce n’est pas facile pour lui depuis que je suis parti, car on refaisait le monde en portugais. Dès que je suis arrivé, je me suis mis à côté de lui dans le vestiaire. Il est timide de nature, réservé, il aime rester dans son coin. La barrière de la langue amplifie cela. Il capte tout, mais peine à mettre des mots sur ce qu’il pense.

Le 7 août, en début d’après-midi, tu es au KFC, en contrebas de la Commanderie. À ce moment-là, on t’apprend que tu vas à Évian. Comment est-ce possible, dans un club comme l’OM ?

C’est vrai que je ne savais pas où j’allais. En rentrant de la tournée de matchs amicaux, je suis allé voir Élie Baup dans son bureau, puis José Anigo. Je savais que j’allais être cantonné au banc, et je voulais du temps de jeu ailleurs. À la base, je souhaitais être prêté au Portugal, à Braga par exemple. José m’a sensibilisé au fait de rester en L1, où j’aurais plus de visibilité tous les week-ends. Je lui ai répondu : « Ok, alors à toi de voir pour ma destination ! »

Et tu débarques en Haute-Savoie. Dépaysement…

Je ne connaissais rien de ce club, de cette région. Quelques joueurs de l’OM m’ont vanné : « Le froid va te massacrer ! » Mais on m’a tout de suite mis à l’aise à l’ETG. Je mène une petite vie tranquille, sans trop de pression. Et il ne fait pas si froid que ça !

À la base, plus qu’un choix sportif, on a l’impression que tu as servi de monnaie d’échange dans le transfert de Saber Khalifa…

Peut-être que ça arrangeait l’OM. Mais si j’avais à refaire ce choix cent fois, je le referai cent fois. Je n’allais pas à la mine non plus ! J’avais confiance en José et, je te rassure, avant de signer, Pascal Dupraz m’a expliqué son projet. J’ai été convaincu par cet homme.
Pascal Dupraz, il te dit ce qu’il a à dire, et en face

Tu sembles avoir une relation spéciale avec Pascal Dupraz, pas réputé pour être l’entraîneur le plus affable de L1…

Il y a un rapport d’homme à homme. Au début de l’automne, j’avais retrouvé la forme, je faisais de bonnes rentrées, mais je ne débutais jamais. L’impatience montait, je suis allé discuter avec lui. Pascal Dupraz, il te dit ce qu’il a à dire, et en face. Ce n’est pas un tricheur. Oui, ses mots peuvent choquer, mais c’est quelqu’un d’honnête, de direct. Élie Baup te mettait à l’aise en chambrant, mais il était moins dans le dialogue. On qualifie Dupraz de coach à l’ancienne, moi, je le vois comme un père de famille. Qui va te taper dessus, puis qui va, une heure après, te caresser. Il aime lancer des défis aux joueurs, il sait te donner de l’importance.

À Évian, la concurrence entre joueurs est aussi vécue différemment qu’à l’OM…

Ici, l’autre est derrière toi. C’est simple, nous sommes une équipe moyenne, on sait qu’on n’y arrivera pas sans l’autre. Il faut être soudé. À l’OM, tu as de grands joueurs, qui peuvent faire la différence à tout moment, te gagner un match. Alors l’individualisme est plus facilement toléré.

Qui est le vrai personnage du vestiaire ?

Je suis beaucoup avec Jonathan Mensah, Cédric Mongongu ou Aldo Angoula, qui est un sage. Mais le plus fun, de loin, c’est Eric Tié Bi. Il fait la racaille de quartier, il s’habille comme dans un clip de rap, tu ne comprends pas toujours ses expressions, à se demander s’il parle en français. Il est vraiment marrant.

Et le cadre de vie ?

J’ai toujours une étendue d’eau en face de moi. Avant c’était la Méditerranée, à Cassis, aujourd’hui, c’est le lac Léman qui borde ma maison, à Anthy-sur-Léman. C’est magnifique, mais il n’y a pas de bateaux. À Cassis, quand je m’ennuyais, je sortais mes jumelles, et j’observais la vie sur les bateaux. Tu voyais des trucs incroyables, c’était beaucoup mieux que de regarder la télé ! Je me suis aussi mis à la plongée en 2013.

Pourquoi ?

J’ai toujours été fan du monde sous-marin. J’ai regardé toutes les aventures du Commandant Cousteau sur le Calypso, et même de son fils. Elles me fascinent toujours ! J’ai une prédilection pour les cétacés, les documentaires sur les baleines, les orques. Je viens de recevoir le DVD que j’ai commandé à la FNAC en début de semaine : le festin des orques. Ce sont les cétacés les plus intelligents, ils ont des techniques de chasse incroyables.
Avec Barton, J’ai découvert et apprécié un type sympa, rigolo

Tu as une existence de père de famille rangé. Comment vit-on en marge des tentations habituelles des footballeurs ?

C’est un choix. Je me consacre à 100% au football pendant la saison. En Roumanie, quand j’évoluais à Cluj, j’étais vraiment sur mes gardes. Là-bas, les filles traquent littéralement les joueurs de ballon, elles peuvent te faire dévier de ton chemin. Je connais des footballeurs portugais qui ne sont jamais repartis… Ils ont succombé aux charmes de la Roumanie !

N’es-tu pas trop gentil pour ce milieu ?

Je connais l’expression, trop bon, trop con. Mais j’essaie juste de respecter mon prochain. Je ne me laisse pas marcher dessus pour autant. Je sais marquer mon territoire.

As-tu parfois la rage ?

J’ai eu une rage intense quand je me suis fracturé le tibia, en 2006. Tu vois des matchs à la télé pendant ta convalescence, des mecs courir et frapper, et toi, tu te morfonds chez toi… Avant, quand j’étais remplacé prématurément, j’avais aussi du mal à comprendre le choix de mon coach. Maintenant, je prends le temps de me poser, de me remettre en question aussi.

As-tu aidé Joey Barton à se canaliser ? Il a été étrangement calme à l’OM…

Je connaissais son passé de mec méchant. J’ai découvert et apprécié un type sympa, rigolo. Il m’appelle toujours Modou « Sougougoudougougou » . En fait, il met des –ou partout pour me vanner. C’est un battant, un leader de vestiaire, quand ça n’allait pas, ça se sentait, il bouillait à la mi-temps, nous engueulait, nous transmettait son fighting spirit.

Tu as croisé aussi André Villas-Boas pendant ta carrière, à Coimbra. Est-il surcoté ?

Non. C’est un être d’exception, je sais qu’il a quelque chose en plus. Il est taillé pour les grandes équipes. Il maîtrise tout, ses séances d’entraînement sont ultra-intenses.

Et tu travaillais constamment avec le ballon…

Oui, mais au Portugal, c’est la règle. Pendant une saison là-bas, si tu ne te blesses pas, tu ne mets jamais les pieds dans la salle de muscu. Enfiler des baskets est un geste inconnu !

Une dernière question. Qu’est-ce qui t’es passé dans la tête quand tu as effacé Thiago Silva, avant d’inscrire le deuxième but de ton équipe face au PSG ?

Je vois que c’est lui en déboulant. Je sais son talent, immense, il anticipe tout le temps, il va essayer de me mettre sur l’extérieur en faisant mine d’ouvrir le côté, et là, avec son corps, il me prendra le ballon sans souci. Je fais mine d’aller vers l’extérieur, il commence à faire un pas, et, à toute vitesse, je prends finalement l’intérieur. Mais tu sais, parfois, ça marche, parfois ça ne marche pas. Et puis au Sénégal, les gens n’ont pas retenu ça ce soir-là.

Qu’ont-ils retenu ?

Ils m’ont vu faire la fête et lancer les chansons en slip, et en transe. Dans un état second. Ils se sont demandé : « Mais ça, c’est Sougou ? » Et oui, c’est moi, aussi !
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