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MLS, terre inconnue pour les ténors du banc
Drogba, Gerrard, Giovinco, Kaká, Lampard, Pirlo, Villa… Sur le terrain, les stars ne manquent pas en MLS. Sur les bancs, aucun grand nom du coaching. Déficit de notoriété pour la MLS ? Le résultat plutôt d’une politique assumée.
Chelsea et Manchester City hier, le Paris Saint-Germain il y a peu : en Europe, chaque projet footballistique d’envergure passe obligatoirement par le recrutement d’un ténor du banc, d’un entraîneur incarnant le succès, capable d’emmener son équipe vers les plus sommets hexagonaux et continentaux. Au pays du soccer, la donne est différente. Avec un recrutement encadré par une masse salariale et une politique de trois joueurs désignés maximum par équipe, l’argent est prioritairement investi sur le recrutement de joueurs, stars confirmées ou en devenir. « La culture MLS et les règles en vigueur dans cette Ligue sont ainsi vraiment différentes de ce qui se pratique en Europe. Ce fonctionnement particulier peut être difficile à appréhender pour un entraîneur renommé. Certains nous ont d’ailleurs contactés pour avoir un poste chez nous, mais notre priorité est d’abord de promouvoir de jeunes entraîneurs ayant déjà une forte sensibilité MLS » , déclare Jérôme Meary, représentant de la MLS en Europe, également consultant pour Eurosport.
Le déclic Pat Vieira ?
C’est ainsi que durant la dernière intersaison, Veljko Paunović, ancien joueur de Philadelphia Union et de l’Atlético de Madrid, s’est assis sur le banc de Chicago Fire pour débuter sa carrière d’entraîneur. Un autre rookie a débuté sur le banc de New York City FC (justement contre Chicago ; 3-2) et non des moindres vu de France : Patrick Vieira. Dans le cadre d’un programme d’échange logiquement mis en place par Manchester City et ses clubs satellites (dont NYCFC fait partie), l’ancien capitaine d’Arsenal a en effet pu se rapprocher à de nombreuses reprises de son prédécesseur, Jason Kreis, pour s’approprier les codes et les particularismes du championnat nord-américain. « Il a toutes les cartes en main pour réussir. Il va amener cette touche européenne dans l’organisation au quotidien, dans la gestion de l’entraînement » , pense Damien Perquis, le défenseur français de Toronto FC. « Après, reste à voir s’il va rapidement réussir à imposer sa vision à son effectif. En tout cas, sa signature est un sacré coup de projecteur pour la Ligue » , poursuit l’ancien joueur du Betis Séville. « S’il réussit, ce dont je ne doute pas, Patrick Vieira pourrait bien faire figure d’électrochoc dans l’esprit des propriétaires qui seraient alors certainement moins réticents à confier leurs équipes à des entraîneurs étrangers » , complète Jérôme Meary.
Il ne faut néanmoins pas oublier que les coachs nord-américains ont également des qualités à faire valoir. On pense bien évidemment à l’expérimenté Bruce Arena, sur le banc des Los Angeles Galaxy (et ancien sélectionneur des États-Unis), mais surtout à la nouvelle vague symbolisée par trois hommes : Caleb Porter, champion en titre avec Portland, Jesse March, auteur du meilleur bilan en saison régulière avec les New York Red Bulls, et Greg Vanney, qui a décroché à l’automne dernier la première qualification en play-offs de Toronto FC. « Certains entraîneurs en place font vraiment du très bon boulot. Ils partent régulièrement sur leur temps libre en Europe pour apprendre. Cela permet à leurs équipes ensuite de vraiment progresser » , confie Damien Perquis. Ces exemples de réussite valident l’idée qu’il n’y a pas nécessairement un besoin immense pour les franchises d’aller chercher ailleurs un entraîneur capable de guider une équipe vers le succès.
Laurent Guyot à l’académie de Toronto
Le partenariat avec la FFF signé en 2013 et reconduit en 2015 s’inscrit également dans ce sens. Les patrons de la MLS souhaitent en effet optimiser leur système de formation pour, à terme, bénéficier d’une qualité supérieure de joueurs et d’entraîneurs locaux. C’est peut-être finalement dans ce secteur que les décideurs MLS pourraient facilement accepter l’idée d’un renfort étranger de premier ordre. « Faire venir des éducateurs reconnus est toujours intéressant dans une perspective de développement. Il y a déjà eu le cas de Frédéric Lipka, ancien directeur de centre de formation du Havre ou encore, plus récemment, celui de Laurent Guyot qui vient de prendre en charge l’académie de Toronto après plusieurs années à la DTN. C’est le genre de profil qui peut véritablement aider une franchise à former davantage de talents locaux » , assure Jérôme Meary. S’inspirer pour ensuite créer un modèle de formation sur et en dehors des terrains, la MLS a fait le pari du long terme pour devenir à terme un championnat international de premier plan. On fait les comptes dans 5 ans ?
Par Julien Chapoy