Mihajlovic, nouveau seigneur de Florence

« Moi, je joue pour gagner » . Dès sa première conférence de presse en tant que nouvel entraîneur de la Fiorentina, ce midi, Sinisa Mihajlovic a bien fait passer le message : Cesare Prandelli et son beau jeu qui visait à plaire avant de gagner, c’est définitivement fini. « Je ne dis pas que je travaille mieux que Prandelli. De toute évidence, il a fait du bon travail. Mais moi, j’ai ma manière de travailler, qui n’est pas la sienne » . Ou encore : « Vous les Florentins me plaisez parce que vous croyez être les meilleurs et les plus forts. Exactement comme moi » . Oui, cela s’appelle un changement de style.

L’arrivée du grand méchant Serbe à la tête du club toscan est tout sauf une surprise. Depuis qu’il a gagné plusieurs scudetti d’affilée à l’Inter en tant qu’adjoint de Roberto Mancini – « un job qui permet d’engranger plus d’expérience qu’un poste d’entraîneur titulaire dans un petit club » – puis qu’il est passé par Bologne et Catane, il est communément acquis en Italie que l’ancien défenseur de la Lazio est destiné à prendre une équipe d’importance. Un moment, Massimo Moratti a même pensé à lui pour remplacer José Mourinho à l’Inter. Pourquoi lui ? Parce qu’il jouit d’une bonne cote en Serie A, où il a effectué l’essentiel de sa carrière ; parce que c’est le genre de gars qui se fait obéir de ses joueurs ; et parce qu’avec Catane, il a réussi en quelques mois à assurer un maintien tranquille (13ème place au final) avec un jeu correct, et un attaquant relancé comme jamais (le gros Maxi Lopez). Pas un tacticien de tableau noir, mais un meneur d’hommes hors-pair. A court terme, cela peut porter ses fruits.

Comment jouera la Fiorentina de Mihajlovic ? Le nouvel entraîneur a annoncé la couleur : « Mon schéma préféré, c’est le 4-3-3. Mais je ne suis pas fermé : parfois, nous pourrons évoluer en 4-2-3-1 » . Pour l’aider dans sa tâche, Sinisa le terrible pourra compter sur Gaetano D’Agostino. Le milieu de l’Udinese vient en effet de s’engager pour 10 millions avec la Fiorentina. Pour mémoire, D’Agostino, c’est ce joueur élégant à la De Rossi que le Real Madrid et la Juventus s’étaient arraché en pure perte l’été dernier. Après une saison blanche, il aura enfin la possibilité de montrer ce qu’il vaut dans une grosse équipe. Devant, Mihajlovic compte bien continuer de s’appuyer sur Gilardino, que l’on dit sur le départ : « Oui, je pense que Gilardino restera. Il te garantit 15 à 20 buts par saison, ce serait dommage de s’en passer. Et puis il faut comprendre que la Fiorentina n’est pas un supermarché : les joueurs qui quitteront le club ne partiront pas parce qu’ils le souhaitent, mais parce qu’ils ne rentreront pas dans notre stratégie sportive » . Jovetic restera aussi, dans une position de deuxième attaquant, de meneur ou d’ailier gauche. Bref, tout baigne.

Reste le côté polémique du bonhomme. Mihajlovic, on le sait, traîne une belle réputation. A Florence, sa venue a notamment fait réagir le philosophe Adriano Sofri, lequel a écrit dans La Repubblica qu’il ne trouvait pas très propre de confier une équipe réputée pour son fair play à un « proche d’Arkan et de l’extrême-droite » . Et puis, il y a l’affaire Mutu. En 2003, encore joueur à la Lazio, le Serbe avait craché à la gueule du Roumain lors d’un Lazio-Chelsea. De bon augure maintenant qu’ils vont se retrouver dans le même club ? « Nous nous sommes expliqués il y a longtemps. C’est moi qui avais eu tort, c’est un bon gars, et un grand joueur » , a désamorcé le coach lors de sa conférence de presse. Mais il avait un sourire en coin qui faisait un peu peur.

Stéphane Monteverdi