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Mickaël Le Bihan : « On s’est mis dans la merde »
Si le DFCO est encore en vie en Ligue 2, il le doit en partie à Mickaël Le Bihan (10 buts et 3 passes décisives). L’attaquant de 32 ans, qui n’a jamais exonéré l’effectif de sa part de responsabilité, admet que l’arrivée de Pascal Dupraz a changé les choses. La réception de Bastia, ce samedi, permettra peut-être de confirmer cette tendance.
Dijon, après avoir battu Rodez (1-0), a fait match nul à Quevilly-Rouen (2-2), face à un adversaire meilleur que lui. Mais y avait-il mieux à faire ?
Un point chez le 8e du classement, c’est un bon résultat. Mais je vais vous avouer que nous étions déçus. Pour moi, cette déception est positive. À la mi-temps, alors que nous étions menés 1-0, on aurait signé pour ce résultat. Mais quand on analyse la seconde période, je pense qu’on pouvait obtenir mieux. Cela prouve que la confiance est là. La victoire face à Rodez avait fait beaucoup de bien à tout le monde. Ce match à Rouen, il y a trois semaines, nous l’aurions perdu.
Peut-on donc parler d’effet Dupraz ?
Bien sûr. Quand un nouveau coach arrive, cela crée un électrochoc dans tout le groupe. Ceux qui étaient titulaires avec l’ancien entraîneur se demandent s’ils le seront encore, et ceux qui étaient un peu à la cave se disent qu’ils auront leur chance. Alors, à l’entraînement, tout le monde est à 100 %, tout le monde veut gagner sa place. Depuis que Pascal Dupraz est là, on a pris quatre points en deux matchs, on joue de manière plus offensive. Il y a encore beaucoup à faire, mais l’essentiel, c’est qu’on arrive à prendre des points, que nous sommes toujours en vie (18e), même si nous avons encore quatre points de retard sur Valenciennes (16e).
Pascal Dupraz a remplacé Omar Daf le 3 avril. Quelle est sa méthode avec cet effectif à qui plus grand monde ne semblait accorder de crédit ?
D’abord, c’est un personnage. Il a la voix qui porte et quand il nous rentre dans la gueule, car cela arrive, on l’entend. Mais il ne gueule pas pour nous humilier, nous rabaisser, pour nous manquer de respect. Au contraire. Il nous engueule, nous recadre quand c’est nécessaire, mais derrière, il va nous rappeler qu’il a confiance en nous. Son discours est toujours positif, même s’il sait nous mettre en garde contre tout excès de confiance. Oui, il dégage un sentiment de confiance, mais jamais d’arrogance. Il sait ce qu’il fait, ce qu’il veut, on le voit à l’entraînement, dans le travail tactique. Le coach veut de l’intensité dans les séances. Il y a très peu de temps morts. On sait qu’il ne reste que sept matchs pour décrocher le maintien. Ce sera difficile, car on va presque toujours jouer des équipes mieux classées que nous, et donc plus fortes, à commencer par Bastia, mais je peux vous assurer que tout le monde y croit.
Avez-vous été surpris par ce changement d’entraîneur, alors que le président Olivier Delcourt avait plusieurs fois répété, même quand les résultats étaient catastrophiques, qu’il ne se séparerait pas d’Omar Daf ?
Disons que nous nous doutions qu’il allait peut-être se passer quelque chose, surtout après la défaite contre Pau (0-1, le 18 mars). C’est toujours pareil quand les résultats ne sont pas bons : comme on ne peut pas virer tous les joueurs, ça tombe sur le coach. Mais moi, je veux être clair : les premiers responsables, c’est nous. On s’est mis dans la merde, et beaucoup. C’est à nous de nous en sortir. Je suis arrivé à Dijon à l’été 2021, j’ai déjà eu quatre entraîneurs. Je n’avais jamais connu ça ! J’étais venu pour un projet qui n’est pas celui qu’on vit et on doit se sortir de là. Avec l’ancien staff, la relation était bonne, humainement, Omar Daf est quelqu’un de bien, de droit, de compétent, on travaillait bien à l’entraînement, mais le week-end, ça ne fonctionnait pas.
Ça a marché au moins lors des cinq premières journées, puisque le DFCO était premier ex aequo après un succès à Metz (2-1 en août). Puis tout est parti en vrille le 30 août, à domicile face à Annecy (0-2)…
Je crois que nous étions tout simplement en surrégime ! On s’est vus trop beaux, tout simplement. Je pense que comme nous avions fait une bonne préparation athlétique, nous étions au-dessus des autres en début de saison. Et après… Il y a eu cette défaite contre Annecy, puis une mauvaise série, et le doute s’est installé. Ok, il y a eu des blessures, de la malchance, mais il ne faut pas chercher d’excuses. Des joueurs n’étaient pas à leur niveau lors de certains matchs.
Est-ce que le groupe aurait pu éclater ?
Oui, mais ça n’a jamais été le cas. Je ne vous dis pas qu’il n’y a pas eu d’explications, comme ce jour où nous avions dû annuler l’entraînement, car la réunion qui devait durer dix minutes a finalement duré deux heures. Il y a des joueurs qui ont haussé le ton, qui ont pris la parole. Après des défaites, on dort mal, et ce n’est pas facile de se retrouver le lendemain à l’entraînement. Mais je n’ai jamais senti que ça pouvait partir en cacahuète, car tout le monde avait vraiment conscience de la situation. On s’est réfugié dans le travail. D’ailleurs, si ça avait mal tourné dans le groupe, il n’y aurait sans doute plus d’espoir de se maintenir.
Les supporters ont exprimé leur mécontentement, l’équipe s’est régulièrement fait allumer par la presse, et on peut imaginer que sur les réseaux sociaux, ça ne devait pas être la fête…
Il ne fallait pas s’attendre à des compliments. Les critiques, évidemment, ne font pas plaisir. Elles étaient méritées. Par contre, moi qui suis très présent sur les réseaux sociaux, je n’ai pas apprécié certaines choses. Qu’on critique le joueur et ses performances, pas de problème. Mais quand on s’attaque à la famille, ça ne va plus. Je ne suis pas d’accord. Que des gens soient déçus, c’est normal, mais on ne s’en prend pas aux proches des joueurs. Je vous avoue qu’il m’est arrivé de couper le téléphone pendant deux jours.
Vous avez inscrit 10 buts et délivré trois passes décisives. Vous faites partie des rares joueurs dijonnais à qui on ne peut pas reprocher grand-chose. Dans le sprint final, Pascal Dupraz vous a-t-il demandé de davantage vous concentrer sur votre pur rôle d’attaquant, alors que vous aimez décrocher, participer au jeu et tirer les coups de pied arrêtés ?
C’est vrai que j’aime toucher le ballon, que je ne suis pas un attaquant qui préfère attendre les ballons dans la surface. J’ai parfois joué des matchs sans avoir été beaucoup servi, sans avoir tiré une seule fois au but. Et en effet, comme j’aime décrocher et participer au jeu, il m’arrive de m’éparpiller. Tout cela, je l’ai dit à Pascal Dupraz. Il m’a assuré que j’allais recevoir des ballons, et qu’il préférait que je sois focus sur mon rôle d’attaquant, pour marquer des buts. Comme je suis au service de l’équipe, il n’y a pas de problème. L’important, c’est que j’aide l’équipe à gagner en marquant, en faisant des passes décisives.
Propos recueillis par Alexis Billebault