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Metz – Lens, la première finale de 1998

par Antoine Donnarieix et Émilien Hofman
6 minutes
Metz – Lens, la première finale de 1998

Actuellement à la lutte en L2 pour la montée, Lens et Metz (opposés ce samedi) faisaient la une du football français. C'était un mois avant la Coupe du monde 1998, les deux équipes avaient d’ailleurs terminé à égalité de points à la première place. Retour sur un passé proche qui paraît bien lointain.

Soixante-huit points chacun, mais une victoire de moins pour les Messins. Autant dire qu’ils se souviendront longtemps de bêtes matchs nuls comme celui concédé plus tôt dans la saison sur la pelouse de Cannes, futur lanterne rouge du championnat. Le titre de champion de France 1997/1998 tendait pourtant les bras aux Lorrains solides leaders à cinq journées de la fin. C’était sans compter sur un autre club à la recherche de son premier titre de champion : le RC Lens. Si le PSG et Monaco semblent désormais les seuls à pouvoir régner sur la France, il fut une époque, à la toute fin du XXe siècle, où les grandes équipes n’étaient autres que Lens et Metz. Autres temps, autres mœurs.

La saison : avantage messin

Premier à la fin de la première journée suite à sa grosse victoire contre Auxerre (3-0), Lens va ensuite connaître une baisse de régime qui l’emmènera jusqu’à la 10e place. Metz, de son côté, va rapidement se caler parmi les équipes de tête. Avec Pires, Meyrieu et bien sûr Bruno Rodriguez, les Messins vont prendre trois fois la tête de la D1 avant la trêve et devenir ainsi champions d’automne. En progression générale depuis quatre saisons, Metz étonne la France et semble devenir bien plus qu’une surprise. De son côté, Lens se reprend au début des matchs retours et, bien que discret, reste bien positionné pour une place européenne. Aux 2/3 du championnat, la lutte pour le titre semble se dessiner entre Metz, Monaco, Marseille et le PSG. Mais ces derniers seront les premiers à lâcher après quatre défaites de suite, avant que Metz n’écarte Marseille et que Monaco ne soit défait chez lui par… Lens. À l’aube de la 30e journée, il ne reste que deux champions potentiels, et ils vont s’affronter dans ce qui semble être la finale du championnat.

Le match : chamboulement

Dimanche 29 mars, tout se passe donc au stade Saint-Symphorien où les Grenats s’apprêtent à recevoir Lens. Les deux clubs connaissent des trajectoires inverses, Lens étant en grande forme, alors que Metz montre de plus en plus de signes d’essoufflement. « On s’est préparés comme s’il s’agissait d’un match normal, même si on savait tous que l’enjeu était capital, témoigne Guillaume Warmuz. Et je peux vous dire que Metz nous a mis la pression ! Je me souviens d’un ballon parachuté qui est venu de notre côté, ils cherchaient à ce qu’on s’échauffe le moins possible… C’est de bonne guerre, on va dire. Mais tout ça, on l’avait anticipé. Il fallait jouer notre jeu comme on savait le faire depuis plusieurs matchs, sans se poser de questions. »

Il n’y aura pas vraiment de rencontre, les Lensois, bien meilleurs, vont ainsi ouvrir le score après 23 minutes quand Smicer trouve la tête de Drobnjak. Frédéric Meyrieu, un des meilleurs Messins de la saison, n’a pas pu participer à ce choc. « J’étais suspendu, alors c’était compliqué pour moi d’être en tribune, impuissant, et de ne pas participer au match, en plus face à mon ancien club. C’était d’autant plus rageant que nous avions une équipe capable de battre tout le monde cette saison-là. » Pourtant, Lens continue d’attaquer et c’est le même duo qui va amener le deuxième but quelques minutes plus tard. Mal placé sur la droite, Smicer tente quand même la frappe. Surpris, Lionel Létizi ne peut que repousser, mais Drobnjak, en vrai renard des surfaces, a bien suivi et envoie le cuir au fond des filets. Les Messins ne reviendront pas, au grand bonheur de Jean-Guy Wallemme. « Je me souviens très bien de la fin du match. Quand vous entrez sur le terrain de Saint-Symphorien, le parcage visiteur est situé sur la droite. Autant vous dire qu’il était plein à craquer. Forcément, on est allés les voir après coup, et c’est à ce moment-là qu’on se dit :« Tiens, pourquoi pas aller au bout ? »Autant avant, on ne se prenait pas trop la tête, mais là, ça devenait sérieux. » Et Warmuz de poursuivre : « Ça changeait tout… On passe premiers à quatre matchs de la fin, et ils prennent un gros coup sur la tête : l’état d’esprit dans les deux équipes s’est inversé, les médias nous mettent clairement favoris pour le titre. On avait fait le plus dur, c’est évident. » Lens est désormais leader avec deux points d’avance sur Metz.

La fin : maîtrise lensoise

Si rien n’est fait officiellement, les Nordistes semblent avoir plus qu’un avantage mathématique. Pourtant, Metz va se battre jusqu’au bout, enchaînant trois victoires jusqu’à la dernière journée de la saison. « C’était notre saison la plus aboutie. Nous prenions les matchs sans aucun stress. Nous nous sommes retrouvés leaders et nous voulions absolument remporter le titre » , se souvient, rêveur, Jocelyn Blanchard. Mais dans le même temps, les Sang et Or n’ont pas eu de soucis non plus, la dernière journée sera donc décisive. Face à Lyon, Metz n’a pas le choix, et n’a même pas son sort entre ses mains : gagner et espérer, c’est tout ce qui leur reste à faire. À la 14e minute, Bruno Rodriguez met Metz devant, les sourires apparaissent, surtout que cinq grosses minutes plus tard, Sabri Lamouchi balance une prune dans le but lensois, Auxerre mène 1-0, le titre appartient pour le moment aux Messins.

Et il le sera pendant une grosse demi-heure… Jusqu’au but de Yohann Lachor, qui part tromper Fabien Cool de près. Il n’y aura plus d’autres buts. « Le match se termine, on finit deuxièmes, la pelouse est envahie, les gens chantent et font la fête malgré tout. Moi, à ce moment-là, j’avais envie d’être ailleurs, se morfond Joël Müller. On tape un sprint et on perd pour rien du tout. C’est difficile. Metz sortait de quatre grandes saisons, ça aurait pu être l’aboutissement de tout. » Même déception pour Blanchard : « Quand on est tout prêt du but, c’est certain qu’il y a de gros regrets. Ils sont toujours présents aujourd’hui. La blessure reste. » Revenus dans le Nord, les Lensois vont se rendre à Bollaert aux alentours de 3 heures du matin pour y mettre le feu avec les 30 000 personnes encore debout et qui ont fait le déplacement pour célébrer le premier titre des Nordistes. Le lendemain, lors d’un défilé sur une benne tirée par un tracteur dont le conducteur n’est autre que Gervais Martel, les joueurs seront applaudis par le tout Lens, ce qui fera dire à André Delelis, maire local : « Je n’ai jamais vu autant de monde dans Lens depuis la Libération. »

La suite : Coupe de la Ligue et descentes

La saison suivante, Lens et Metz marquent le pas et se classent respectivement 6e et 10e. En Champions League, les Nordistes réalisent un bon parcours avec en prime une victoire à Wembley contre Arsenal. Mais la compétition n’ayant pas encore ses 32 équipes, seuls les meilleurs deuxièmes accèdent au 2e tour, et Lens n’en fait pas partie. Consécutivement éliminé sans gloire par Helsinki (en Ligue des champions) et l’Étoile rouge de Belgrade (Coupe UEFA), Metz atteindra néanmoins la finale de Coupe de la Ligue, où il retrouvera… Lens. Mais pas de revanche pour la bande à Joël Müller, de nouveau battue sur un but de Daniel Moreira. Par la suite, si Lens résistera encore quelques années au sein de l’élite (et connaîtra d’ailleurs la même mésaventure que Metz en perdant le championnat face à Lyon en 2002), les Grenats vivront eux une chute plus dure pour se retrouver définitivement en L2 à partir de 2008. Les Lensois suivront trois ans plus tard, avant un retour commun en mai ?

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