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Messi, l’erreur de casting ?
La question peut paraître incongrue au vu de l'aura et du talent incomparable du joueur, et pourtant. Depuis son arrivée à Paris, Lionel Messi n'apporte que frustration et nœuds au cerveau, entre deux éclairs de génie bien trop disparates. Un bien faible impact sur le jeu de sa nouvelle équipe qui a sauté aux yeux de tous mercredi soir à l'Etihad Stadium : à chaque fois que l'Argentin s'est refusé à la moindre course sans ballon, tout en ne réussissant pas grand-chose les rares fois où il l'avait dans les pieds.
« Depuis le moment où je me suis exprimé sur mon départ à Barcelone, les gens sont venus dans les rues, sans même savoir si j’allais venir ici, sans que rien ne soir confirmé. » Dès sa signature à Paris cet été, Lionel Messi était parfaitement conscient de l’effervescence immense engendrée par son arrivée. Pendant trois jours, ce sont plusieurs centaines de supporters qui se sont massés au Bourget dans l’espoir de voir atterrir l’Argentin dans la foulée de l’annonce de la fin de son aventure en Catalogne. Une attente à la hauteur de l’aura de la Pulga. Mais surtout bien loin des doutes que cette arrivée soulevait déjà sur l’identité du futur Paris Saint-Germain.
Star system
La question qui brûlait toutes les lèvres était alors : comment faire jouer ensemble Messi, Neymar et Mbappé, voire Di María ? Qu’importe après tout, au vu des noms couchés sur le papier, le résultat serait forcément exceptionnel. Plus de trois mois plus tard pourtant, Mauricio Pochettino cherche toujours une réponse à une interrogation devenue existentielle pour le club de la capitale. Des difficultés particulièrement criantes mercredi soir sur la pelouse de l’Etihad et qui ne sont finalement guère surprenantes : depuis plusieurs saisons déjà, ce PSG-là bégaye sérieusement dès qu’on lui parle d’équilibre collectif, de repli défensif ou de contre-efforts. Pendant ce temps, de l’autre côté des Pyrénées, Léo Messi avait déjà laissé de côté l’idée d’aider ses copains à la perte du ballon avec le Barça. De fait, le trio ne pouvait pas remédier à la situation.
« C’est surtout le travail du coach, assurait d’ailleurs Messi dans une interview pour L’Équipe le mois dernier. C’est lui qui est chargé de trouver le meilleur équilibre, de nous inculquer une idée de jeu et d’organiser notre mouvement collectif. Après, bien sûr, c’est clair pour nous trois qu’on doit être les premiers à défendre lorsqu’on n’a pas le ballon. » On demande encore à voir, tant l’Argentin n’a pas semblé concerné par le moindre pressing face aux Citizens. Alors oui, l’opportunité de faire venir un sextuple Ballon d’or à moindre frais (du moins en matière d’indemnités de transfert) était sans doute trop belle pour la laisser passer, mais les dirigeants parisiens ont préféré continuer d’empiler les stars les unes sur les autres, en espérant que cela crée un jour une équipe cohérente. Une stratégie dont l’équipe commence déjà à payer les pots cassés, malgré une qualification assurée cahin-caha pour les huitièmes de finale de Ligue des champions.
C’est grave, docteur ?
Pire : là où les problèmes d’équilibre étaient attendus – bien que pas nécessairement dans de telles proportions – le remède semblait tout trouvé en la supposée force de frappe stratosphérique d’un tel trio. Raté. Si certains réclament à juste titre encore du temps avant de se faire un avis définitif, le constat est implacable : après trois mois à jouer ensemble, les trois bonshommes sont à des années-lumière de tenir les promesses nées de leur association. « On a de grandes individualités, mais on doit encore apprendre à bien se connaître pour former une équipe, récitait d’ailleurs Messi. Mais je suis persuadé que si l’on parvient à devenir une véritable équipe, ce sera difficile de nous battre. » L’entente entre les individualités Mbappé et Neymar avait déjà porté ses fruits par le passé, mais l’arrivée de l’Argentin a, au lieu de la sublimer, plutôt poussé à brouiller les cartes. Le match contre Manchester City donne une idée des progrès colossaux à réaliser d’ici le mois de février, prochain grand rendez-vous sur le calendrier parisien.
D’ici là, Mauricio Pochettino ou son successeur, s’il venait à abandonner le navire en pleine tempête, devra trouver la recette miracle à des maux qui n’ont que trop duré. Ou au moins, faute de mieux, un antidote permettant d’éviter qu’une qualification en Ligue des champions ne repose sur un triplé de Kylian Mbappé. Fera-t-il alors le choix de poursuivre la fuite en avant dans ce système improbable de sept défenseurs pour trois attaquants en espérant un réveil du récent vainqueur de la Copa América, ou tentera-t-il de trouver davantage d’équilibre, quitte à sacrifier l’un des jouets exposés dans la vitrine ? « C’est quelque chose qui va plutôt se mettre en place naturellement, au fur à mesure des matchs qu’on va jouer ensemble. On va apprendre à se connaître avec le temps », assurait encore la Pulga à propos d’une entente avec ses deux compères qui se fait encore attendre. Alors certes, l’Argentin restera toujours capable de fulgurances, comme il l’a démontré à l’aller face aux Skyblues. Mais sa venue, censée incarner une forme d’aboutissement pour le projet de QSI, ne semble pour le moment destinée qu’à en démontrer les limites. Dans le pire des cas, il restera toujours les étoiles dans les yeux de ceux qui l’ont vu débarquer sur le tarmac du Bourget, un bel après-midi du mois d’août.
Par Tom Binet