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Messi, changement de cap
Adulé par son public, impliqué sur le pré, discrédité par sa presse, devancé par Ronaldo, Lionel Messi vit des journées en forme de montagnes russes. En quête d'un second souffle, la Pulga s'apprête à vivre des mois décisifs.
« Il regarde toujours une vidéo de nous sur internet et il me parle de toi. » Ce « il » , c’est Cristiano Junior, fils de. Et ce « nous » inclut Cristiano Ronaldo et Lionel Messi. En bonne diplomate – ou reine de la com’ – qu’elle est déjà, la progéniture du triple Ballon d’or portugais a réussi à rassembler les meilleurs ennemis de la planète football. Une phrase, lâchée juste avant le gala organisé par la FIFA à Zurich ce lundi, qui n’aurait sûrement pas filtré lors de la gloire sans partage de l’Argentin entre 2009 et 2012. Un signe d’un changement d’époque, aussi relatif soit-il, qui n’est pas favorable au désormais « second meilleur joueur du monde » . Ce qui a pu paraître comme un léger coup de mou de Lionel Messi en 2013 relève finalement d’une passation de pouvoir avec CR7 le Merengue. Brutalement, il est descendu de son piédestal. Sa situation actuelle au FC Barcelone en témoigne : Léo n’est plus intouchable. Même parler d’un futur transfert n’est plus tabou. Son prix astronomique ne rebute pas les super-puissances de Premier League, et la direction de Bartomeu semble ouverte au dialogue. Alors Lionel, comment vas-tu te relever de tout ça ?
Le remède par un retour aux sources ?
Depuis sa mise au ban(c) face à la Real Sociedad et sa gastro polémique qui s’en est suivie, Lionel Messi aurait trimbalé son spleen toute la semaine dernière durant. C’est la presse catalane qui le dit. Ainsi, sa relation supposée conflictuelle avec Luis Enrique a trusté toutes les Unes des quotidiens Mundo Deportivo et Sport, pour ne pas les citer, avant le choc face au tenant du titre. Un 3-1 face à l’Atlético de Madrid plus tard, la Pulga a tenu à remettre les pendules à l’heure : « J’ai tout entendu ici, et normalement je ne démens rien. On a dit que j’avais une mauvaise relation avec Guardiola, avec Eto’o, avec Bojan. Et ce n’est pas vrai, je n’ai pas demandé à ce qu’ils virent l’entraîneur. Cela me fait mal parce que c’est sorti de Barcelone, de gens qui se disent supporters, et non de Madrid, comme ça a déjà pu être le cas. Il y a des gens qui veulent faire du mal au club. » Une sortie face caméra qu’il a pu se permettre grâce à une prestation XXL. Le Camp Nou en avait presque perdu l’habitude : pendant 90 minutes, l’enceinte blaugrana a été suspendue aux accélérations et à l’intensité imposées par son Messi.
Plus qu’une réponse aux critiques, Lionel Messi s’est rappelé au bon souvenir de son poste originel. En ailier droit, il a bouffé tout cru le pauvre Jesús Gámez, titulaire pour la seconde fois de la saison en Liga. Sa ligne de statistiques affiche un pion et un caviar, mais c’est bien son respect des consignes, son implication retrouvée et son rôle d’ailier droit qui ont frappé. La comparaison étant inévitable, son éloignement de l’axe est à l’opposé total du recentrage de Cristiano Ronaldo dans le Real Madrid à la sauce Ancelotti. Personne ne peut prédire si Luis Enrique alignera de nouveau la Pulga sur l’aile droite, mais Tata Martino a lui déjà annoncé la couleur. Dans son Albiceleste, « Messi jouera en ailier droit » . Un choix que l’ancien coach du FCB explique par l’abondance de 9 et l’absence de joueur de couloir. « Jouer ailier droit est une chose relativement nouvelle pour moi, parce que dans mes premières années à Barcelone j’y jouais, mais si cela convient à l’équipe, je n’ai pas de problèmes pour m’y adapter » , a juré l’intéressé. À Barcelone, entre l’éclosion définitive de Neymar et l’intégration de Luis Suárez, une telle option est clairement envisageable.
L’enjeu politique de juin
Reste alors à gérer la folie qu’annonce cette fin de saison. Indépendamment de ses envies, Lionel Messi a déjà été annoncé à Londres et Manchester contre un butin à la Fort Knox. Des bruits de couloir, vérifiés ou non, qui seront au cœur des élections présidentielles anticipées de juin prochain. Josep Bartomeu, aujourd’hui président et ancien de la clique de Rosell, est tout sauf un proche du clan Messi. Joan Laporta, pas encore candidat, mais déjà favori, fait toujours de la Pulga son chouchou. Dans ce poker-menteur, le natif de Rosario va devoir prendre ses cojones à deux mains et informer de ses souhaits les différents prétendants au trône. Entre un envol vers d’autres cieux ou une prolongation de son idylle culé, sa carrière va devoir redécoller sur un projet plus sain – que son paternel délaisse les affaires économiques du fiston ne serait pas la plus mauvaise des idées… Même Cristiano Ronaldo lui a lâché un petit mot doux à Zurich, en avouant qu’il aimerait « bien jouer avec Lionel Messi » . De là à l’imaginer en Figo 2.0… Histoire de rester une girouette, la presse catalane explique elle dans ses éditions matinales qu’il est impossible de s’acheter Messi. Le fameux sens du vent que Lionel ne doit pas suivre pour régner de nouveau sur le Royaume du ballon rond.
Par Robin Delorme, à Madrid