- France
- PSG
Randal Kolo Muani, puisqu’il devait en être ainsi
En signant au bout du suspense à Paris, l'ancien Nantais est enfin arrivé au sommet que ses exploits depuis trois ans méritaient.
Samedi 2 septembre, 0h30 : officialisé par le Paris Saint-Germain le dernier soir du mercato, une demi-heure après le gong, Randal Kolo Muani est décidément fait pour surgir par des trous de souris, quand on ne s’y attend plus. Snobée par les centres de formation quasiment jusqu’à 17 ans, révélée aux yeux de tous à 22, appelée pour la dernière Coupe du monde une semaine après tout le monde, transférée dans un top club européen l’année de ses 25 balais, la flèche aux trois lettres a toujours pris son temps pour arriver, à chaque tournant de carrière, là où elle doit arriver. Néanmoins, c’est quatre par quatre que l’attaquant grimpe les marches quand on lui en donne l’occasion. D’abord à Nantes, où l’on se souviendra longtemps de ses gambettes, de ses deux exercices canon (81 matchs, 23 buts, 16 offrandes), de son rôle dans le maintien arraché in extremis en 2021, de son association avec Ludovic Blas et de la Coupe de France rapportée dans la cité des ducs de Bretagne ; mais aussi à l’Eintracht, où il n’a pas eu besoin de pédiluve pour nager dans des eaux nouvelles (celles de la Bundesliga), sauter dans le grand bain de la Ligue des champions et prendre la vague (46 rencontres, 23 pions, 17 passes décisives, une superbe entente avec Daichi Kamada ou Mario Götze, une irrésistible campagne de Pokal achevée en finale, un huitième de C1 et les éloges de ses pairs) ; et enfin en équipe de France, où Didier Deschamps n’a pas regretté de l’avoir emmené au Qatar en remplacement de Christopher Nkunku (au vu de ses deux entrées d’anthologie en demies contre le Maroc puis en finale face à l’Argentine) et en a fait un titulaire depuis.
💬☝️ « 𝑱𝒖𝒔𝒕𝒆 𝒂̀ 𝒕𝒆𝒎𝒑𝒔 »
❤️💙 #WelcomeKoloMuani pic.twitter.com/j204ozV4TQ
— Paris Saint-Germain (@PSG_inside) September 1, 2023
Poker menteur et piquet de grève
Il a fallu batailler à tous les étages pour que Kolo Muani renoue avec la région parisienne, lui qui a vu le jour à Bondy et a été façonné en Seine-Saint-Denis (Villepinte, Tremblay-en-France ou même Neuilly-sur-Marne) et Seine-et-Marne (Torcy). Le joueur a toujours plu au PSG : il faut dire que face à son nouvel employeur, il a toujours brillé ou presque, ayant connu trois succès pour deux défaites et signé trois buts contre le club de la capitale, avec des performances mémorables le 15 mars 2021 au Parc (1-2) et le 19 février 2022 à la Beaujoire (3-1). Pourtant, les négociations ne sont devenues concrètes qu’à la fin de la période de transferts, et c’est une fois les dossiers Ousmane Dembélé et Bradley Barcola bouclés que Paname s’est attelé à faire venir le buteur, après avoir eu la confirmation que Kylian Mbappé ne mettrait pas les voiles. Tombé d’accord avec RKM plus de dix jours auparavant, Paris s’est heurté à la gourmandise des Adler, qui comptaient bien rentabiliser au maximum la venue gratos du crack, un an plus tôt. 60, 70, 90, 100 millions ? Avec ou sans le pauvre Hugo Ekitike dans le deal ? Le club francilien n’a jamais réussi à faire plier son interlocuteur avant le 1er septembre, alors que Kolo Muani avait posé le piquet de grève en séchant l’entraînement de sa formation (plaidant que son club ne tenait pas ses promesses) et ne s’imaginait plus reporter le maillot qu’il a étrenné en 2022-2023 et sous lequel il avait déjà marqué trois fois en ce début d’exercice : s’il n’a jamais clamé un quelconque amour pour le Paris Saint-Germain, il était déterminé à faire du Parc des princes (où il se souvient d’un Challenge Orange disputé avec Torcy*) son nouveau jardin. Puis on a tout entendu, au fil de la plus longue journée de l’année, pendant que l’intéressé patientait dans la Ville Lumière.
Revivez la première soirée de 𝐑𝐚𝐧𝐝𝐚𝐥 𝐊𝐨𝐥𝐨 𝐌𝐮𝐚𝐧𝐢 au Paris Saint-Germain ! 🔴🔵🎥#WelcomeKoloMuani pic.twitter.com/kMcAipwcZJ
— Paris Saint-Germain (@PSG_inside) September 2, 2023
Paris a proposé le bon prix aux yeux des Allemands, à l’heure du déjeuner, puis subi une douche froide en apprenant que l’Eintracht voulait trouver un remplaçant avant le buzzer, qui sonnait à 18 heures outre-Rhin. Ce remplaçant aurait pu être Ekitike, mais l’ancien Rémois ne se voyait pas s’installer à Francfort-sur-le-Main et s’asseoir sur son juteux contrat dans la capitale. Il s’est donc dit, au moment du goûter, que le transfert avait capoté… Mais contre toute attente, l’Eintracht a stoppé sa partie de poker et ramassé le joli chèque proposé, se résignant à laisser partir sa pièce maîtresse. Comme expliqué par le directeur sportif Markus Krösche, dans un communiqué froid à souhait : « Nous aurions aimé garder Randal plus longtemps chez nous et nous avions toujours communiqué dans ce sens au cours des dernières semaines. Finalement, l’évolution des dernières heures et les paramètres économiques avec des revenus records pour l’Eintracht, grâce au transfert du joueur, ont été décisifs. […] En fin d’après-midi, au vu de l’offre proposée, nous avons fait savoir qu’il n’y avait aucune base pour un accord et que nous continuions à poursuivre nos plans avec Randal Kolo Muani. Tard dans la soirée, nous avons reçu une offre qu’on ne pouvait pas refuser d’un point de vue économique dans l’intérêt de l’Eintracht. »
Randal Kolo Muani verlässt Eintracht Frankfurt.
Der französische Angreifer wechselt mit sofortiger Wirkung in sein Heimatland zu Paris Saint-Germain.#SGE
— Eintracht Frankfurt (@Eintracht) September 1, 2023
Ainsi, Nasser al-Khelaïfi et ses copains ont pu annoncer l’arrivée de leur dernier renfort « juste à temps », c’est-à-dire au début de la nuit. Une deuxième saison du côté du siège de la Banque centrale européenne aurait ressemblé à un pas en arrière pour RKM, même si sur le même plan, ne pas avoir quitté Nantes à l’été 2021 avait été fructueux. Cette nouvelle étape va encore faire grimper le curseur pour l’avant-centre : après une équipe de National où il est devenu un vrai joueur de football (Boulogne-sur-Mer) un club de deuxième partie de tableau de Ligue 1 où il a explosé (Nantes) puis un outsider du championnat allemand avec qui il s’est transformé en machine de guerre (Francfort), il signe jusqu’en 2028 dans une institution où ne pas gagner les trois trophées domestiques est une erreur professionnelle, où l’on démarre une saison pour soulever la coupe aux grandes oreilles et où il faudra chiffrer niveau statistiques, même dans l’ombre d’un Kyks avec qui il a déjà pu faire naître une certaine complicité en Bleu. Plus grosse vente de l’histoire de Francfort et plus grosse dépense parisienne (95 millions d’euros, somme communiquée par le club allemand) depuis Mbappé et Neymar, l’international français est devant un défi à la hauteur de son talent, alors que son concurrent s’appellera Gonçalo Ramos et qu’une ligne d’attaque estampillée équipe de France (avec KM7 et Dembouz) s’offre désormais à Luis Enrique. En attendant, le néo-Parisien est forfait pour le déplacement sur la pelouse de l’OL ce dimanche, à cause d’une cheville fatiguée. Espérons pour lui que ce ne soit pas le début d’une trajectoire à la Renato Sanches.
Par Jérémie Baron
(1) Pour Sofoot.com, en octobre 2021 : « J’y suis allé une ou deux fois (au Parc des princes). J’avais fait le challenge Orange, où tu devais marquer. C’était kiffant ! J’avais marqué, j’étais avec Torcy. La saison dernière, c’est dommage qu’il n’y avait pas de public, c’était le seul problème. C’était une belle émotion. »