- Coupe du monde 2018
- Bilan
Mercadal : « Tu peux douter par amour »
Pas convaincants pour un sou lors de la phase de poules, les Bleus sont montés en puissance jusqu'à la finale, remportée 4-2 contre la Croatie. Le nouvel entraîneur du Stade Malherbe Caen, Fabien Mercadal, analyse la Coupe du monde de l'équipe de France.
Quel est votre sentiment après ce sacre des Bleus ?Je suis très content. Fier de ce qu’ont réalisé le staff et les joueurs. C’est une source d’inspiration, aussi. Sur la finale, le fait de mener 2-1 à la mi-temps sans avoir réussi d’action construite, c’est à l’image de la Coupe du monde des Bleus. On en revient à la facette pragmatique de cette équipe. Didier Deschamps a réussi à valoriser au maximum les individualités fortes plutôt que de construire une identité collective, un projet de jeu. Dans ses compositions, il a permis à Mbappé de ne pas défendre, à Pogba de se projeter. Et quand tu marques sur coup de pied arrêté, c’est parce qu’il a mis des joueurs grands dans toutes les lignes et un bon frappeur comme Griezmann. Pragmatique. On peut retourner le truc dans tous les sens, c’est ce qu’il en ressort.
Est-ce qu’en poussant le bouchon, sur cette finale, on peut voir une victoire au rabais face à une équipe qui s’est écroulée en seconde période ?Non, tu as gagné la Coupe du monde ! Tu es passé par les qualifications, c’était long, tu as battu une grande Belgique ! Ce France-Belgique, c’était une première finale. J’ai pris énormément de plaisir à voir jouer la Belgique et cette Croatie technique. En finale, les Croates étaient certainement fatigués, mais moi, j’ai adoré cette équipe ! C’est un petit pays, je suis sensible à ce qu’ils ont réalisé. Avec ce côté résilient, de renverser les situations lors des tours précédents, pour les Croates, cette finale, c’était déjà une belle victoire.
Est-ce que c’est l’un des moins bons matchs de la France depuis le début du tournoi ?On ne peut pas le définir comme tel. À la fin, Deschamps a dit que les Bleus n’ont pas fait un grand match, mais qu’est-ce qu’un grand match ? Pour moi, un grand match, c’est faire mal à l’adversaire. La Croatie a jeté son venin d’entrée parce qu’ils savaient peut-être qu’ils n’avaient pas les jambes pour aller au bout. On a tourné à la mi-temps avec un score heureux, mais après la pause, petit à petit, la Croatie a explosé athlétiquement.
Quels sont les joueurs tricolores à ressortir de cette Coupe du monde ?Est-ce que j’ai besoin de te le dire ? (Rires.) N’Golo Kanté, bien sûr ! Sur l’ensemble de la compétition – et je trouve qu’il n’a pas été si mauvais en finale. Il faut noter qu’il a pris un carton, donc derrière, il a voulu s’assurer de ne pas en prendre un second. Kanté pour l’ensemble de son œuvre ; Mbappé, il fait tellement peur ; et Pogba, pour sa capacité à résister à la critique, tout comme Deschamps.
S’il fallait retenir un choix fort de Deschamps ?De maintenir Pogba et Giroud contre la vindicte populaire. Pavard et Hernandez n’étaient pas les latéraux prévus, mais le sélectionneur les a maintenus jusqu’en finale. La finale de Giroud ? Il sert au jeu. On juge un attaquant sur les buts qu’il marque. OK, il ne marque pas, mais il permet aux joueurs autour de lui de s’exprimer. Avec Giroud, sur du jeu direct ou un deuxième ballon, tu peux te retrouver très vite proche de la surface adverse. Ce n’est pas très beau, mais moi, je trouve ça précieux.
Quel a été le moment charnière dans ce parcours des Bleus ?Finalement, c’était le fait de sortir des poules sans être bons ! Les joueurs ont dû se poser beaucoup de questions, et la réussite du staff, ça a été de ne pas les laisser douter. Quand nous, les supporters, les médias… avons douté – et tu peux douter par amour –, le staff les a protégés de ce qui se disait à l’extérieur. Et on sentait chez les joueurs qu’il n’y avait pas de doute. Comme une machine de guerre.
Propos recueillis par Florian Lefèvre