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Megan Rapinoe : Mother’ soccer

Par Nicolas Kssis-Martov
Megan Rapinoe : Mother’ soccer

Donald Trump va sûrement devoir faire avec. Le soccer n’est définitivement pas un sport pour lui. Cette fois-ci, la faute en incombe à Megan Rapinoe, une joueuse lesbienne et « liberal ». Tout ce qu’il déteste. Sauf qu’en 2019, c’est elle qui a rendu l’Amérique « great ». Ou comment le football version européenne est devenu le pire ennemi du président américain et possède désormais le visage souriant de la victoire.

C’est donc officiel : Megan Rapinoe, la star de la dernière Coupe du monde en France, l’architecte de la victoire US, tiendra parole. Elle n’ira pas « s’exhiber » à la Maison-Blanche et surtout pas aux cotés d’un Donald Trump qu’elle critique constamment. Elle affirme que la plupart de ses coéquipières suivront le mouvement.

Sa cohérence l’honore, mais quelque part, son positionnement incarne surtout l’aboutissement du long processus qui a toujours posé le curseur du ballon rond un peu à part, à la marge, dans le grand spectre des sports US. Toutes les comparaisons qui peuvent être dès lors établies avec notre situation française (un Kylian Mbappé qui refuserait de se rendre à l’Élysée en raison de l’abandon des banlieues ou des violences policières par exemple) tombent forcément à plat si l’on perd de vue cette perspective historique.

Quand les filles de Barack Obama voulaient rencontrer Messi

L’Oncle Sam a façonné son identité nationale sur des inventions ou des adaptations athlétiques : le base-ball, le foot US, le basket… L’intégration des nouveaux arrivants dans le rêve américain consistait aussi à s’y rallier en laissant ses anciennes passions dans ses bagages ou sur le bateau. Le parti communiste tenta certes entre les deux guerres de lancer son « Labor Sport Union » en utilisant le soccer pour recruter chez les immigrés du Vieux Continent. En vain. Après guerre, notre foot peine à s’implanter, et offre une image très « cosmopolite » , comme en témoigne la sélection ricaine à la Coupe du monde de 1950, emmenée par un Allemand, Walter Bahr, qui a recruté un jeune Haïtien du nom de Joe Gaetjens, naturalisé à la hâte (il sera tué en 1964 par les Tontons Macoutes qui font le sale boulot des Yankees dans son île).

Ce seront les femmes qui lui écriront finalement ses lettres de noblesse et lui feront gravir les difficiles marches du panthéon étoilé. Des femmes principalement issues des classes moyennes et éduquées, qui s’enticheront d’un sport mondialisé dont les centres de gravité se situent en Europe et en Amérique du Sud, épinglant dans leurs chambres d’adolescentes des idoles italiennes, françaises, argentines… Le sport des filles de Barack Obama qui voulaient tant rencontrer Lionel Messi.

Le soccer et la convergence des luttes

Le conflit actuel n’est donc pas un épiphénomène. On a même du mal à en mesurer l’ampleur. Imaginez ainsi que la très institutionnelle Fédération US a bâti son dossier de candidature pour le Mondial 2026 en association avec le Canada (le « cauchemar » gauchiste de Donald Trump, juste à ses frontières) et le Mexique, alors que la Maison-Blanche mène la terrible bataille de son mur de la honte. Ce n’est pas une fracture politique, c’est presque un choc de civilisation.

Le clash avec Megan Rapinoe outrepasse de la sorte presque, dans sa portée, le geste de Colin Kaepernick, footballeur US qui avait refusé de se lever durant l’hymne national pour protester contre le traitement réservé aux afro-américains (Rapinoe lui avait d’ailleurs témoigné sa solidarité), isolé et confronté ensuite à un univers sportif très conservateur qui lui fit payer cher sa prise de position. Megan Rapinoe illustre une logique profonde, à laquelle elle donne un visage et une parole, en outre celle d’une gagnante, qui réaffirme régulièrement son patriotisme. Le soccer se retrouve au cœur d’une forme de convergence des luttes, juste après une Coupe du monde, imprégnée culturellement de thématiques féministes, et alors que se produit un regain des revendications LGBT ou des minorités ethniques.

« Vous excluez les gens qui me ressemblent »

Comme elle l’a affirmé face caméra sur CNN – son président étant sûrement en train de gazouiller en matant Fox News : « Je pense que je dirais que votre message exclut des gens. Vous m’excluez. Vous excluez les gens qui me ressemblent. » Trump, l’homme qui a remporté son élection en clivant le pays comme rarement depuis la Guerre de Sécession, avait déjà répondu avant sur Twitter : « Megan(Rapinoe) ne devrait jamais manquer de respect à notre pays, à la Maison-Blanche et à notre drapeau, surtout depuis que tant de choses ont été faites pour elle et l’équipe. » Faites certes, mais par qui ?

Une vraie question qui se pose : doit-on se réjouir ou s’inquiéter que désormais, la principale opposante à la plus puissante mèche blonde qui soit s’appelle Megan Rapinoe ? Les démocrates, qui peinent à se trouver un candidat capable de conjurer une réélection, l’ont compris. L’équipe est invitée au Sénat par leur groupe parlementaire. Chuck Schumer, sénateur de New York, s’est dit, mardi, impatient de recevoir « ces femmes inspirantes » . Cela ne devrait-il pas être le contraire ?

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