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McDonagh : « Christopher Walken, c’est mon George Best »
« Je suis mille fois meilleur que cet enculé de Shakespeare! » Avant de craquer dans le New York Times et de se lancer dans le cinéma - Six Shooter (Oscar du meilleur court-métrage de fiction), Bons baisers de Bruges et le tout nouveau 7 psychopathes - Martin McDonagh s'est formé par le théâtre, dont trois trilogies de pièces et le London Critics Circle Theatre Awards du dramaturge le plus prometteur en 96. Et, aussi, le football : « Je rêve d'un match qui commencerait avec Christopher Walken en voix off qui dirait "Il était une fois…" et qui laisserait le match se dérouler, ça serait formidable, non ? » Plutôt…
Avez-vous tâté le cuir sur le tournage de 7 psychopathes ?
Non, on a plus joué sur Bruges. Là, c’était le bordel avec les assurances : le moindre type qui se serait tordu la cheville, ça aurait pris des proportions incroyables. Mais on a parlé foot, oui : le père de Colin Farrell a été joueur pro en Irlande. Honnêtement, il faudrait que je rejoue avec Colin, je crois que je le boufferais. Sur un tournage, je me rends compte que j’ai pris ces tics d’entraîneur, pas comme Ferguson qui gueule tout le temps, mais plus comme des entraîneurs discrets avec les remplaçants, qui expliquent très précisément ce qu’ils veulent, en face à face. Avec Christopher Walken, c’était beaucoup plus simple. J’ai commencé par lui parler avant une prise et il m’a dit : « Non, non, non, s’il te plaît, ne dis rien, laisse-moi faire et à la fin, tu choisiras la meilleure prise, ok ? » Ce type, c’est mon George Best : il propose des trucs que les autres ne font pas, est dans sa bulle, ne parle pas beaucoup, mais sourit de manière très mystérieuse…
Les tribunes, ça vous parle ?J’ai fait pas mal de déplacements pour suivre la sélection irlandaise : je suis allé à Lisbonne pour siffler Figo, et en Andorre aussi, on s’est bien marrés… C’était sympa : je me suis rendu compte que je pouvais avoir une fierté nationale, que je n’ai absolument pas en dehors du football. C’est tout l’inverse de la bière : je peux être bourré pour plein de raisons, mais pas pour du football, je préfère regarder un match sobre. Les Irlandais qui voyagent sont beaucoup plus cools que les Britanniques, il n’y aucune animosité. En même temps, avec l’équipe qu’on a, ce serait malvenu…
L’équipe d’Irlande aurait-elle dû aller à la Coupe du monde 2010 ? Non, évidemment que non, on était franchement mauvais, on se serait fait bouffer lors des trois matchs de poule… Dernièrement, on se prend 4-0 contre l’Espagne sans avoir absolument rien tenté et Trapattoni reste en place, ça me rend dingue. En même temps, ça ne m’étonne pas trop : le virer nous coûterait 2 millions d’euros, donc il ne reste plus qu’à attendre. Mais il faut être clair : le problème n’est pas qu’il soit étranger. On a quand même eu Jack Charlton pendant neuf ans, et il n’a rien su faire avec la génération de Roy Keane qui était loin d’être la plus mauvaise… Non, notre drame, c’est qu’on n’a jamais eu de bon sélectionneur, d’où qu’il vienne. Pour revenir à ce fameux France-Irlande, le problème avec la main d’Henry, c’était que le type avait l’air droit et honnête et pratiquait le football que j’aime. Je regarde, bref, du football dramatique sur lequel il y a des trucs à dire et à vivre, genre tous les Chelsea-Barcelone en Ligue des champions. Et puis, il y a Drogba : il est très dense, physiquement personne ne le dégage quand il est planté dans le sol, mais il est aussi très sensible et peut finir par se plaindre avant de tomber comme un bébé au moindre contact… Roy Keane, dans le jeu, c’était très intense, mais en dehors aussi. Je crois qu’il était vraiment comme ça. Encore aujourd’hui, il faut le voir répondre aux journalistes, il a toujours l’air d’être dans l’urgence.
Actuellement en salles : 7 psychopathes (1h 50min), réalisé par Martin McDonagh, avec Colin Farrell, Woody Harrelson, Abbie Cornish, Christopher Walken, Tom Waits…
Propos recueillis par Brieux Férot