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M’Bolhi, partout et nulle part
Trente ans dont onze passés au niveau professionnel, onze clubs dans sept pays différents, 50 sélections avec l’Algérie et zéro titre : le nouveau gardien du Stade rennais possède un parcours singulier. Et rebondit toujours où on ne l’attend pas.
Il s’agit sûrement des deux pics de sa carrière. Les seuls moments où son talent s’est totalement exprimé. La période où le monde entier a fait sa connaissance, aussi. Durant la Coupe du monde 2010, l’Algérie termine bonne dernière de sa poule, mais Raïs M’Bolhi, son dernier rempart, réalise deux performances de haute volée. Si le gardien cède contre les États-Unis après avoir repoussé l’échéance pendant 90 minutes, il tient tête à l’Angleterre, obtenant un joli clean sheet, et est élu meilleur gardien de la phase de groupes.
Quatre ans plus tard, le portier, qui s’est laissé pousser la barbe, remet ça. Au Brésil, M’Bolhi sort le grand jeu, surtout contre l’Allemagne en huitièmes de finale (il en est d’ailleurs l’homme du match), et réalise pas moins de vingt arrêts au cours de la compétition (pour sept buts encaissés, quand même), provoquant l’admiration de ceux qui ne savaient rien de son existence auparavant. Pourtant, son nom avait déjà énormément circulé dans le monde du football avant ce tournoi international.
À Manchester, par exemple, on avait déjà vu sa tête en mai 2010, quand le garçon est venu faire des essais pour rejoindre United (qui ne donnera finalement pas suite, préférant Anders Lindegaard). Quelques mois plus tard, c’est Newcastle qui s’intéresse de manière encore plus concrète au gardien élu meilleur joueur du championnat bulgare à son poste en 2009. Il évolue alors au Slavia Sofia, un club qui refusera l’offre d’environ un million d’euros provenant des Magpies, et qui préférera prêter le bonhomme au rival du CSKA Sofia. Des surprises de ce genre, Raïs en a offert beaucoup durant sa carrière.
Avant d’arriver à Rennes pour remplacer Paul Nardi en tant que doublure de Benoît Costil, le Parisien d’origine a été formé au Paris FC puis à l’Olympique de Marseille, où il n’aura jamais eu sa chance en équipe professionnelle. Commence donc un tour du monde impressionnant pour lui : Écosse, Grèce, Japon, Bulgarie donc, Russie, France, États-Unis, Turquie… Sa deuxième expérience à l’étranger, en Grèce, sera la plus difficile, comme il l’explique dans des propos relayés par RMC : « La Grèce, ça m’a choqué. On te traite de sale noir. Tu marches dans la rue, les petits courent vers leur mère en criant :« C’est qui ça ? Il y a un monstre dehors ! »Et je n’en rajoute pas. Sur le moment, ça te fait vraiment mal. Mais ce sont des expériences qui font qu’aujourd’hui, le moral est en barbelés. »
Des retrouvailles avec Gourcuff
Sur le terrain, celui qui a commencé à jouer avec les Fennecs en 2010 sans jamais s’être rendu en Algérie – et qui compte également sept sélections en équipe de France de jeune – ne fait pas toujours l’unanimité. Au Gazélec Ajaccio, où il est resté quelques mois en 2013, certains refusent même de parler de lui. Au contraire de Noui Laïfa, qui a joué avec M’Bolhi et qu’il considère comme un « frère » dont il ne dit que des bonnes choses : « C’est un super gardien. Il ne fait quasiment jamais de boulettes. Il est complet et est vraiment bon dans le face-à-face. Nous, il nous avait fait du bien. » Reste qu’il n’a jamais effectué de saison à plus de 28 matchs dans le même championnat. Pas top pour un gardien de but. Cela s’explique-t-il par son amour du voyage, qui empêcherait une certaine stabilité ? Impossible de le savoir, tant l’homme n’aime pas parler de sa propre personne. « J’ai essayé de le convaincre, mais parler à la presse, ce n’est pas son truc, note Carl Medjani, son partenaire de sélection, sur Jeune Afrique. Il est posé, humble, fuit la lumière. Au premier abord, il semble un peu distant, mais ce n’est pas le cas. Il se protège. »
La timidité, c’est aussi le premier trait de caractère que met en avant Noui Laïfa : « On habitait tous les deux en région parisienne, donc j’ai pu apprendre à le connaître quand on rentrait ensemble. C’est avant tout quelqu’un de réservé. Mais quand on casse la carapace, c’est un bon vivant, qui sait rigoler. » Toujours est-il que Raïs M’Bolhi a opté pour un énième challenge en s’installant en Bretagne et en retrouvant Christian Gourcuff, qu’il a rencontré quand l’entraîneur coachait l’Algérie entre 2014 et 2016. « Lorsque Christian est venu vers moi pour me proposer de rejoindre le club, je n’ai pas hésité, il n’y a pas eu de doute de mon côté, a-t-il réagi sur le site du Stade rennais. Revenir en France et me rapprocher de ma famille me fait très plaisir. La Ligue 1 fait partie des meilleurs championnats européens. Le Stade rennais F.C. est un club sérieux, qui joue le haut de tableau chaque saison et cherche à se faire une place parmi les grands clubs français. » Pour le côté surprenant, il faudra donc attendre un peu.
Par Florian Cadu