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Mbokani but, ni soumis

Par Adrien de Marneffe
6 minutes
Mbokani but,  ni soumis

Dieumerci Mbokani est enfin de retour à son meilleur niveau avec Anderlecht. Pour les supporters belges et congolais, il est une idole. Pour ceux de Monaco et Wolfsburg, ce serait plutôt «Dieu-non merci- Mbokani». Retour sur l’itinéraire d’un talent incompris, parfois incompréhensible, un peu barré, mais attachant.

« Je suis déjà techniquement plus fort que Djibril Cissé » , déclarait Mbokani en mars 2010, après avoir violé le Panathinaïkos du Djib’, 1-3 en Grèce avec le Standard de Liège, en huitièmes de finale d’Europa League. Cissé, une référence qui en dit long. Comme Djibril, Mbokani est un buteur talentueux, qui alterne les périodes fastes et celles de vaches maigres, encensé un jour par les supporters, brûlé le lendemain. A 21 ans, il débarque à Anderlecht en droite ligne du Congo en 2006, où il était tout puissant avec Mazembe. Mbokani peine à s’adapter à la grisaille belge. Fêtard au style de vie décousu, Dieumerci organiserait même des barbecues… à l’intérieur de son appartement bruxellois. Si bien qu’en fin de saison, Anderlecht le vire de son logement.

Sur le pré, Dieumerci n’a pourtant rien d’un manche. 9 apparitions et 4 buts lors de la fin de saison 2006-2007. Prometteur ? Pas pour le coach de l’époque, Franky Vercauteren. « J’étais jeune lors de mon premier passage au Sporting. Je vivais seul, j’étais toujours en retard. Je n’arrivais pas à m’adapter. Mais ces erreurs m’ont servi de leçons, j’ai progressé maintenant, j’ai changé. Mon départ? C’est comme pour Vadis, Tioté ou Lamah. Malgré tous mes buts avec la réserve, Vercauteren ne voulait pas de moi, je ne jouais pas. Il était logique que je parte puisque les jeunes ne recevaient pas leur chance » expliquait récemment Mbokani à HUMO.

Au Standard, Dieumerci devient Dieu

Il s’engage donc avec l’ennemi héréditaire, le Standard de Liège. Là, Michel Preud’homme puis Lazlo Bolöni tomberont en pâmoison devant les qualités du buteur congolais. Aligné aux côtés de Milan Jovanovic et parfois Igor De Camargo, il offrira deux championnats successifs aux Liégeois. La malédiction des 25 ans sans titre sera rompue en partie grâce à lui. Fin 2009, la direction du Standard refuse une offre de 15 millions d’euros de Stuttgart. Technique précieuse, frappe limpide des deux pieds, bonne finition, jeu de tête, puissance, une conservation du ballon appréciable, jeu dos au but et dans la profondeur. Complet, Mbokani est un attaquant moderne. Mais avec la mentalité d’un El-Hadji Diouf, version fin de carrière, Dieumerci se montre parfois lymphatique. Régulièrement irrégulier, déconcentré, arrogant lors de sa troisième saison, obsédé par un transfert, il joue à la carte.

Dieu « non-merci » Mbokani

Le Standard navigue alors à une dégueulasse huitième place. « Si nous ne participons pas au top 6, alors je préfère rester sur le banc. Je veux bien par exemple jouer contre Genk, mais les autres rencontres ne m’intéressent pas » prédit Mbokani en mars 2010. Moche… Transféré en été 2010 à l’AS Monaco, pour 8 millions d’euros, Mbokani y deviendra « Dieu « non merci » Mbokani » . Joueur banal, sans mordant ni conviction, il s’enlise dans la crise à l’instar du club du Rocher (1 but et 1 assist en 10 matchs). Les supporters le prennent rapidement en grippe. « Peut-être a-t-il été mal influencé. La plupart des observateurs ne l’ont pas reconnu à Monaco. Il a connu des problèmes d’adaptation. Le contexte à Monaco est assez particulier. Il n’a pas su le gérer comme il le fallait. Autant au Standard de Liège qu’à Anderlecht, il y a une pression populaire importante qui doit galvaniser. À Monaco, disons que c’est plus confiné… » lâchait Guy Lacombe, son coach à Monaco, à la DH. Pire, avec la sélection congolaise, Dieumerci se fait carrément virer par le coach, Robert Nouzaret. « Je ne le convoquerai plus, c’est terminé. Je lui ai donné une nouvelle chance, pas deux. Ce n’est pas un gars intéressant. J’ai réagi à la situation comme je l’entendais. J’ai 67 ans, je n’ai pas à me justifier auprès d’un gars capable de mettre la merde dans une équipe. Qu’il me traite de menteur, je m’en fiche. C’est un bon joueur mais il a un problème » , balance Robert Nouzaret en mai 2011.

Délaissé, Mbokani est finalement prêté à Wolfsburg, club à la ramasse, pour le reste de la saison. A peine débarqué, il lance solennellement à la presse allemande un « Appelez-moi Dieu tout court » . Un régal ! Pas de bol, le coach en Basse-Saxe se nomme Félix Magath. Le fils de GI n’est pas réputé conciliant avec les joueurs indisciplinés. Au niveau personnel, Dieumerci vit une situation compliquée. « David est né quand j’étais à Wolfsburg, mais il était prématuré, il était dans une couveuse. Ca me perturbait énormément. Si le club m’a soutenu, l’entraîneur Felix Magath m’a fait très mal. J’ai lu des déclarations dans un journal. Il disait « Mbokani, je ne saurais rien en faire, il se préoccupe davantage de futilités… » » . A Wolfsburg, Mbokani joue peu, n’inscrit aucun pion. Sa carrière se trouve dans une impasse. Monaco, rétrogradé, veut s’en débarrasser. Anderlecht lui tend la perche et lâche 3 millions de biftons en août 2011 pour le transférer. Objectif : remplacer Romelu Lukaku. A Bruxelles, il reforme le fameux duo du Standard avec Milan « The Snake » Jovanovic. La direction d’Anderlecht savoure l’instant, avec délectation. Dans les tribunes du Stade Constant Vanden Stock, on n’a pourtant toujours pas pardonné au Congolais les deux titres remportés par le Standard, au nez et à la barbe du Sporting. « Je viens ici pour rendre à Anderlecht le titre que je leur ai volé avec le Standard » lache Mbokani. A Liège, les oreilles sifflent.

« Je ne dépasserai jamais les 210km/h avec ma Ferrari »

A peine arrivé, Mbokani défraye déjà la chronique people. Blessé, il se pointe au centre d’entrainement au volant de sa Ferrari FF à 250 000 boulettes. En période de crise économique, ça la fout mal en Belgique ! « J’ai travaillé pour pouvoir me procurer ma Ferrari. Je ne l’ai pas reçue pour mes beaux yeux. À l’étranger, c’est la plus normale des choses que des joueurs de foot se déplacent dans une jolie voiture. Et ici, c’est un scandale. Je ne comprends pas » s’interroge Dieumerci. Et d’ajouter : « Je ne dépasserai jamais les 210km/h, je ne suis pas fou » . Rassurant ! « C’est un fou au volant,rigole son coéquipier, le sénégalais Cheikhou Kouyate. Dieu, il se croit en F1 quand il a un volant dans les mains. Je n’ose plus aller dans sa voiture » . Puis survient le drame. Son bébé âgé de quelques mois décède d’une malformation cardiaque. Là, Dieumerci fera preuve d’une force mentale insoupçonnée en relevant rapidement la tête. Il se montre étincelant lors de l’humiliation infligée… au Standard (5-0). Les observateurs retrouvent l’attaquant au style félin, puissant, décisif d’il y a deux ans. Une vraie résurrection.

Bien plus fort que Lukaku ?

Il s’éclate dans tous les matchs importants, crucifie à nouveau le Standard lors du match retour, sous les huées de son ancien public. « Dieu survole la mêlée. Pour me le farcir régulièrement à l’entraînement, je peux vous dire qu’il est impossible à museler. Mbokani est bien plus fort que Lukaku. Là-dessus, je n’ai franchement pas peur de me mouiller » , déclare son coéquipier, le défenseur international hongrois, Roland Juhasz, à la DH. « C’est un vrai gentil et sans doute même… trop gentil, résume son ancien coach au Standard, Dominique D’Onofrio.Son problème, c’était que tous ses soi-disant amis qui tournaient autour de lui pour son argent allaient le tuer ! » . Il semble cependant qu’Anderlecht a trouvé la bonne formule pour encadrer son talent. Plusieurs clubs de Premier League, dont Liverpool s’intéressent à lui. En Angleterre, au moins, on ne lui reprochera pas de conduire des bolides de luxe.

La Ligue 1, une saison déjà pliée ?

Par Adrien de Marneffe

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