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M’Baye Niang, la renaissance génoise
Prêté cet hiver au Genoa par le Milan, le tout jeune M'Baye Niang, hier enfant phare du football français, reprend progressivement des couleurs après une demi-saison blanche du côté de San Siro. Un moindre mal pour ce gamin qui rêve de décrocher un jour le Ballon d'or.
On avait presque tendance à l’oublier. Et dans le fond, il valait sans doute mieux. Un an après le sale épisode de la Ferrari et la peine de dix-neuf mois de prison avec sursis qui a suivi, M’Baye Niang se refait une santé au Genoa, loin des chefs d’accusation et des tribunaux correctionnels. Prêté cet hiver par l’AC Milan, où il n’a pris part qu’à cinq rencontres depuis la fin août pour un total de 84 minutes jouées, le jeune espoir tricolore retrouve enfin le chemin des terrains après une année 2014 en tous points chaotique. Désormais titulaire au Genoa après le départ d’Alessandro Matri pour la Juve en février, M’Baye Niang se prend de nouveau à rêver d’un futur doré. « Ici, ça se passe mieux et j’espère continuer comme ça. Même à Montpellier, j’ai commencé fort, puis j’ai été abandonné, mais c’était seulement de ma faute. Je ne me laisse pas distraire par les critiques. Je travaille pour devenir un champion. Mon rêve est de remporter le Ballon d’or. Je ferai tout pour réussir et si je devais m’arrêter à mi-chemin, de tout façon, j’aurais essayé. » Ces mots plein d’ambition sont issus d’un entretien publié dans La Gazzetta dello Sport ce jeudi, soit quatre jours après le nul du Genoa à Empoli où Niang a inscrit le seul but de son équipe. Son troisième en un mois et demi avec les Rossoblù, soit presque autant que son total avec Montpellier et Milan sur toute l’année 2014 (5 buts pour 27 matchs). Alors M’Baye, enfin calmé ?
Thug life
Depuis son départ du Stade Malherbe de Caen pour l’Italie à l’été 2012, le natif des Yvelines, que l’on présentait un peu partout comme un futur crack, ne s’est distingué pratiquement que par ses exploits extra-sportifs. Une sorte de Mario Balotelli franco-sénégalais capable d’aller s’encanailler en boîte à quelques jours d’un gros match avec les Bleuets ou encore de déglinguer la Ferrari d’un pote après avoir percuté une série de véhicules en prenant soin de fuir à toute allure. Son adolescence, M’Baye Niang l’aura passé à jouer au football et à faire ce genre de conneries qui auraient pu lui coûter très cher. La vie, par exemple. Certainement bien secoué émotionnellement par cet accident stupide survenu en février 2014, l’ancien de l’AS Poissy semble s’être mis du plomb dans la cervelle, comme il l’expliquait il y a quelques mois au journal L’Équipe. « J’ai fait des bêtises, des grosses bêtises même. Elles m’ont fait comprendre que pour être une star, ça se passe aussi en dehors du terrain. J’essaye d’enlever mon étiquette debad boy. Jusqu’ici je n’avais pas conscience des choses. Je me disais que j’avais le temps. Mais tout va très vite. J’espère redevenir le joueur que j’ai été. C’est une question de temps, de travail. »
Le joueur dont il parle, M’Baye Niang l’était par exemple à Caen, son premier club pro où il débarque à l’âge de 13 ans. Comme lors de son enfance parisienne, le gamin brûle les étapes en Normandie et se retrouve souvent surclassé au niveau supérieur. Son premier match de Ligue 1, M’Baye le dispute à 16 ans, un âge où les jeunes gens normaux découvrent le lycée et les premières soirées alcoolisées. Emblème du Stade Malherbe avec ses plus de 400 matchs sous la tunique caennaise, Anthony Deroin se souvient d’un garçon surdoué pour qui tout semblait facile. « C’est un peu comme William Gallas quand il est arrivé à Caen. M’Baye a toujours été un peu au-dessus de la moyenne. Déjà, physiquement, il était plus costaud et allait plus vite que les autres, donc forcément, il a gravi les échelons plus rapidement que la plupart de ses camarades. Quand il est arrivé, c’était un petit jeune plein de fougue avec les dents longues. Il savait déjà ce qu’il voulait et où il voulait aller. » Malgré ses bonnes prestations et l’expérience qu’il commence à acquérir en Normandie, Niang se fait peu à peu entraîner vers le côté obscur de la force. Anthony Deroin se souvient là encore d’un jeunot désireux de mener sa vie d’ado comme il l’entendait. « M’Baye avait ce caractère-là, il avait envie de profiter, de s’amuser un petit peu, donc même s’il était sérieux à l’entraînement, à l’extérieur il faisait un peu moins attention. Il pensait que l’entraînement lui suffisait et qu’il n’y avait pas besoin de faire d’efforts en dehors. Mais ça, c’est un des petits soucis de la jeunesse. Il y en a qui sont plus matures à cet âge et qui comprennent, mais M’Baye, à l’époque, n’était pas prêt à mettre sa vie perso entre parenthèses. Il voulait continuer à vivre normalement à côté. »
Nouveau départ
Adulé la veille, lynché le lendemain, l’histoire de M’Baye Niang est malheureusement assez commune dans la vie d’un footballeur. Désormais à Gênes où son temps de jeu s’accroît et ses prestations se régularisent, le bad boy de Meulan entend bien rattraper le temps perdu en début de saison afin de retourner à Milanello affûté comme jamais. Décisif le week-end dernier contre Empoli (1-1), Niang s’était également mis en évidence deux semaines auparavant en claquant un doublé en dix-huit minutes face au Hellas Vérone de Luca Toni. Passeur décisif sur le but de Diego Perotti contre la Lazio (0-1), puis sur celui de Falqué lors du derby génois (1-1), M’Baye Niang est directement impliqué sur cinq des huit derniers buts de son équipe. Regagner la confiance d’un public, d’un entraîneur, pour mieux se retrouver soi-même, c’est tout ce à quoi aspire l’ancien protégé de Louis Nicollin. « Des joueurs aussi jeunes que lui, avec une telle aisance et une telle facilité pour s’adapter au haut niveau, j’en ai pas vu beaucoup. M’Baye était vraiment unique en son genre. Après, il y en a qui mettent du temps à percer, alors que M’Baye, dès qu’il est arrivé, il était déjà au niveau » , poursuit Anthony Deroin. Un niveau que l’attaquant de vingt ans est progressivement en train de retrouver sous les ordres de Gianpiero Gasperini. Claquer des buts, gagner des matchs, faire profil bas et surtout rouler moins vite, la recette n’était finalement pas si sorcière. Même si, comme chacun le sait, personne n’est pas à l’abri d’une rechute.
Par Morgan Henry