- France
- Paris Saint-Germain
Mbappé, droit dans ses torts ?
Kylian Mbappé est donc désormais enferré dans une fin de saison conflictuelle avec son club. Si sur le fond, il n’y a pas grand-chose à lui reprocher, la forme, notamment sa « fuite » en loge VIP à Monaco lorsqu’il fut sorti à la mi-temps, peut rebuter ses plus fidèles soutiens. Il ne suffit pas d’être dans son droit pour être le gentil de l'histoire.
Kylian Mbappé est un grand pro. Notamment de la communication. Le cirque au stade Louis-II n’était certainement pas une humeur passagère et avait peut-être été anticipé. Le capitaine des Bleus se doutait qu’une fois ébruitée sa décision de partir à la fin de la saison, le club laisserait cette fois plus de marge à Luis Enrique pour gérer son effectif. Depuis, ce dernier répète à l’envi sa nouvelle ligne de conduite, un courage sans risque, puisque son employeur ne décolère pas contre son ancien chouchou. Ainsi, durant la conférence de presse après une prestation décevante contre l’ASM, l’Asturien montrait ses muscles et son goût pour la concision répétitive : « C’est à 100 % une décision de l’entraîneur. Tôt ou tard, on va devoir s’habituer à jouer sans Kylian. C’est une décision que je prends dans l’objectif d’avoir le meilleur pour l’équipe. »
Depuis, un échange aurait eu lieu, et l’entraîneur espagnol aurait adouci son propos, précisant qu’il comptait sur son attaquant « pour les matchs à enjeu ». Bref, la Ligue 1 étant déjà gagnée ou presque, le PSG apprendra à se débrouiller sans lui, mais prend le risque d’un nouveau crash en Ligue des champions (ou pour mieux mettre la responsabilité sur les épaules du Kyks). On peut laisser filer un nul à Louis-II, pas une élimination au Pays basque.
Le mal n’est plus à faire
De fait, la distribution des rôles semble se clarifier. Kylian Mbappé peut pourtant se prévaloir de ses sept longues années de fidélité au Parc des Princes. Ses performances se sont globalement révélées satisfaisantes (voire hors normes en matière de statistiques), même si on peut considérer que la finale contre le Bayern Munich en 2020 restera finalement son plus grand raté. Malgré son professionnalisme et l’annonce précoce auprès de son employeur de sa décision de quitter Paris, il porte néanmoins de plus en plus l’étrange étiquette du traître ou de l’ingrat. Traître à un PSG qu’on ne quitte pas, QSI ayant un petit côté pervers narcissique sur ce plan avec ses stars à crampons. Ingrat puisqu’il risque d’aller renforcer le Real Madrid, un rival sur la scène européenne (sans parler de la bataille autour de la Superligue entre Florentino Pérez et Nasser al-Khelaïfi).
Dans ce jeu de dupes, ou en dépit d’une cohabitation inévitable, personne ne semble se demander ce qu’il en ressort de ses droits en tant que salarié, surtout dans le contexte singulier du foot pro. Il quitte le club en l’avertissant suffisamment en avance – il aurait pu feindre de tergiverser jusqu’à l’été pour se venger de l’épisode du loft – pour qu’il puisse, comme le souhaite le coach espagnol, penser son mercato et amorcer enfin un véritable projet collectif. À sa façon, il rend un immense service à Luis Enrique, si celui-ci est toujours sur le banc en 2024-2025.
Soigner la sortie
Kylian Mbappé s’épanche peu dans les médias et laisse couler les commentaires aspergeant la moindre de ses attitudes et envahissant l’espace médiatique et les réseaux sociaux. Le fond de l’affaire est assez simple. Il avait le droit de partir. Son coach a le droit de le sortir quand il l’estime mauvais. Mais qui croit encore que le ballon rond n’est qu’un sport ? Le capitaine des Bleus possède encore une arme pour souligner son bon droit, au bout de ses pieds. S’il se montre indispensable mardi contre la Real Sociedad ou dans les matchs « à enjeux » (il faudra préciser lesquels en Ligue 1), ses adieux nourriront plus de regrets que de plaisir pervers à le regarder quitter salement la capitale. Kylian Mbappé n’est plus forcément un membre d’une équipe – l’épisode monégasque a quand même brisé quelque chose de ce point de vue – dont on nous explique que son destin ne se conjugue plus qu’au futur. Il reste un joueur parisien qui peut encore changer le destin de son club, dans un futur déjà antérieur qui se montre bien présent sur le terrain.
Par Nicolas Kssis-Martov