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Maxime Chanot : « À New York, Pirlo met les coups francs, moi la tête »

Propos recueillis par Florian Cadu
Maxime Chanot : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>À New York, Pirlo met les coups francs, moi la tête<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Pilier du Luxembourg, Maxime Chanot rencontre ce samedi la France, pays où il est né. L'occasion de parler de sa sélection, de ses objectifs et de sa vie aux États-Unis, où il défend les couleurs de New York City. Avec David Villa et Andrea Pirlo, entres autres.

Tu croules sous les sollicitations médiatiques ces jours-ci…Ouais ! Je suis arrivé au Luxembourg il y a peu et entre le décalage horaire, les entraînements, le Luxembourg-France qui arrive et les interviews, le planning est assez rempli. Mais ça va.

Tu es né à Nancy, mais tu es aussi luxembourgeois. Ça vient de quel côté de ta famille ?De ma mère. Mon père est français, donc le prochain match va être intéressant : toute ma famille paternelle va sûrement être derrière la France, contrairement à ma famille maternelle qui soutiendra le Luxembourg.

Quand as-tu choisi la sélection luxembourgeoise ?À vingt ans, quand je suis arrivé en Belgique et que je me sentais capable de jouer pour l’équipe nationale. Il n’y a jamais eu vraiment de débat en fait, parce que je n’ai jamais été dans la position d’être sélectionné en équipe de France. C’était donc clair que j’allais jouer pour le Luxembourg. Je me suis toujours senti luxembourgeois, d’ailleurs.

Malgré la proximité géographique entre les deux pays, on connaît finalement très peu ta sélection. Quels sont vos objectifs, à court et long termes ?Pour être humble et honnête, l’objectif n’est pas de se qualifier pour une Coupe du monde ou atteindre la finale de l’Euro, loin de là.

Quand j’ai commencé avec la sélection en 2013, on était seulement trois ou quatre pros. Maintenant, on est onze.

Dans un premier temps, on veut créer un groupe qui tienne la route, ce qu’essaye de faire le coach depuis quatre ans. Le but, c’est d’intégrer le maximum de professionnels à l’équipe. Quand j’ai commencé avec la sélection en 2013, on était seulement trois ou quatre pros. Maintenant, on est onze. Puis de manière plus générale, l’ambition est de bien figurer, de montrer qu’il n’y a plus de petites nations, et grappiller, grappiller, grappiller. Comme l’a fait l’Islande ou le pays de Galles, qui étaient il n’y a pas si longtemps des nations de football inconnues au niveau européen et qui sont désormais des modèles pour nous. Ça nécessite de la patience, car ça prendra du temps.

Vous avez déjà montré quelques progrès durant les éliminatoires (défaites 4-3 contre la Bulgarie, 0-1 contre la Suède, 3-1 contre les Pays-Bas et nul 1-1 au Bélarus).C’est ce que je répète beaucoup en ce moment : malheureusement, le nombre de points qu’on a aujourd’hui ne reflète pas notre fonds de jeu. Un point, ça peut faire sourire. Mais contre la Bulgarie, il y a encore 3-2 à la 90e, on perd 1-0 contre la Suède alors qu’on fait un très bon match, et on tient les Pays-Bas jusqu’à la 60e. Donc avec un peu plus de réussite et d’expérience, on pourrait avoir trois-quatre points supplémentaires. Et on serait vu différemment. Mais c’est le foot. Et il est important que le fonds de jeu soit bon, car on a une image à montrer. Même s’il n’y a que les victoires qui donneront du crédit à notre évolution.

Quand on est habitué à gagner en club, ce n’est pas un peu dur de venir jouer en sélection tout en sachant qu’on va galérer pour obtenir ne serait-ce qu’un petit match nul ?C’est vrai que ce n’est pas simple. Surtout qu’à New York City, on est en haut du tableau et on a un style de jeu basé sur la possession de balle. C’était également le cas à Courtrai, mon club précédent. Or, en équipe nationale, on subit un peu plus, même si on essaye de jouer. Donc au début, c’était un peu difficile. Mais avec le temps, j’ai appris à jouer de cette façon-là, à faire le dos rond. Et ce n’est pas pour autant que je ne prends pas de plaisir. Au contraire, je prends énormément de plaisir à défendre mon équipe nationale.

Parlons de ta carrière en club, justement. Malgré tes vingt-sept ans, tu as déjà pas mal bourlingué : formation à Nancy et à Reims, puis passages en Angleterre (Sheffield United et Mansfield) et en Écosse, retour en France au Mans et à Gueugnon, départ en Belgique avec trois clubs différents… Et maintenant New York. Tu as l’âme d’un globe-trotter ? Non, c’est pas ça. En fait, ce n’est pas moi qui ai imposé mes choix personnels à ma carrière, c’est ma carrière qui m’a imposé des choix sportifs. Partir dans des pays étrangers, ce n’était pas une envie particulière, mais plutôt des opportunités. J’ai toujours évolué, mes transferts le prouvent. Quand je suis revenu en France, ça n’a pas marché, notamment parce que j’étais imprégné du jeu anglais. Ensuite, j’ai pris le temps de m’installer en Belgique et ça l’a fait. Aujourd’hui, me voilà aux États-Unis. Je ne l’aurais jamais imaginé, mais qui sait ce que l’avenir me réserve encore ?

À la fin de ton aventure belge, tu avais les Queens Park Rangers d’un côté, et New York City de l’autre, avec un projet professionnel qui attendait ton épouse aux États-Unis. Tu n’as pas dû hésiter longtemps, si ?

À partir du moment où tu as un coach comme Patrick Vieira qui te veut…

Non. À partir du moment où tu as un coach comme Patrick Vieira qui te veut, avec l’opportunité de fréquenter des joueurs hors normes… Sans oublier les infrastructures, le Yankee Stadium… Oui, mon épouse, qui est avocate, avait une opportunité professionnelle, mais c’est vraiment l’ambition sportive qui a pris le pas sur tout le reste. Le choix a été très vite fait, et je ne regrette rien.

Tu t’es bien adapté à la vie nord-américaine ?Les six premiers mois ont été compliqués. Je suis arrivé en juillet, sans préparation, en cours de saison puisqu’il n’y a pas de coupure à ce moment de l’année ici. Puis tu arrives dans une nouvelle ville, c’est une nouvelle vie, il y a le jet-lag… Le climat était étouffant, il faisait presque 40°C… En plus, l’équipe en place tournait très bien, avec un collectif bien huilé. Le bilan était mitigé. Après, je ne me plains pas, hein. J’ai toujours eu conscience de la chance que j’avais. Et maintenant, ça va bien mieux. Je suis pleinement satisfait de cette nouvelle saison.

C’est vrai que pour le domaine extrasportif, les clubs là-bas sont en avance sur l’Europe ?Les États-Unis ont tout compris de ce côté-là. J’ai eu l’occasion de jouer dans des clubs qui tenaient la route, comme Sheffield qui était en Premier League, mais ce que j’ai connu à mon arrivée à New York était juste exceptionnel. Dans l’organisation, dans le professionnalisme… C’est incroyable comme ils te prennent en charge.

Tu peux nous donner des exemples concrets ?Tu arrives et tous les papiers sont faits. Tu ne t’occupes de rien. Voiture, permis, catalogue d’appartements disponibles, premier salaire… Tout t’attend dès ton premier jour. Tu n’as plus qu’à te concentrer sur la partie foot. Ils poussent le détail à la perfection. Génial.

Il y a bien un truc qui ne te plaît pas par rapport à la Belgique !Ouais : les voyages. En Belgique, tu bouges en car et c’est réglé en une après-midi. Ici, vu que le pays est immense, tu es souvent dans l’avion, ça peut être très long. C’est possible d’aller jouer le samedi à Los Angeles, revenir à New York le mercredi et repartir à Vancouver le samedi d’après. Donc parfois, l’accumulation peut être fatigante… Mais je le répète : on est tellement bien pris en charge, les gens nous mâchent le travail pour les contrôles… On n’a pas grand-chose à penser si ce n’est amener son ordinateur !

Et le niveau, tu pourrais le comparer à celui du foot français ?C’est paradoxal ce que je vais te dire, mais je ne suis pas légitime pour comparer la MLS à la Ligue 1. Tout simplement parce que j’ai toujours joué à l’étranger. Ce que je peux te dire, c’est que le championnat MLS est supérieur au championnat belge. Pourquoi ? Parce que tu as un mélange de joueurs américains intrinsèquement très forts physiquement, de joueurs sud-américains qui amènent une touche de vivacité et de technique, et d’anciennes stars ou de stars actuelles, comme Sebastian Giovinco ou Giovani dos Santos qui ne sont pas si vieux que ça, qui élèvent forcément le niveau. Sans oublier Steven Gerrard, Frank Lampard, Andrea Pirlo, qui, avant d’arriver en MLS, étaient titulaires dans les meilleures équipes du monde. Donc c’est un mixe entre tout ça qui fait de la MLS un championnat qui se développe rapidement. D’ailleurs, Tout le monde le sent. Sinon, tu ne pourrais pas demander à des mecs comme Jozy Altidore de venir jouer à Toronto.

Dans une ancienne interview, tu as dit que « les très bons footballeurs sont tous des bons vicelards » . Toi qui joues avec eux, tu confirmes qu’Andrea Pirlo et David Villa ont une part de vice en eux ? Dit comme ça, le vice n’est pas le terme approprié. Je parlerais plus d’intelligence. Et être intelligent, ce n’est pas seulement donner la balle au bon moment. C’est aussi tomber pour récupérer une faute quand tu sens que tu vas perdre le ballon. Toutes ces petites choses que les joueurs de haut niveau mettent en application dans certaines situations. Un joueur comme Andrea, c’est aussi ce qui fait sa force. Quand toi, tu vas être un peu naïf et tacler, lui va obtenir une faute. Ça fait partie de l’expérience. De manière plus globale, Andrea et David sont des joueurs exceptionnels. J’apprends énormément à leur contact. Leurs façons de se déplacer, de conduire leur ballon, de se comporter sur le terrain…

Toi, tu as plutôt la réputation d’avoir un jeu dur. Et bizarrement, on n’imagine pas Pirlo aller au duel aérien avec un gabarit comme le tien…

Andrea (Pirlo) ne va pas me demander de tirer les coups francs et je ne vais pas aller lui demander d’aller placer une tête sur un corner.

Je ne me souviens pas avoir fait un duel avec Andrea. Et ça correspond à ce que je disais : c’est quelqu’un qui va utiliser sa tête et qui va jouer sur ses qualités en attendant le deuxième ballon. Chacun sait ce qu’il a à faire. Andrea ne va pas me demander de tirer les coups francs et je ne vais pas aller lui demander d’aller placer une tête sur un corner. Pour résumer, à New York, Pirlo met les coups francs, moi la tête.

Quand tu es arrivé, tu lui as parlé du but que tu avais collé à l’Italie en 2014 quand tu égalises en fin de partie lors d’un amical (1-1, score final) ?Ouais, on en a parlé un peu en rigolant ! Mais ça reste un mauvais souvenir pour lui, donc on évite le sujet…

C’est vrai qu’après ce match, des clubs de Serie A se sont intéressés à toi ?Oui, oui, ça s’est avéré. Mais tu ne maîtrises pas toujours les tenants et les aboutissants. Après, les transferts qui ne se sont pas faits se feront peut-être un jour. Mais là, je suis très bien à New York.

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Propos recueillis par Florian Cadu

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