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Max la Menace
Débarqué à Turin en 2014 avec la lourde tâche de remplacer Antonio Conte, Max Allegri a d'abord soulevé une vague de scepticisme ambiante dans le Piémont. Pourtant, trois ans plus tard, le voilà qui dispute sa deuxième finale de C1 avec la Juventus. La marque d'un coach qui n'a jamais cessé de croire en sa capacité de faire retrouver à la Vieille Dame les sommets du football européen.
16 juillet 2014. À Vinovo, le centre d’entraînement de la Juventus est en proie à une agitation inhabituelle. Antonio Conte, démissionnaire, vient d’être remplacé par Massimiliano Allegri. Pas de quoi rassurer les ultras, dont certains demandent même un entretien avec la direction. La Juve vient d’enquiller trois titres de champion d’Italie, une ambiance de fin de règne s’infiltre dans les esprits, mais le nouveau Mister juventino, lui, reste de marbre : « Je comprends leur scepticisme… Mais j’ai passé quatre ans à Milan, je sais comment fonctionnent les grandes équipes… J’essaierai de les conquérir avec du respect, des résultats et du travail. » Trois ans plus tard, la conquête d’Allegri est totale, ou presque. Ne lui manque plus qu’un ultime succès en forme de consécration, en cas de victoire face au Real Madrid en finale de C1, samedi prochain.
Max l’optimiste
Si les débuts d’Allegri à Turin ont été si difficiles, c’est bien entendu en raison de la cote de popularité de son prédécesseur Antonio Conte, qui a restauré la domination de la Vieille Dame sur la Botte. Un homme qui s’était offert un départ fracassant du Piémont, en critiquant sa direction, qu’il juge trop frileuse pour effectuer les investissements nécessaires pour permettre à la Juve de retrouver un vrai standing européen. Conte s’en était ainsi allé en tirant un ultime constat, en forme de sombre prédiction : « Vous ne pouvez pas vous asseoir à la table d’un restaurant dont le menu coûte 100 euros quand vous n’avez que 10 euros en poche, point. »
À l’opposé, Allegri, lui, se distingue par son positivisme et une communication plus apaisée avec ses dirigeants : « En C1, nous avons l’obligation de faire un grand tournoi, la Juve mérite d’être dans le top 8 européen… Le club a une stratégie avisée et est proche de renforcer l’équipe pour la rendre plus compétitive. » Pragmatique, le Misterconserve lors de ses premiers mois à Turin le 3-5-2 emblématique de Conte, fait confiance à Andrea Pirlo qu’il n’avait pourtant pas souhaité conserver à Milan lorsqu’il entraînait les Rossoneri et assume de s’inscrire dans la continuité de son prédécesseur : « Le système de jeu fonctionne et je vais me contenter d’apporter de petits changements. » La suite prouvera pourtant que le technicien a d’autres plans en tête, autrement plus ambitieux, pour cette Juventus-là.
« Je suis un créatif »
De fait, la menace que constitue Max Allegri pour les adversaires de la Juventus prendra une forme de plus en plus tangible au fil des mois et des saisons. L’ancien rossonero annonce dès début 2015 qu’il compte bien ne plus s’appuyer uniquement sur l’héritage de l’ère Conte : « J’ai trouvé une équipe organisée, avec une grande culture du sacrifice, mais la Juve avait un jeu très mécanique. Cela a été sa force, mais, pour faire un pas en avant, on a besoin de quelque chose en plus. Moi, je suis un créatif et j’ai voulu ajouter mes concepts à leurs connaissances… » Pour débrider la Vieille Dame, Allegri ose abandonner la défense à trois en Ligue des champions, optant pour un 4-3-1-2 avec Vidal aligné en retrait des deux attaquants. Un système qui emmène la Juve jusqu’en finale de la C1, où elle échoue face au Barça.
La Vieille Dame continuera ensuite de gagner en versatilité et en imprévisibilité : en 2015-2016, c’est en évoluant en 4-4-2 puis en 4-2-3-1 en huitième de finale de C1 que les Juventini sont à trois minutes d’éliminer le Bayern. Cette saison, Allegri a alterné entre un système en 4-2-3-1 comme face à Barcelone, où Dybala évolue en neuf et demi en retrait d’Higuaín, et le retour à la défense à trois, qui a annihilé les offensives de Monaco. Signe que le Misterne s’est pas reposé sur ses lauriers et n’a jamais cessé d’expérimenter et d’innover tactiquement, comme en témoigne aussi la réinvention de Mario Mandžukić, de numéro neuf à ailier tout terrain.
La fin du plafond de verre ?
Reste que s’il est moins résigné et fataliste que Conte, Allegri n’en est pas moins conscient que son savoir faire tactique ne suffira pas à couronner la Vieille Dame en Europe. Et n’oublie pas de subtilement demander dès 2015 des renforts de poids lors des mercatos à venir : « Mon travail sert à donner une organisation et une identité. Mais on peut parler pendant des heures de schémas et d’organisations, mais les matchs, ce sont les joueurs qui les gagnent. Si tu as Messi, tu pars quasiment de 2-0, avec Ronaldo, idem. » Cette fois-ci, sa direction reçoit le message cinq sur cinq, en investissant sur des joueurs censés permettre à la Juve d’enfin crever le plafond de verre européen qui la sépare des tout meilleurs : la Vieille dame acquiert ainsi Paulo Dybala l’été suivant, puis Gonzalo Higuaín, Dani Alves et Miralem Pjanić en 2016.
Si bien qu’à l’heure de se mesurer au Real Madrid de Zinédine Zidane, Allegri est persuadé que la Ligue des champions ne constitue plus « un rêve » comme il l’avait énoncé à la sortie de la finale perdue de l’édition 2015 face à Barcelone, mais bien un objectif plausible : « Il y a eu une progression constante de la part de tous, que ce soit de l’entraîneur, du club ou des joueurs. Nous sommes convaincus de pouvoir ramener la coupe à la maison. » Et de pouvoir s’asseoir à la table où festoient les plus grands, quoi qu’en pense Antonio Conte.
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Par Adrien Candau