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Matthieu Dreyer : « Le biathlon, on vibre sur chaque balle »
Gardien de but remplaçant d’Amiens, Matthieu Dreyer possède une autre passion que le ballon rond : les sports d’hiver. Et en particulier le biathlon qu’il suit depuis de nombreuses années. Interview ciblée, sans tour de pénalité.
Salut Matthieu, alors, comme ça, le biathlon, c’est une passion pour toi ?Je ne rate aucune course. Avec mes frères et mon papa, on regardait tout quand on était plus jeunes. Tous les sports d’hiver en général d’ailleurs. Pour le biathlon, on vibre sur chaque balle.
Tu es originaire d’Alsace, mais tu as été formé à Sochaux, dans une région qui adore les sports nordiques. Est-ce que ça a joué sur ta passion ?
Pas du tout ! En fait, je suis fan de sport à la base. Aujourd’hui, je mets mon petit de 3 ans et demi devant le ski à la télévision. C’est la seule chose qu’il a le droit de regarder. (Rires.) Là, bientôt, il va aller au ski avec sa maman et sa sœur. Moi, avec le foot, je n’ai pas trop le droit d’en faire. (Rires.) En plus, ma femme est originaire de la montagne, on s’est bien trouvés.
Aujourd’hui, tu évolues à Amiens. T’as réussi à ramener cette passion dans le vestiaire ?Oui, oui, on en discute avec Thomas (Monconduit) et Alexis (Blin) !
Mais le biathlon, ça représente quoi concrètement pour toi ?L’effet est juste incroyable ! Se concentrer pour tirer après tant d’efforts sur les skis, c’est juste fou. L’enchaînement des balles, la pression à chaque tir… Et puis, c’est très télégénique. Il y a parfois plus de 80 000 spectateurs au bord de la piste, c’est incroyable.
As-tu déjà assisté à une course en vrai ?Malheureusement, non. Je devais le faire cette année, mais ça a été annulé au Grand-Bornand. En tout cas, ce qui est sûr, c’est que le jour où j’arrête le foot, je vais aller me faire un paquet d’événements sportifs, je veux aller voir (Roger) Federer. Je veux assister à Wimbledon, je me démerderai bien pour y aller.
Y a-t-il un souvenir en particulier qui t’a marqué en biathlon ?Aux JO, la lutte entre Martin Fourcade et Simon Schemp, où ça se joue à la photo-finish (la mass-start à PyeongChang, N.D.L.R.). C’était hallucinant ! Surtout que deux ans avant, aux Mondiaux, il s’était produit l’inverse pour Martin (en réalité, c’était aux JO de Sotchi en 2014 face à Emil Svendsen, N.D.L.R.).
À t’écouter, on sent vraiment que ce sport te fait vibrer…Pour tout te dire, on a créé un groupe sur WhatsApp avec des amis, où en fait, chacun a 8 biathlètes sur la saison, quatre garçons, quatre filles et on compte les points après chaque week-end de compétition. Il y a notamment le kiné de Caen, où j’ai joué. Et lui, c’est un fan absolu de Martin Fourcade. Moi, par exemple, chez les mecs, j’ai choisi (Quentin) Fillon-Maillet, (Lars Helge) Birkland, (Simon) Desthieux et (Benedikt) Doll. Chez les femmes, j’ai (Kaisa) Mäkärainen, (Anaïs) Bescond, (Iryna) Kriuko et (Monica) Hojnisz. Il y avait un classement par étoiles pour déterminer le niveau des biathlètes et après on a tiré au sort pour savoir qui choisirait en premier. On s’éclate bien, c’est comme la draft ! Mes biathlètes, ça fait Top 10 à chaque fois, donc je suis remonté un peu au classement.
Tes premiers souvenirs de biathlon remontent à quand ?
Je crois que ce sont les duels entre Raphaël Poirée et Ole Einar Bjoerndalen ! Quoique, en 1992, aux JO d’Albertville, mes parents bossaient sur les contrôles anti-dopage et du coup on avait vécu de près tout ça. Je me souviens notamment de la cérémonie des fleurs avec Anne Briand, Corinne Niogret notamment (Véronique Claudel était la troisième relayeuse). Elles avaient terminé 2es ou 3es si mes souvenirs sont bons (elles avaient obtenu l’or en réalité, N.D.L.R.).
La rivalité entre Poirée et Bjoerndalen, elle t’a marqué ?C’était une lutte fratricide ! Ils ne lâchaient rien. Ils étaient au-dessus de tout le monde, en avance sur tout. Ils repoussaient les limites constamment, sur le matériel, la façon de tirer… C’était incroyable.
Qu’est-ce que tu penses de Martin Fourcade ?
C’est un immense champion, qui a contribué à améliorer ce sport. Je pense que maintenant, si on demande aux gens, ils savent qui il est. Cela a été rendu possible grâce à son image et aux sujets sur lesquels il s’engage. Il assume totalement des prises de position pas forcément évidentes quand on est une personnalité publique. J’ai la chance de correspondre de temps en temps avec lui sur les réseaux sociaux. Il est super accessible. Un jour, après une course, je lui avais écris en lui disant qu’il nous faisait plus vibrer que lors d’un match de foot. Il avait été surpris de la démarche, venant d’un footballeur. C’était marrant. J’ai lu son dernier livre, et dans ce livre, il y a des cibles. Je les ai prises et je suis allé au stand de tir pour voir ce que ça donnait. Ce n’était pas évident, mais j’ai réussi à toucher la cible. Je n’ai pas tourné sur l’anneau de pénalité. (Rires.)
Après Martin Fourcade, tu saurais me dire quelle sera la nouvelle star du biathlon ?La relève est déjà là ! Ce sont (Quentin) Fillon-Maillet, (Antonin) Guigonnat, (Émilien) Jacquelin. Ils sont tous très complets et peuvent envisager un avenir radieux.
Y a-t-il une course en particulier qui te fait rêver ?Oberhof ! Sur chaque balle, il y a une ferveur incroyable. Ce n’est pas pour rien qu’on dit que c’est le temple du biathlon ! De toute façon, en Allemagne, c’est toujours incroyable. Même pour le ski traditionnel, à Garmisch, c’est la folie.
Tu as déjà eu des frissons devant une course ?Je me suis déjà énervé, oui ! Sur les dernières balles généralement. Quand t’es à 19/20 et que la 20e tu la sors, ça rend fou. Je me souviens de Fourcade, quand il a raté les deux dernières aux Jeux olympiques, tu ne comprends pas ce qu’il se passe. En plus, il fait deux fois cordon.
Tu disais tout à l’heure que ce sport était très télégénique. Ça te plairait d’essayer de le commenter ?Carrément ! Je ne connais peut-être pas aussi bien que les consultants, mais je bosserais comme un fou pour être au niveau. Par ailleurs, je connais bien Messaoud Benterki (qui présente notamment le biathlon sur La Chaîne L’Équipe, N.D.L.R.). On se chambre beaucoup. Avant chaque course, je lui envoie une connerie.
Et donc le biathlon, on en parle entre footeux ?En fait, ils se mettent dedans parce que j’en parle tout le temps. (Rires.) Enzo (Crivelli) me surnommait Martin. Quand ils voient que je m’excite sur telle ou telle course, ils commencent à s’y mettre. J’en parle également avec Vincent Bessat. Il évolue désormais à Chypre, mais il suit quand même les courses. De toute façon, je lui envoie tous les résultats.
Propos recueillis par Tanguy Le Séviller