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- OM-Tottenham (1-2)
Mathieu Valbuena : « C’est une faute professionnelle »
En 2011, c'est lui qui avait envoyé l'OM en huitièmes de finale de C1 après un numéro de soliste à Dortmund. Onze ans plus tard, Mathieu Valbuena était devant sa TV, espérant avoir enfin un successeur. Mais Petit Vélo a assisté impuissant à la cruelle élimination de l'OM face à Tottenham, qu'il analyse à tête reposée. « Que les joueurs n’aient pas été mis au courant du résultat de Francfort, c’est lunaire. C'est une faute professionnelle », estime-t-il.
Comme tous les Marseillais, on vous imagine encore sonné. Quel sentiment domine ?Il y a plusieurs sentiments : du regret, de l’incompréhension, de l’énervement, de la colère. On ne sait pas quoi penser, il y a beaucoup de choses à dire sur cette non-qualification. Cette poule pour l’OM, qui sortait du chapeau 4, était très abordable, avec des équipes homogènes, et une tête de série pas terrible. L’OM avait de quoi jouer la deuxième place, largement. Finir dernier de ce groupe, alors que tu avais la troisième place en main jusqu’à la dernière seconde, c’est un échec. Que les joueurs n’aient pas été mis au courant du résultat de Francfort, c’est lunaire. C’est une faute professionnelle. Même si on a envie de jouer la qualification, à ce moment, on doit sécuriser au moins la place en C3. Cela aurait été une déception, mais aussi un moindre mal. Résultat ce matin : l’OM n’a rien, à part la queue entre les deux jambes.
Vous avez facilement trouvé le sommeil hier soir ?C’était une soirée cauchemardesque. On n’a pas vu une grande différence dans le jeu, et on se fait punir au bout. C’est dur, parce que la première mi-temps était vraiment réussie. Marseille a fait une grosse entame de match, sans être flamboyant, mais en étant sérieux, en allant les chercher haut, ils les ont mis en difficulté. Le problème, c’est qu’ils n’ont pas tué le match dans le gros temps fort. Ils ne se sont pas mis à l’abri. Dès que Tottenham a répondu dans l’intensité, et joué plus haut, l’OM a été en grosse difficulté. C’est regrettable de voir ces deux visages, tu ne peux pas faire ça en C1. Même contre un Tottenham très moyen – j’insiste, parce que je les ai beaucoup vus jouer cette saison -, ça se paye. Surtout que tu sais avant le match que Tottenham marque souvent en fin de match, et souvent sur un coup de pied arrêté. Résultat ? Un but sur coup franc, un autre dans le temps additionnel. Tu finis dernier, alors que tu n’avais rien à envier aux premiers, mais eux ont su tuer quand il le fallait.
Au-delà de ce dernier match cruel, le bilan de cette campagne est positif ou négatif ?Le bilan est négatif dans l’ensemble, parce que tu finis dernier. On ne se souviendra pas des deux belles victoires contre le Sporting, même si tu as eu des circonstances favorables. On se souviendra que tu as fini dernier de ce groupe homogène dont tu aurais dû t’extirper. On se souviendra de ce gros coup de poignard dans les dernières secondes.
Qu’est-ce qui vous laisse le plus de regrets ?On peut parler des choix de Tudor, de ses changements incompréhensibles. Quand tu joues le match de l’année et que tu ne fais pas entrer Payet… Même s’il n’est pas en grande forme, dans une fin de match comme ça, il peut faire différence sur coup franc, ou sur un geste. Pareil : sortir Clauss pour Kaboré, sans lui jeter la pierre, ce n’était pas le choix le plus judicieux. Quand tu jettes ton dévolu sur un match qui conditionne ta saison, l’avenir de ton club, ces choix laissent perplexes. Marseille avait son destin en main, mais n’a pas tenu son intensité sur tout le match. Les entrants doivent alors apporter quelque chose, mais Ünder et Kaboré n’ont pas répondu présent. Pendant ce temps, Payet et Gerson étaient sur le banc. Je ne comprends pas. C’est dommage, mais c’est la responsabilité du coach et des joueurs sur le terrain. L’OM avait connu pire situation en C1, donc ne pas sortir, c’est rageant. Surtout que le tableau s’annonce plus ouvert que d’habitude en huitièmes…
Cette élimination peut-elle plomber la suite de la saison ?Il faudra se relever, mais ça annonce une période difficile, oui. Les supporters avaient de grands espoirs, l’ambiance était incroyable. Mais ils vivent une nouvelle désillusion qui en suit d’autres. Les joueurs vont devoir faire preuve de caractère, surtout vu les deux matchs qui arrivent contre Lyon et Monaco. Après, parfois c’est mieux d’enchaîner avec de telles affiches pour te réveiller rapidement. Ça peut être un mal pour un bien. Mais pour l’OM et son histoire européenne, cette campagne a encore été décevante. J’espère que ça ne plombera pas la saison… Dans l’immédiat, ça peut surtout fragiliser Tudor, oui, parce que ses choix sont discutables. Les joueurs vont devoir se remettre la tête à l’endroit, la C1 use beaucoup d’énergie physique et psychologique. On va voir s’ils rebondissent dès dimanche, ça en dira long sur la suite. Il faut se remobiliser en championnat, et aller chercher la Coupe de France.
L’OM avait le niveau C1 cette fois ? C’est toujours un peu juste. Mais à chaque fois, on dit que c’était prenable, faisable. Lors de ma dernière campagne, on avait un gros groupe avec Naples, Arsenal et Dortmund. Mais à chaque fois à domicile, on les dominait, on pouvait gagner, et on était punis sur une occasion. On ne profitait pas de nos temps forts. Onze ans plus tard, c’est toujours la même chose. Cette place est dure pour l’OM, ils ont été meilleurs que le Sporting, que Francfort aussi. Ils n’ont pas fait de mauvais match contre Tottenham, qui n’a pas existé à l’aller à onze contre onze. Mais l’OM a manqué d’expérience, de vice nécessaire, comme par exemple sur le but de Lenglet, qui pousse juste ce qu’il faut Rongier. Ces petits trucs qui donnaient le sentiment d’être si près, mais qui font que l’OM est finalement si loin.
Propos recueillis par Adrien Hémard-Dohain