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Marseille ou l’attrait de l’inconnu
Habitués à faire les gros titres des journaux pendant l'été, les joueurs de l'Olympique de Marseille préparent l'exercice à venir dans une tranquillité presque inquiétante. Plutôt du genre à vivre caché pour vivre heureux, Marcelo Bielsa est à la tête d'une équipe au niveau incertain mais que tout le monde à envie de voir jouer. L'OM 2014-2015, ou l'attrait de l'inconnu.
Il bouge, il sue, il crie, il s’assied, boit un coup, puis se lève. Ce type-là a 59 ans et supporte la chaleur estivale comme il le peut. On ne parle pas d’un joueur de pétanque qui cherche l’ombre d’un arbre généreux pour échapper au soleil mais d’un drôle d’Argentin qui cherche à évoluer en catimini pour échapper aux médias. Malheureusement pour cet homme discret à casquette, c’est en cultivant le mystère que l’on suscite l’envie. C’est donc un homme scruté qui gesticule et hurle à côté de son banc de touche tout au long de l’opposition amicale entre Marseille et Leverkusen ce samedi 19 juillet. Pas présenté officiellement par les dirigeants de l’Olympique de Marseille et adepte de la philosophie du « vivons heureux, vivons cachés » , Marcelo Bielsa a rendu bon nombre de gens « loco » . Muet depuis son arrivée et adepte des entraînements à huis clos, le nouveau coach de l’OM laisse planer le doute sur ses méthodes et naître les attentes autour d’une équipe qui, sans vraiment le vouloir, est devenue l’autre attraction de la Ligue 1. À des années-lumière de l’AS Monaco et, surtout, du Paris Saint-Germain, l’Olympique de Marseille semble être devenu une valeur refuge dans le panorama du football français. Un point de chute pour les amoureux du football en quête d’incertitudes et de frissons. Un OM dont on ne sait finalement pas grand-chose, capable de surprendre comme d’imploser. L’OM que l’on aime, au fond.
Entre rêves et réalité
Sa voix est donc la seule chose qu’il aura perdu ce samedi. À force de gueuler sur Mario Lemina puis sur Morgan Amalfitano, Marcelo Bielsa est devenu aphone mais est reparti victorieux. Un succès 4-1 en match amical face à une équipe totalement hors de forme qui aurait pu être anecdotique si elle n’était pas la première sortie d’une équipe dont on attend tout et rien. De Bielsa, Marseille espère monts et merveilles. Débarrassés du spectre de José Anigo et encore groggy de la saison passée, les supporters de l’Olympique de Marseille ont envie d’y croire. Certains se réabonnent, d’autres s’abonnent, quelques-uns espèrent quand beaucoup d’autres sont sceptiques. Sceptiques car si de Bielsa, ils ignorent presque tout, de l’effectif de l’Olympique de Marseille, ils ne sont que trop conscients. Indéniablement limités, notamment derrière, les Phocéens vont devoir opter pour la magie s’ils veulent réellement créer la sensation cette saison. Pour espérer, les Phocéens avaient besoin d’un pragmatique. D’un homme capable de tirer le meilleur du pire. Et, sans tirer d’enseignement d’une seule rencontre, dans un joli cadre champêtre, ils pourraient bien avoir trouvé le bon.
Une vie d’incertitudes
Raymond Domenech n’est passé qu’à une séance de tirs au but d’être « le bon » . Un échec qui ne lui a pas fait perdre son sens du sarcasme. Surpris par les réactions des joueurs marseillais, invités à parler de leur nouveau coach, Ray Strange s’est fendu d’un tweet ironique. « Le coach nous a dit d’être solidaires, d’appliquer les consignes et d’avoir envie de gagner. Les Marseillais sur Bielsa. Recette miracle ? » , a tapoté l’ancien sélectionneur des Bleus sur son clavier comme pour demander quel entraîneur ne demandait pas ça à ses joueurs. Mais il faut bien avouer que le visage des Phocéens était totalement différent de celui affiché la saison passée. Un pressing de tous les instants – un classique de Bielsa -, onze joueurs qui n’hésitent pas à aller au contact, une quête de verticalité dès la récupération du ballon et un dispositif, le 4-1-4-1, qui a évolué au cours de la rencontre. C’est aussi ça, l’attrait de l’inconnu Bielsa. Du tableau noir à gogo comme on n’en a pas bouffé en France depuis des années. Romao aligné en défense centrale, Lemina devant la défense, entre le poste de libero et la sentinelle, Payet en huit, le seul Gignac devant, et les deux gauchers Thauvin et Alessandrini alignés ensemble. Un gloubiboulga réfléchi qui devrait continuer à mariner tout au long de la préparation de l’OM. Un OM qui attaquera la saison sans véritablement savoir qui il est et ce qu’il veut. Une vie d’incertitudes, en somme. La plus belle.
Par Swann Borsellino