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Marseille : La communication de Tudor, son pire ennemi ?
Hué en début de saison, Igor Tudor est désormais applaudi lors de l’annonce de la composition des équipes au Vélodrome. Pour autant, la Tudormania semble encore bien loin. Pas un problème pour l'ancien stoppeur de la Juve qui se fout de ce genre de considérations. Ce qui peut expliquer son manque de reconnaissance populaire.
Avec 36 points au compteur, l’OM version Igor Tudo réalise le second meilleur départ de l’histoire du club au XXIe siècle. Après 17 journées, seul l’OM de Bielsa a fait mieux en engrangeant deux petit points de plus sur les mêmes temps de passage. Souvenez-vous alors de la folie ambiante autour du Loco ! Il y avait dans l’air marseillais une odeur de promesse tenue. On vous avait promis des buts et de la folie ? Vous avez des buts et de la folie ! Rien de tout ça avec Tudor, accueilli à la manière de Wenger sur le banc des Gunners en 1996. Igor who ? « J’ai envie de parler de délit de sale gueule, résume Karim Attab, journaliste suiveur du club pour Maritima.Ne pas oublier qu’il arrive après deux entraîneurs très charismatiques et reconnus dans le milieu du foot (André Villas-Boas et Jorge Sampaoli, NDLR) qui en plus de ça t’ont ramené en Ligue des champions. » C’est ainsi que les premières sorties du Croate au Vélodrome ont été accompagnées de broncas.
Malgré ces mauvaises bases, le Croate a fini lentement, mais sûrement par inverser la tendance. « Je ne ressens plus d’hostilité à son égard, je crois qu’il y a désormais un vrai respect, observe Thierry Audibert, qui fréquente le Vélodrome depuis l’époque de Skoblar. C’est un respect qui ne se crie pas sur tous les toits, qui ne se chante pas en tout cas. C’est compliqué pour pas mal de personnes qui ont fustigé ce coach, et ont participé au fait qu’il soit sifflé avant même son premier match, de retourner complètement leurs vestes aujourd’hui. »
Une image de Terminator qui s’estompe
D’autant plus que cette situation a été autant subie par Tudor que créée par lui. Le timing de son arrivée, annoncée juste après le départ soudain de l’exigent Sampaoli, semblait entériner le manque de moyens financiers du club. La préparation n’arrangera rien entre une désastreuse campagne de matchs amicaux et un enchaînement de rumeurs estivales évoquant des tensions à l’entraînement avec certains tauliers de l’effectif. « Il y a eu un engrenage cet été de méfiance, de mauvais signaux, entraînant un certain mépris, un déficit d’image, continue Audibert. Il incarne quand même une forme d’autorité brutale qui lui vient de son démarrage à l’OM et qui entre un peu en contradiction avec le côté rebelle, ou prétendu rebelle, des Marseillais. » D’ailleurs, le Roc de Split n’a pas vraiment cherché à brosser tout le monde dans le sens du poil. Pas question pour Tudor d’arriver en costume bleu ciel au stade et d’afficher son sourire Colgate en Une des quotidiens locaux pour redorer son image. Le gaillard travaille et semble n’avoir aucune appétence pour la séduction médiatique. En conférence de presse, il n’hésite pas à dégainer de la réponse monosyllabique si la question ne lui plaît pas. Comme après l’éclatante victoire à Nice (0-3) où il lui est demandé : « Comment avez-vous trouvé Payet aujourd’hui ? » Réponse : « Good ! » Question suivante. De quoi parachever son portrait fantasmé de Terminator du football.
Et pourtant, derrière ces moments cassants, il commence à y avoir des choses à retirer de ces exercices médiatiques imposés. « Il a eu un peu de mal à trouver la bonne distance avec les journalistes suiveurs de l’OM mais plus les mois avancent, plus je le trouve à l’aise dans ses réponses. On finit par avoir deux, trois trucs pas mal. C’est plus intéressant que certains autres coachs, même si on reste loin de Bielsa qui nous annonçait en conf’ la compo du lendemain », explique Karim Attab. Il se murmure même qu’il pourrait bientôt donner quelques interviews individuelles. De quoi soigner ses relations avec le monde extérieur, même si en interne c’est une autre histoire.
L’employé du mois
Tudor est corporate et parfaitement intégré dans le club tel que le voudrait Pablo Longoria. Il respecte la hiérarchie. S’il a fallu un peu de temps pour trouver le bon équilibre avec les supporters ou les journalistes, au club, ça a été beaucoup plus simple. Le service presse est très heureux de travailler avec lui. Pas de mauvaise surprise avec le Croate qui ne balancera pas de piques à sa présidence en conférence de presse et a surpris par sa capacité à encaisser les critiques, parfois injustes, sans rien laisser transparaître. Il n’arrive jamais derrière les micros avec un compte à régler. La seule chose qui semble le préoccuper est d’entraîner son équipe, pas de quémander des transferts ou de se faire mousser. Il fera avec ce qu’il a et veut être jugé ailleurs. « La prestation de l’équipe doit être le reflet du travail de l’entraîneur, avait-il balancé juste avant la trêve liée à la Coupe du monde. Tout le reste, ce sont des choses inventées, de la fumée. Rien de réel ou d’important » Même si, à l’OM, la fumée fait souvent partie du décor.
Par Mourad Aerts