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- France-Maroc (2-0)
Maroc, à bout de souffle
Dominateur dans le second acte d’une demi-finale qu’il aura animée de bout en bout, le Maroc a buté sur une équipe de France qui lui était intrinsèquement supérieure (2-0). L’aboutissement logique d’un Mondial que les Lions de l’Atlas auront su ponctuer d'une présence inattendue dans le dernier carré, avant de se heurter au cynisme froid des Bleus de Deschamps.
A priori, Mark Twain n’avait pas grand-chose à voir avec le Maroc. C’est pourtant l’une des plus célèbres citations de l’auteur des Aventures de Tom Sawyer qui illustre le mieux le Mondial 2022 des Lions de l’Atlas : « Ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait. » Peut-on seulement s’inventer un logiciel tactique et un esprit d’équipe fonctionnel, alors que son sélectionneur a été nommé à peine trois mois avant la plus grande compétition de football au monde ? Oui, absolument.
Solide comme un Maroc
Walid Regragui et ses hommes en ont fait une édifiante démonstration match par match, défiant la logique mortifère des conjectures et des statistiques, pour, comme l’aura déclaré le technicien marocain « faire déjouer les pronostics, les xG et les trucs de Harvard ». Il y aura eu dans le parcours marocain une mystique collective un peu insensée, qui puise son mystère dans l’alchimie formidable de son groupe, une alchimie qui ne pouvait être comprise qu’en étant vécue de l’intérieur. Les résultats de cet impénétrable management étaient, eux, beaucoup plus lisibles et déchiffrables, à l’image du jeu marocain lui-même. Brillamment cartésiens, les hommes du Royaume chérifien auront érigé un bloc équipe que ni l’Espagne ni le Portugal n’auront su transpercer. Leurs circuits offensifs, amorcés par Amrabat, et les montées d’Hakimi, relayées par Ounahi et finalisées par la triplette Ziyech-Boufal-En-Nesyri, n’étaient aussi pas sans mérite. Les Rouge et Vert auront su développer un jeu habilement construit aussi bien face à la Belgique, dominée 2-0, au Canada (en première mi-temps), puis dans le second acte face à l’équipe de France, où se seront néanmoins échoués leurs fantasmes de finale.
Les limites puis l’éternité
Les Bleus se seront en effet mutés en impitoyable attrapeurs de rêves des songes marocains, qui auront immanquablement touché leurs limites ce mercredi. L’absence d’Aguerd, à laquelle s’ajoutait bientôt celle de Saïss – sorti à la 20e minute de jeu – laissait les Lions de l’Atlas orphelins de leur défense centrale type, alors que les Bleus auraient pu au moins mener de 2 buts à la pause, si Mbappé avait été plus altruiste et Giroud plus efficace. Encore une fois remarquable sur son aile gauche, Boufal quittait, lui, ses partenaires à l’heure de jeu, remplacé par Aboukhlal, beaucoup plus brouillon.
Les Marocains auront également souffert d’un déficit au poste d’avant-centre, où En-Nesyri puis Hamdallah auront été collectivement exemplaires, mais limités balle au pied. En face, l’équipe de France pouvait, elle, se permettre de livrer une seconde mi-temps paresseuse, seulement traversée d’un éclair de génie de Mbappé, qui permettait à Kolo Muani de clore le sort du match, à la 79e minute de jeu. Beaucoup plus entreprenants en seconde période, les gars de Regragui devaient pourtant s’incliner face à des Français qui font décidément figure d’alpha prédateur du foot mondial. Première nation africaine demi-finaliste de Coupe du monde, l’essentiel est cependant ailleurs pour le Maroc : pour l’éternité, ses Lions auront laissé leur trace indélébile sur l’atlas du football des nations.
Par Adrien Candau