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Mario, c’est le moment ou jamais !
Buteur contre l'Angleterre, mais auteur d'un raté qui aurait pu changer le match contre le Costa Rica, Mario Balotelli commence à agacer les Italiens. Il faut dire que ses matchs références avec la Nazionale se comptent sur les doigts d'une main. Et si ce match contre l'Uruguay était l'occasion de prouver, enfin, qu'il est l'homme de la situation ?
Cette semaine, Mario Balotelli n’a pratiquement rien écrit sur Twitter. Une photo de lui en train de sourire, une rareté, et une autre photo en compagnie de son frangin et de ses deux potes historiques, Reddy et Antony. Et c’est tout. Pas de fanfaronnade, pas de vanne, pas de provocation. Mario, pour une fois, fait profil bas. Il faut dire qu’après le premier match victorieux contre l’Angleterre, où il a inscrit le but décisif de la tête, l’attaquant de la Nazionale a envoyé du bois. Des tweets pour remercier tous ceux qui ont toujours cru en lui, des photos de sa meuf en train de se maquiller, une invitation à insulter un mec en diffusant son numéro de portable (un numéro français, en plus) et, surtout, le fameux tweet : « Si nous battons le Costa Rica, je veux un bisou, évidemment sur la joue, de la Reine d’Angleterre. » Sauf que sur la pelouse, Mario a vite déchanté.
Loin d’être le plus mauvais Azzurro sur la pelouse, il a toutefois raté une énorme occasion, en première période, qui aurait changé le match, et peut-être le parcours de la Nazionale dans cette Coupe du monde. Du coup, au soir de la défaite, Mario a été la cible de nombreuses critiques en Italie. Alors que la presse tente de le préserver, avec une vraie union sacrée autour de la Squadra (du moins, tant qu’elle est encore en lice), les Italiens tirent à boulets rouges sur lui. « Pas décisif » , « surcoté » , lit-on par ci, « vivement que l’Italie soit éliminée pour que cette arnaque ne revienne plus jamais en sélection » entend-on par là. L’occasion aussi de se rappeler qu’en Italie, Balotelli est détesté partout, dès lors que l’on s’éloigne un peu de Milan.
Joindre les paroles aux actes
Pourtant, les statistiques de Bali-Balo avec la Nazionale sont loin d’être catastrophiques. L’attaquant de 23 ans en est à 13 pions en 32 sélections. Au même âge, Roberto Baggio et Alessandro Del Piero avaient respectivement inscrit 7 buts avec le maillot azzurro, tandis que Christian Vieri, le dernier vrai bomber de l’Italie, n’avait encore jamais été appelé en équipe nationale. Donc, non, Balo n’est pas en retard. Loin de là. Il est même plutôt en avance, car on oublie souvent qu’il a 23 ans. Le vrai problème serait plutôt qu’il n’est pas décisif en équipe nationale. Au vrai, sur les 32 matchs qu’il a pu disputer avec la Nazionale, on ne se souvient réellement que d’un seul : celui contre l’Allemagne, en demi-finale de l’Euro 2012. Une rencontre où Balotelli a mis tout le monde à ses pieds, avec un doublé qui avait propulsé l’Italie en finale et qui aurait pu le propulser, lui, sur une autre planète.
Mais comme souvent dans ce genre de situation, au lieu de faire profil bas, Mario a fanfaronné après l’exploit. « J’ai marqué deux buts contre l’Allemagne, mais je vais en marquer quatre contre l’Espagne ! » avait-il prévenu avant la finale. Résultat : quatre buts, oui, mais tous encaissés par l’Italie. Balo, lui, finit en larmes sur la pelouse, au terme d’un match où il n’aura pas touché une bille. Et c’est peut-être ça, finalement, qui dérange le plus les tifosi italiens : que Balotelli ne joigne pas les paroles aux actes. Comprenez : pour faire le clown sur les réseaux sociaux, il y a du monde, mais pour emmener l’Italie sur le toit du monde, là, il n’y a plus personne. D’autant que Mario n’est pas vraiment le genre de joueur à prendre son équipe par la main lorsque les choses tournent mal. Au contraire. Quand son équipe perd, il s’agace, râle, rechigne à se replacer, et entretient même la fâcheuse habitude de prendre des cartons (10 jaunes et un rouge, déjà, avec le maillot bleu). Pas l’attitude que l’on attendrait de l’avant-centre titulaire de l’Italie.
Bouc émissaire ou héros national
De plus, cet été, Balotelli paye la comparaison avec Ciro Immobile. Étincelant cette saison, l’attaquant du Torino, qui a terminé meilleur buteur de Serie A et vient de s’engager avec le Borussia Dortmund, trépigne sur le banc. Un sondage émis par le Corriere dello Sport avant le début du Mondial avait indiqué que 84% des Italiens souhaitaient le voir titulaire à la place de Balotelli. Preuve de l’affection du public pour Ciro et d’une certaine forme de désamour pour ce bon vieux Balo. Face à l’appel du peuple, Cesare Prandelli a fini par céder : ce soir, face à l’Uruguay, Balotelli et Immobile seront alignés ensemble pour la première fois.
Quelque part, un aveu : Mario ne peut pas tout résoudre tout seul. Car on parle là de choses sérieuses. L’Italie est potentiellement à 90 minutes de se faire éliminer de la Coupe du monde au premier tour, pour la deuxième fois d’affilée. Certains joueurs, présents lors du Mondial 2010, ne se sont jamais vraiment remis de la débâcle sud-africaine et n’ont même jamais été rappelés en sélection. Il est quasiment écrit que, si la Nazionale venait à être éliminée aujourd’hui (et qu’en plus, Balo ratait une ou deux grosses occasions), l’attaquant milanais serait désigné, pas forcément à juste titre, bouc émissaire de cette déconvenue. Alors, Mario, c’est l’heure de se sortir les tripes, et d’assumer son statut. Car du bouc émissaire au héros national, il n’y a souvent qu’un pas. Ou qu’un petit but.
Éric Maggiori