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Mariehamn, autonome et champion ?
À deux journées de la fin du championnat finlandais, l'IFK Mariehamn est en tête. Une énorme surprise pour un club qui n'a pas l'habitude de briller sur la scène nationale. Une situation d'autant plus particulière que la ville de Mariehamn est la capitale des îles Åland, une région autonome. David contre Goliath, édition 2016.
Les îles Åland, un petit archipel où vivent 29 000 personnes entre la Suède et la Finlande. Pas de quoi être sur le devant de la scène. Mais les choses pourraient bien changer dans les semaines à venir. Pourquoi ? L’IFK Mariehamn, club de la capitale, est en tête de la Veikkausliiga à deux journées de la fin. Pour un premier titre national ? À l’échelle finlandaise, oui. Au niveau ålandais, c’est un palmarès fort de plus de quarante coupes pour autant de championnats. Car Åland n’est pas une région comme les autres. En 1917, la population demande son indépendance dans l’optique d’être rattachée à la Suède. Trois ans de négociations plus tard et l’Autonomy Act est signé. Un parlement voit le jour, le suédois devient langue d’État, des élections propres aux îles se tiennent, un hymne et un drapeau sont choisis. Le domaine sportif n’est pas en reste. Aujourd’hui encore, ces 1 600 kilomètres de terre au cœur de la mer Baltique sont bien loin du giron d’Helsinki. « On aurait pu intégrer l’UEFA il y a quelques années, au même titre que les îles Féroé, mais ça a échoué » , rembobine aujourd’hui Peter Lindbäck, gouverneur de la région. Une équipe nationale est toutefois alignée aux jeux des Îles. Une seconde place en 2009 et une victoire contre Gibraltar restent aujourd’hui encore comme ses principaux faits d’armes.
10% de la population au stade
« Le football est très important pour Åland » , poursuit l’homme politique qui est également le président du Åland United FC. La section féminine du deuxième club de l’île a déjà remporté le championnat de Finlande, en 2009 et 2013. Pour autant de bons souvenirs. « Tous les habitants étaient heureux et fiers de ce que les filles avaient accompli. » Les Ålandais sont-ils prêts à remettre ça pour les gars du Mariehamn FC ? La réponse est évidemment positive. « Un peu plus de 2000 personnes viennent au stade à chaque match. Ça paraît peu, mais c’est 10% de la population de notre région » , compte Oskar Magnusson, journaliste sportif au Nya Åland. Avant l’explosion de joie, il reste une semaine pour réaliser la portée de l’exploit des protégés de Kari Virtanen et Daniel Norrmen. « Les gens n’arrivent pas à y croire, rivaliser avec des clubs comme l’HJK était impensable il y a encore quelques mois. Les joueurs m’ont avoué y croire grâce aux récentes performances de Leicester ou de l’Islande à l’Euro. » Car l’IFK est une équipe loin d’être bâtie pour le titre. Promus dans l’élite pour la première fois en 2005, devenus complètement professionnels en 2009, les Islanders n’ont jamais fini un exercice sur le podium du championnat.
Rasta Rockett
« On n’a jamais autant parlé de nous dans les journaux sur le continent » s’étonnent les Ålandais. Le football est une excellente vitrine pour cette région ignorée. Mais ce n’est pas le statut particulier de cette ville qui fait débat. S’il n’y a pas de rivalité spécifique entre Ålandais et Finlandais, le fait que Mariehamn puissent rivaliser avec le HJK Helsinki pose problème dans la capitale. Les supporters prennent mal le fait qu’avec ses stars, dont Taye Taiwo, et l’argent dépensé, le petit poucet vienne secouer l’ogre aux vingt-sept titres. « Ils ont des stars, on a une équipe avec du cœur » , avance Magnusson. Le meilleur buteur des Vert et Blanc ? Dever Orgill, un Jamaïcain recruté au St George’s SC en 2013. Comme un symbole d’une équipe construite avec les moyens du bord. « Tout peut arriver dans le sport, mais je suis optimiste. On est déjà très fiers d’eux » , conclut Lindbäck. En tout cas, il n’a pas de soucis à se faire pour son équipe féminine, l’IFK Mariehamn qui, elle, joue dans le championnat suédois. Comme un symbole d’une île bipolaire qui regarde vers le pays d’Abba.
Par Nicolas Kohlhuber