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Marco Verratti : Italien, Magicien et Parisien à vie

Par Andrea Chazy
7 minutes

Pas dans les plans de Luis Enrique, chahuté par les ultras, Marco Verratti (30 ans) pourrait quitter le PSG cet été après 11 saisons et 416 matchs disputés comme un joueur indésirable quelconque. Une véritable ignominie que le club parisien doit corriger avant qu'il ne soit trop tard.

Nasser Al Khelaifi / Marco Verratti / Leonardo - 18.07.2012 - Conference de Presse pour les recrues Ibrahimovic / Verratti -Ligue 1
Nasser Al Khelaifi / Marco Verratti / Leonardo - 18.07.2012 - Conference de Presse pour les recrues Ibrahimovic / Verratti -Ligue 1

2023 n’est pas encore là quand, dans l’auditorium du Camp des Loges, l’ancien centre d’entraînement du Paris Saint-Germain, le Hibou contemple sa vie. Difficile de dire ce qui se trame là-haut, derrière ses deux gros yeux bleus. À l’image, on le voit chez lui, au Parc des Princes, tout sourire, brandissant un maillot « Verratti 2026 » face au public parisien qui le connaît déjà par cœur. Dans la pénombre, alors que le chant « Italien et Parisien, le talent d’un magicien, Marco…Verratti… » qui lui est habituellement dédié résonne, Marco Verratti ouvre son cœur : « (Cette prolongation de contrat), je pense que c’est la démonstration que je pourrai jouer toute ma vie pour ce club, que je veux tout donner pour ce club et que je ne veux pas donner pour un autre club. Gagner ici, ce serait différent pour moi, car j’ai grandi avec cette équipe. Je le vois comme lorsque j’étais supporter de Pescara, quand j’étais petit, que c’était mon rêve de gagner avec Pescara. Mon rêve aujourd’hui, c’est de continuer à gagner pour le Paris Saint-Germain. Peut-être que je vais finir ma carrière en ayant joué pour deux équipes : celle où je suis né, que j’ai toujours supportée, et l’autre avec laquelle j’ai grandi et pour laquelle j’ai tout donné. » C’était il y a huit mois à peine, et pourtant, cette flamme qui anime Verratti et le PSG depuis onze ans est en passe de s’éteindre. D’une manière qui, pour le moment, n’honore pas grand monde.

Parisien de cœur

Ils doivent être peu, dans l’histoire, ces joueurs qui ont disputé 416 matchs dans un club et qui ont été « invités à aller se faire enculer » par une partie de leurs propres supporters. Marco Verratti fait pourtant partie de ceux-là. Lui qui a passé 11 saisons à Paris, qui a gagné 30 titres avec le club de la capitale (un record) dont 9 championnats de France (un record) et qui n’est devancé en nombre d’apparitions sous la tunique parisienne que par l’inamovible Jean-Marc Pilorget. Lui qui n’a jamais cessé de clamer son amour pour la capitale, pour la France et pour le PSG. Comme en 2021 pour France Info, où il disait : « Ici, j’ai tout eu. Footballistiquement, j’ai eu la chance de jouer avec et contre de grands champions, de jouer de grands matchs. Je suis tombé amoureux de ce club. C’est pour ça que j’essaie de donner le maximum, pour rendre la confiance qu’on m’a donnée. » Ou en 2022, pour la Gazzetta dello Sport en Italie : « Je suis passé d’un petit village des Abruzzes comme Manoppello à une capitale comme Paris, où tu es immergé dans de nombreuses cultures, à un âge où tu forges ton caractère, ta personnalité. Paris est une ville fantastique, et ce pays m’a beaucoup donné… Je me sens très français, tout en restant italien. Un jour, je demanderai la nationalité française, étant donné que mes enfants sont nés ici. » 

Même en 2017, seule année où il aurait véritablement pu filer à l’anglaise du côté du Barça, Verratti est finalement resté à Paris et a viré son agent, Donato Di Campli, qui ne l’a toujours pas digéré aujourd’hui. Pourtant, malgré cet attachement viscéral au club, le Collectif Ultras Paris le rangeait récemment au même niveau que Leo Messi ou Neymar par la voix de son porte-parole Romain Mabille sur les ondes de RMC : « On est totalement content des départs de Neymar, Messi et Verratti. Ils font partie d’une période qui n’a pas marché où le marketing a été mis en avant. » Avant de faire une légère marche arrière, quand même, le lendemain sur Twitter/X : « Ça concernait Messi et Neymar, surtout que Verratti n’est pas encore parti (bonne continuation à lui si c’était le cas). Après 10 ans au club, un grand nombre de matchs sous le maillot parisien et nous avoir fait kiffer quand même bien sûr que c’est beaucoup plus nuancé pour lui. » Nuancé ? Il s’agirait quand même de ne pas tout mélanger.

Des adieux à soigner

Évidemment qu’il serait malhonnête d’écrire que Verratti a tout réussi et tout bien fait durant sa décennie parisienne. Il y a eu des hauts, des bas, des critiques justifiées et d’autres moins, des histoires de clopes et d’hygiène de vie douteuses jamais vraiment prouvées qui revenaient sans cesse, mais la réalité, c’est que Marco Verratti fut un pion inamovible du Paris Saint-Germain lorsqu’il était apte à jouer. Que ce soit sous Carlo Ancelotti lors de son arrivée dans l’ombre de Zlatan ce fameux 18 juillet 2012, sous Laurent Blanc – où il a formé ce délicieux trio jamais égalé avec Thiago Motta et Blaise Matuidi –, sous Unaï Emery, Thomas Tuchel, Mauricio Pochettino et Christophe Galtier, Verratti était toujours l’un des seuls noms qui ne prêtaient pas à discussion. Malgré ses 136 cartons jaunes récoltés, les maux de tête filés à Tony Chapron et ses confrères, sa perte de balle à Munich en Ligue des champions ou le potentiel niveau qu’il aurait pu atteindre « s’il avait été plus sérieux » selon ses détracteurs, Verratti a ce génie en lui que peu de gens ont, mais que tout le monde envie.

Je suis passé d’un petit village des Abruzzes comme Manoppello à une capitale comme Paris, où tu es immergé dans de nombreuses cultures, à un âge où tu forges ton caractère, ta personnalité. Paris est une ville fantastique, et ce pays m’a beaucoup donné…

Marco Verratti

Verratti, ce sont d’ailleurs souvent ses adversaires ou ses coéquipiers qui en parlent le mieux. À commencer par ceux qui ont croisé sa route en Ligue 1 et qui l’ont placé à sept reprises en onze ans dans l’équipe type de l’année. Puis, pêle-mêle, il y a Pep Guardiola qui « en est amoureux », Xavi qui le trouve « extraordinaire, d’un niveau semblable à celui des milieux du FC Barcelone » ou encore Léo Messi qui n’hésite pas à parler de lui comme d’un « phénomène ». Des commentaires bien loin des constats récents entendus ici et là, rendant responsable Verratti d’une trop grande partie des errements sportifs du Paris Saint-Germain dont il est loin d’être le premier coupable. Tout simplement aussi car depuis 2018 et la fin de carrière de Thiago Motta, couplée au départ d’Adrien Rabiot à la mi-saison, quels furent les grands milieux de terrain qui ont évolué à ses côtés ces cinq dernières années ? Le fait que la réflexion s’installe est un début de réponse.

À l’orée de cette douzième saison parisienne qu’il regarde pour le moment à la télé, Verratti fait pour la première fois les frais des choix sportifs de son coach, Luis Enrique. À son sujet depuis son arrivée, le coach espagnol ne l’a publiquement jamais critiqué, mais n’a pas non plus dérogé de sa ligne de conduite pour lui qui est la suivante : « Vous verrez dans mes décisions ce que je pense. » Résultat : Verratti n’a pas été convoqué lors des quatre sorties parisiennes du mois d’août, et donc logiquement pas appelé en sélection italienne par le nouveau sélectionneur, Luciano Spalletti. Le message est clair, Verratti est invité à voir ailleurs s’il le peut, mais cela n’empêche que si sa sortie au Qatar du côté d’Al-Arabi se concrétise en cette fin de mercato, elle se doit d’être soignée. Cela éviterait de ranger les fans parisiens qui le conspuent ainsi que la direction dans la même case que Frédéric de Saint-Sernin. Au moment de l’arrivée de Verratti en France, celui qui était alors président du Stade rennais lâchait cette punchline devenue culte qu’il regrettera dans nos colonnes cinq ans plus tard : « Verratti, pour onze millions, encore une fois, c’est un joueur qui – je pense – a beaucoup moins prouvé que Belhanda, donc on est un peu dans l’excès, là. (…) Il va pas jouer dans l’équipe première. (…) Je vous fais le pari qu’il sera rarement même dans les dix-huit. » Aux Parisiens de ne pas faire la même erreur, car ce n’est pas comme cela que l’on traite une légende de son club.

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Par Andrea Chazy

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