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Marcelino, commandant pointilleux du sous-marin jaune
Cinquième de Liga, Villarreal s’avance avec quelques arguments ce samedi au Bernabéu. Outre la bonne forme de Giovani et une équipe compacte, le sous-marin jaune doit beaucoup au travail de son entraîneur, le charismatique Marcelino Garcia Toral. Présentation.
Cette saison, nombreuses sont les raisons de s’intéresser à la Liga. Entre le nouveau leadership de l’Atlético, l’après-Mourinho enfin digéré du Real et le coup de moins bien relatif du Barça, se sont incrustés un Athletic Bilbao intouchable dans son nouveau San Mamés et une Real emmenée par un Griezmann mondialiste. Et puis il y a Villarreal. Le sous-marin jaune, de retour au plus haut niveau après une année de purgatoire, flambe en Liga. Cinquième du championnat, à trois points de la Champions, le club de Castellón ne cesse de surprendre. Poil à gratter des gros – nul face à l’Atlético et au Real, courte défaite face au Barça –, il doit ce statut à des joueurs au top. Uche, 12 buts, Giovani, enfin mature, Perbet, deuxième meilleur buteur de Liga au ratio minutes/but, Musacchio, défenseur courtisé, ou encore Cani, international qui n’a jamais quitté le navire, forment la moelle épinière du projet de Marcelino Garcia Toral. Un Marcelino, coach charismatique, qui a fait de ce Villarreal sa chose. Portrait d’un entraîneur couillu et méconnu.
Pompier pour remontée
Après une honnête carrière de milieu de terrain – sept capes internationales avec la Roja – Marcelino décide très tôt d’embrasser celle d’entraîneur. Sa première expérience, il la connaîtra à la tête du Club Deportivo Leatlad à seulement 32 ans. Pas plus d’une saison, puis direction le Sporting Gijón, plus grand club de ses Asturies natales avec le Real Oviedo. Dans la cité des mineurs espagnols, il fait ses gammes avec l’équipe réserve. Une, deux, trois, quatre, cinq saisons, et le voilà propulsé aux commandes de l’équipe fanion. Cette aventure avec son club formateur se clora après deux années. Pas grave, Marcelino a un plan. Dès sa première saison au Recreativo Huelva, il connaît la montée. Ce titre de Segunda Division sera d’ailleurs le seul du club doyen d’Espagne. Ces remontées, il va en faire son dada. Ainsi, depuis cette montée en mai 2006, il va en faire de même avec le Real Saragosse (2009), puis avec Villarreal (2013). Une marque de fabrique qui ne l’empêche pas de cultiver sa différence.
Au pays du toque, sa vision détonne. Bien qu’il aime « un football de combinaison, de courses et de participation des milieux de terrain » , il avoue dans El País « ne pas aimer le jeu » de la Roja : « Il est trop horizontal et prévisible. Je vois le football comme un jeu dans lequel il faut mettre des buts dans les cages et, pour cela, il faut attaquer ces buts. Si tu attaques peu et arrives avec peu de joueurs dans la surface, cela ne m’attire pas. » Admirateur du grand Sacchi et de son Milan AC, Marcelino Garcia Toral préfère un jeu direct. Cette saison, le jeu de Villarreal en aurait presque de faux airs. Avec la paire Uche-Giovani, un milieu tout-terrain et une assise solide, le sous-marin passe très rapidement des phases défensives aux offensives. Autre comparaison, Marcelino se retrouve dans un grand entraîneur espagnol, Rafael Benítez : « Nous n’avons pas été deux joueurs importants. Il est arrivé de très bas, personne ne lui a rien offert… Et j’ai des similitudes dans la méthode de travail. »
Mieux qu’un programme Weight Watchers
Ses méthodes sont justement celle d’un « tortionnaire » , d’un obsédé du détail et du travail. Lors de son passage au Recreativo Huelva (2005-2007), le journaliste Rafael Pineda se souvient : « Les footballeurs hallucinaient avec un entraîneur qui les mettait dans des cuves d’eau glacée après chaque entraînement et qui contrôlait leur poids au gramme près. » Du côté de Villarreal, même topo. Comme nous le décrivait Jérémy Perbet en début de saison, « il avait perçu un manque cruel de physique lors de son arrivée, alors il a demandé à beaucoup de joueurs de perdre du poids » . Ces kilos superflus perdus ne sont pas pour attirer les belettes sur la plage. « Son obsession pour récupérer le ballon le plus tôt possible m’avait marqué, résume Gonzalo Colsa, ancien milieu du Racing. Pour lui, la clé était de serrer les boulons après la perte du ballon. » Cette rigueur du travail l’a ainsi conduit à délaisser le navire du Racing Santander en 2011 à cause du rififi en interne – lors de son premier passage, il avait mené le Racing en UEFA et reçu le titre de meilleur entraîneur de l’année. Avec ce Villarreal aux reins plus solides, le futur pourrait être encore plus radieux. De toute façon, difficile de quitter un sous-marin en pleine immersion.
Par Robin Delorme, à Madrid