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Marc Crosas : «Benzema me rappelait Ronaldo»
Depuis ses six mois passés à Lyon en 2008, Marc Crosas, 24 ans, a beaucoup voyagé : l'Ecosse, la Russie, et aujourd'hui, le Mexique. Ce pur produit de la Masia s'est engagé cet hiver avec le Santos Laguna, trois fois finaliste des quatre derniers tournois aztèques. Interview.
Comment se passe tes débuts au Mexique ?
Pour moi, l’adaptation est assez facile, surtout après avoir joué en Russie. Ici, on parle la même langue, le vestiaire est très joyeux, et la culture est assez proche de l’espagnole. Je connaissais déjà bien le Santos Laguna, car ils sont liés avec le Celtic Glacgow. D’ailleurs la passion qui existe ici me rappelle le Celtic. Dès que Santos remporte un match, tu ressens vraiment l’impact sur l’humeur de la population. Ce sont des clubs tournés vers les plus pauvres, qui jouent un rôle social.
Le traitement médiatique fait du Mexique d’aujourd’hui un synonyme de violence. Cela ne t’a pas freiné au moment de t’engager avec Santos ?En fait, je me suis renseigné auprès d’amis mexicains comme Efrain Juarez, Giovani Dos Santos, et Rafael Marquez. J’ai également appelé Luis Garcia, qui joue ici, à Puebla. Ils m’ont dit qu’on pouvait vivre normalement, qu’il faut seulement ne pas aller traîner là où tu n’as rien à faire. Si cela me préoccupait vraiment, je ne serais pas ici. De la violence, il y en a partout.
Surpris par le Mexique, son football ?En fait, la seule chose qui m’a surpris, c’est que tout me plaît ici. En Russie, par exemple, c’était autre chose, c’était davantage un saut dans l’inconnu. La culture était vraiment différente, et puis on n’était pas toujours payé. Ca t’empêche de vraiment te concentrer sur le football.
Au fait, pourquoi t’être engagé avec le Volga Novgorod en 2011?Je ne pouvais simplement pas rester sans jouer. Et je ne regrette pas ce choix. J’étais titulaire, ce qui n’était plus le cas lors de mes derniers mois avec le Celtic, et ça m’a permis de reprendre confiance. Là-bas, le football est davantage un business. Le sport numéro un, c’est le hockey sur glace, pas le foot. Il y a des intérêts, mais je ne peux pas vraiment t’en dire plus…
De tes six mois à Lyon, quel souvenir en gardes-tu ?Ce fut une grande expérience. J’ai rejoint un club avec des installations de premier ordre, j’étais entouré de grands joueurs. J’avais 19 ans, il s’agissait de ma première expérience à l’étranger en tant que joueur pro, mais on ne me traitait pas comme un petit jeune. Avec la concurrence de Toulalan, Juninho, et Kallstrom, Bodmer, je savais quel était mon rang, et que je devais attendre une opportunité pour me montrer. Même si j’ai peu joué, ce fut une bonne saison : on termine champion, et on remporte la Coupe de France. Lyon est une ville magnifique, et je me suis fait beaucoup d’amis là-bas.
Qu’as-tu appris à Lyon ? J’ai compris que si je pouvais m’adapter à la vie à l’étranger, à 19 ans, dans un pays où je ne parlais pas la langue, même si j’ai fini par apprendre le Français, je pouvais m’en sortir n’importe où. Après cette expérience, je n’ai pas eu d’appréhension au moment de m’engager avec le Celtic, en Russie, ou au Mexique.
A Lyon, quelle impression t’a laissé Benzema?Quand je suis revenu au Barça au terme de la saison, je leur ai dit qu’il me rappelait Ronaldo (le Brésilien), que c’était un joueur au potentiel énorme, aux mouvements vraiment intéressants, un buteur, mais qui pouvait aussi participer au jeu. Aujourd’hui, c’est clairement l’un des joueurs les plus importants du Real Madrid.
Et Ben Arfa ? Techniquement, Ben Arfa est sans doute supérieur à Benzema, mais Karim avait vraiment cette mentalité de gagneur. Après, on ne peut pas dire, non plus, qu’Hatem ne réussit pas sa carrière. Il est passé par l’OM, et aujourd’hui il est à Newcastle. Mais il pourrait être bien meilleur.
Il semble que les relations entre Alain Perrin et le groupe étaient tendues. Comme cela s’est passé pour toi ?En fait, ce sont Bernard Lacombe et Rémi Garde qui m’ont amené au club, pas Alain Perrin, mais ça c’est toujours très bien passé avec l’entraîneur. Je ne crois pas qu’il existait une réelle tension entre le groupe et Perrin. La tension provenait de la situation, de ce duel serré avec Bordeaux.
Pourquoi n’es-tu pas resté à l’OL ?En fait, j’étais prêté, et sans option d’achat. Je serais bien resté, mais la situation à Lyon était brouillée, le nouvel entraîneur (nda : Puel) a tardé à être nommé.
Après Lyon, tu pars au Celtic Glasgow. Le football écossais c’est un peu l’antithèse de l’espagnol, non ?Oui, mais je n’avais pas le choix, il fallait que je m’adapte. Il m’a fallu un peu de temps pour jouer sur la même fréquence que mes coéquipiers, surtout au niveau physique, mais j’y suis parvenu. Ceci étant dit, le Celtic est clairement l’équipe qui joue le plus au sol en Ecosse.
Si tu devais comparer un Celtic-Rangers et un Barça-Real ?C’est difficile. Mais je crois que si le Real et le Barça venaient de la même ville, ce serait vraiment similaire. La médiatisation du clasico est sans commune mesure avec celle du Old Firm. En revanche, la tension qui existe lors du derby Celtic-Rangers est vraiment unique. Je crois que cela peut seulement se comparer avec un Boca-River.
Au Barça, que t’a t-il manqué pour être pris en compte ?Compliqué… Il y avait beaucoup de concurrence au milieu de terrain, et puis on ne lançait pas aussi rapidement les produits de la Masia qu’aujourd’hui. J’ai préféré partir car je savais que cela serait très difficile de m’imposer. Au final, je ne regrette pas ma décision.
Mais quel est ton sentiment quand tu les vois jouer aujourd’hui ?De l’envie. Mais de l’envie positive… Quand tu vois une équipe jouer aussi bien, t’as envie de jouer de la même manière, et de t’amuser comme eux sur un terrain. Je suis content pour eux, car je reste un culé avant tout.
Tu as déjà accumulé beaucoup d’expérience, mais tu n’as que 24 ans. Comment vois-tu ton futur ?
Je ne prévois plus. Franchement, comment aurais-je pu imaginer que je jouerais en Ecosse, en Russie, en France, et au Mexique ? Donc, je vis au jour le jour. Ici, j’ai un contrat de trois ans. Revenir en Europe n’est pas une obsession, même si évidemment jouer en Liga, le meilleur championnat du monde, ne peut que tenter.
Pour terminer, il paraît que tu veux devenir journaliste …En fait, j’ai toujours voulu être journaliste. J’ai dû arrêté mes études à cause du football, mais depuis j’ai appris le français et l’anglais. J’aime écrire. J’ai d’ailleurs déjà collaboré avec des journaux catalans, avec une revue qui s’appelle Panenka, quand des amis journalistes m’ont sollicités. Je dois encore beaucoup m’améliorer, mais ils me donnent des conseils. En fait, je suis surtout un grand fan de la radio. Pour moi, le média du football c’est la radio…
A voir : La passe décisive de Crosas lors de Chivas-Santos, le dimanche 26 février (réduction du score à 2-1)
Propos recueillis par Thomas Goubin