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Maradona/Sinaloa, amour réciproque… pour l’instant

Par Romuald Gadegbeku
5 minutes
Maradona/Sinaloa, amour réciproque… pour l’instant

Diego Maradona a débarqué cette semaine à Culiacán, chez les Dorados de Sinaloa au Mexique. Un État marqué par la violence et dont l’histoire du protagoniste le plus célèbre, un baron de la drogue, est narrée sur Netflix. Dans le nord-ouest du Mexique, qu’on parle enfin de leur ville sans évoquer le cartel est déjà une victoire. La première d’El Diez. Pour autant, tout reste à faire pour Maradona et ses hommes.

Fin juin, on l’avait laissé en Russie victime d’un malaise à la mi-temps d’un match entre l’Argentine et le Nigeria. On l’a retrouvé cette semaine au Mexique faisant le show lors de l’entraînement de son nouveau club, les Dorados de Sinaloa. Avec la même constance, celle d’être au centre de l’attention. L’entraîneur Diego Maradona a déjà pas mal vadrouillé : le Deportivo Mandiyú, le Racing au pays, une pause de treize ans avant de prendre les rênes de l’Albiceleste, puis les Émirats arabes unis, à Al Wasl FC et au Al Fajairah SC. Et enfin le Mexique, donc, sur ces terres qui l’ont fait Dieu en 1986. Il arrive dans un endroit particulier : l’État du Sinaloa. Plus connu pour son cartel que pour son équipe de football.

Une ville aux mains de Dieu

El 10 n’est pas le premier grand nom à atterrir à Culiacán, capitale du Sinaloa. Deux légendes du football local s’y sont déjà succédé : Jared Borgetti et Cuauhtémoc Blanco. Pep Guardiola y a terminé sa carrière en 2006. Des expériences de courtes durées répondant à la direction sportive bancale d’un club qui voulait alors se faire une place dans l’élite du foot mexicain. Deux saisons en Liga MX – la première en 2005-2006, la seconde en 2015-2016 – soldées à chaque fois par un renvoi immédiat en Liga de Ascenso (deuxième division). Mais l’aura de laPelusa n’a rien à voir avec celles de ses prédécesseurs. Lundi dernier lors de son premier entraînement, les journalistes, les fans, ses propres joueurs n’avaient yeux que pour lui. « Jamais je n’aurais imaginé avoir le privilège de voir Maradona ici. Je ne me suis pratiquement pas entraîné aujourd’hui, j’ai passé mon heure à le regarder » , confiait le milieu argentin Facundo Juárez après sa séance. Diego Maradona, arrivé avec son adjoint Luis Islas (gardien remplaçant des Ciel et Blanc lors du titre de 1986), s’avance plein d’ambition pour son nouveau club.

« Je me sens dans le meilleur moment de ma vie. Je ne suis pas venu en vacances, mais pour travailler et aider les joueurs. Si les fans nous appuient, avec ce que je peux injecter aux joueurs en matière de motivation, je peux vous dire qu’il sera dur de nous battre » , affirmait-il lors de sa présentation devant un parterre de journalistes venu du monde entier. Le début de saison des Dorados laisse moins songeur : quatre nuls et trois défaites en sept journées, à cinq points des playoffs qui leur permettraient d’aller chercher la montée. Ce lundi, une défaite face aux Cafetaleros de Tapachula, quinzièmes sur quinze, les en éloignerait grandement. Mais le projet des Dorados s’étendrait sur le long terme, et El Diez n’en serait que la première pierre, lui qui permet déjà au Sinaloa qu’on parle de lui sans évoquer le cartel ouEl Chapo.

El Pibe > El Chapo

Joaquín Guzmán Loera, dit El Chapo et dont l’histoire ensanglantée est contée sur Netflix, colle à l’image de l’État du Sinaloa. Culiacán demeure l’une des villes les plus violentes du pays. 671 homicides y ont été dénombrés en 2017. Les Dorados, par l’intermédiaire de leurs dirigeants (la famille Hank, l’une des plus puissantes du Mexique), ont été accusés de relations avec le cartel. Richissimes et propriétaires du groupe Casino Caliente (entreprise de paris et de jeux de hasard), ces dirigeants seraient à l’origine même de la venue de Maradona au Mexique. Qui devrait aux yeux de certains permettre une prise de conscience : avec lui ici, les gens réaliseront qu’il est possible de vivre à Culiacán, de sortir, de se promener, de jouer au football sans prendre une balle perdue ou être confronté à la violence. Raison pour laquelle le gouvernement fédéral aurait tout fait pour faciliter son arrivée. Lors du premier entraînement qu’il dirigeait, El Pibe a dansé, sauté et fait admirer ce qu’il reste de son pied gauche devant 500 fans en délire. Un échange de joie réciproque.

Bientôt, le maillot or et noir des Dorados floqué du numéro 10 sera en vente dans tout le pays, pour sûr qu’il trouvera preneur. José Antonio Núñez, président du club, s’enthousiasme déjà des retombées positives de l’arrivée de l’Argentin. « Quasi immédiatement après l’annonce de sa venue, tous les abonnements ont été vendus. Cette arrivée a eu une résonance au niveau mondial, et grâce au football, on parle de la ville de manière différente. Je pense que cela va rejaillir aussi sur le tourisme » , a-t-il déclaré à Marca. Pour Sinaloa, l’arrivée de Maradona est donc déjà une réussite. L’inverse ne se vérifie pas pour autant. L’Argentin, qui reste sur cinq expériences mitigées en tant que coach, souhaiterait plus que tout au monde reprendre en main l’Albiceleste, pour laquelle il a proposé ses services « gratuits » après l’échec du mondial russe. Des services refusés par l’Asociación del Fútbol Argentino. À 57 ans, Diego peine à devenir un entraîneur crédible, plus qu’une idole qui vivrait sur les vestiges de son immense carrière de joueur. Ce lundi, dans un match en américalatinavisión face aux Cafetaleros de Tapachula, il serait bien inspiré de lancer enfin celle de technicien.

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