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Manuel Fernandes, le retardataire

Par Alexandre De Castro
4 minutes
Manuel Fernandes, le retardataire

À 32 ans, l’ex-enfant prodige du Benfica va jouer sa toute première phase finale d’un tournoi international avec le Portugal. Son talent n’était pourtant pas un mythe, mais la star du Lokomotiv Moscou s’est longtemps trimbalé une sale réputation.

Benfica, Valence, Beşiktaş et maintenant le Lokomotiv Moscou… Le CV de Manuel Fernandes en ferait rougir plus d’un, pourtant, c’est clairement une odeur de gâchis qui s’en dégage. Tout comme Ricardo Quaresma, il faisait partie de ces joueurs annoncés comme les futures stars de la Seleção au début des années 2000. Et tout comme lui, on l’a trop peu vu sur la scène internationale, 14 sélections seulement, 0 en phase finale d’un tournoi. C’est maigre. Son ancien coéquipier au Beşiktaş, Julio Alves, (et accessoirement petit frère de l’international portugais Bruno Alves) le regrette particulièrement : « Cela aurait dû se produire avant, bien avant. C’est un joueur capable de faire de belles différences. Il fait partie des meilleurs milieux de terrain du monde, et ce, depuis son premier match sous les couleurs de Benfica. » À l’époque, on le surnommait « Manélélé » , et personne ne blaguait. Sa technique acérée et son impressionnant volume de jeu lui assuraient un avenir radieux. Mais rien ne s’est vraiment passé comme prévu par la suite.

Unai Emery, ce sauveur

Après deux saisons prometteuses au SLB et un titre de champion, Manuel Fernandes va faire une bien mauvaise rencontre. Ronald Koeman débarque à l’été 2005, avec pour mission de décrocher un second titre national consécutif. Le Néerlandais galère et pointe du doigt le rendement du jeune prodige. Gêné par une blessure récurrente, Fernandes se sent traité différemment des autres et se braque. Les deux ne peuvent plus se voir, et le Portugais se retrouve contraint à l’exil du côté du modeste Portsmouth puis Everton.

Après ces deux prêts successifs, la pépite quitte Lisbonne définitivement et s’envole du côté de Valence, où il retrouvera quelques mois plus tard un certain… Ronald Koeman. Dès lors, les vieilles rancœurs ressurgissent. Le joueur traîne son spleen, sort de plus en plus la nuit et se forge une réputation de fêtard et de rebelle. Accusé d’avoir agressé deux policiers lors de la soirée d’anniversaire de son coéquipier Miguel, il passe une nuit en garde à vue en 2008. La goutte de trop pour Koeman. Manélélé part une nouvelle fois à Everton trouver un peu de paix pour quelques mois. À son retour, son détracteur a été remplacé par Unai Emery. Le technicien espagnol fait fi de sa réputation et lui redonne même quelques couleurs.

Tête de Turc ?

Quelques saisons plus tard, Fernandes débarque du côté de Beşiktaş et rejoint ses potes Hugo Almeida, Simão Sabrosa et Ricardo Quaresma. Après une première saison moyenne, il explose et devient l’un des chouchous du club. Mais son étiquette de bad boy lui colle toujours à la peau. Pire, il est même accusé d’arriver encore bourré de la veille aux entraînements par son coach Samet Aybaba. Le joueur nie en bloc. Tout comme Julio Alves qui l’a côtoyé durant deux saisons au sein du club stambouliote : « Nous nous entendions très bien et comme j’étais encore jeune il m’aidait beaucoup. Je ne l’ai jamais vu arriver alcoolisé, jamais. Il a toujours été très professionnel. D’ailleurs, son image est encore très bonne aujourd’hui au Beşiktaş. » Une fois de plus, le Portugais semble payer pour un entraîneur en difficulté. Mais pourquoi cela tombe toujours sur lui? Julio Alves tente de comprendre : « C’est quelqu’un de très réservé, qui ne fait confiance qu’à très peu de personnes… » Problème de caractère ? Manque de chance ? Probablement un peu des deux.

Désormais apaisé, Manélélé fait parler tout son talent du côté de Moscou. Fraîchement sacré champion avec le Lokomotiv, le Portugais s’éclate dans un rôle de faux ailier. Nice en a d’ailleurs fait les frais en huitièmes de Ligue Europa au mois de février dernier (victoire 3-2 du Lokomotiv avec un triplé de Fernandes). Ce qui n’est pas passé inaperçu aux yeux de Fernando Santos, toujours très friand de joueurs d’expérience. Malgré la concurrence de joueurs comme Moutinho, Adrien Silva et João Mario, Fernandes devrait avoir son mot dire durant ce Mondial. En tout cas, Julio Alves y croit dur comme fer : « Il sera très important pour le Portugal cet été. »

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