- C1
- Milan AC/Manchester United
Manchester : voir Milan et renaître
En quatre confrontations, le Milan AC a toujours éliminé Manchester. Mais depuis 2007 et l'humiliation reçue lors de la dernière visite anglaise en Lombardie (3-0), MU a su évoluer, s'inventer une personnalité européenne, pendant que le Milan vieillissait et déclinait.
Trois ans et un fossé. En 2007, le Milan AC disputait, et remportait sa dernière finale de Ligue des Champions, Manchester n’en était alors qu’au mitan de son histoire en C1. Depuis, force est de constater que MU n’a pas perdu son temps : deux finales jouées, pour une remportée. Parfois, les statistiques ne mentent pas. Elles mesurent là l’évolution de la cote des deux clubs à l’échelle du continent. Alors que les Anglais sont devenus des ogres, les Italiens restent des grands noms, toujours respectés, mais plus forcément craints.
Qu’a fait le Milan depuis trois ans ? Il a surtout vieilli. Et Manchester ? Il a mûri, grandi. Alors que Gattuso, Nesta, Ambrosini, et Pirlo, probablement titulaires mardi soir, ont tous passé le cap de la trentaine, en face, seul Paul Scholes fait office de vieux briscard, Ryan Giggs étant forfait. L’âge avancé des Rossoneri constitue-t-il pour autant un handicap ? Quand ils peuvent imposer leur tempo de sénateur, les années cumulées ne pèsent pas, et le Milan se révèle alors comme l’équipe d’Europe la plus agréable à voir jouer. Mais les anciens pourront-ils imposer leur cadence aux fougueux Mancuniens ? Probablement non. Et tenir la choc face aux joueurs à haut rendement d’en face ? Le verdict des matches face à l’Inter, l’équipe la plus physique de Serie A, donne déjà un début de réponse.
En 2007, lors de la demi-finale retour entre les deux clubs, le Milan AC avait stérilisé Man U (3-0), incapable de créer le moindre danger. La supériorité tactique des Rossoneri avait alors sauté aux yeux, comme l’apport décisif de Kaka, qui volait sur la pelouse comme un Ballon d’or qu’il allait devenir. Mais le prosélyte évangéliste s’est depuis envolé vers une autre machine à empiler les Champion’s League. Surtout, cette victoire milanaise, bonifiée dans l’immédiat par les Lombards, a davantage profité à Manchester à moyen terme. Car, humiliés sur la pelouse et sur le tableau noir, les Red Devils ont fait depuis leur révolution culturelle. Toujours spectaculaires et généreux en Premier League, les Mancuniens n’hésitent désormais plus à devenir ennuyeux en Ligue des Champions. Pour leur plus grand bien. Il y bien des défaites utiles.
En 2007, avant de prendre une leçon en Lombardie, Man U avait rasé Rome en une heure et demie d’un 7-1 nucléaire. Du show, du plaisir, mais pour quel résultat au final ? Désormais, Manchester a compris que la prise de risque pouvait payer lors d’une année bénie (1999) mais que la Ligue des Champions était avant tout question de maîtrise, totale, sans relâche. En 2008, les disciples de Sir Alex s’étaient contentés de victoires avares sur Barcelone (demi-finale) et Lyon (en huitièmes), avant de gratter la finale aux pénaltys. L’an dernier, les Red Devils s’étaient frayé un chemin vers le dernier mercredi du calendrier en ne se montrant flamboyant que face à Arsenal en demi-finale, une sorte de rencontre de Premier League bis. Pas un hasard.
Assagi, Manchester a surtout pris du poids dans l’entre-jeu, où Carrick et Fletcher, de milieux battants se sont transformés en impitoyables maîtres du temps, capables de dicter un tempo, et de venir conclure le travail collectif d’une frappe létale. Si Fletcher avait pu disputer la finale, le Barça l’aurait-il emporté si facilement ? Quant au vide laissé par C.Ronaldo, Rooney l’a rempli seul, ne laissant que les restes à Berbatov ou Owen. Toutefois, on demande à voir si le Portugais ne va justement pas commencer à manquer au moment des grandes échéances continentales.
Le sens de l’histoire travaille donc pour Man U. Mais le constat du déclin milanais est tout de même à relativiser. D’abord, parce qu’en 2007, l’âge des troupes faisait déjà douter de la fiabilité de l’ensemble, et les vieux grognards avaient fini par faire taire l’Europe entière. Aussi, car Leonardo a opté depuis l’automne pour un rafraichissement, notamment sur les côtés, avec la promotion d’Abate et d’Antonini (pas sûr cependant de voir ces deux-là mardi soir). Et si Ronaldinho n’est pas au niveau du Kaka 2007, il reste l’un des rares meneurs de jeu d’envergure, celui qui manquait l’an dernier à l’attelage milanais, quand le ventre du Brésilien plombait toutes ses initiatives. Manchester ferait donc bien de ne pas oublier que ses succès sont nés à Milan, un soir d’humiliation.
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